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mercredi 28 octobre 2015

Les Crises.fr : [Réparations 3] L’hyperinflation allemande de 1923

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28
Oct
2015

[Réparations 3] L’hyperinflation allemande de 1923


Suite du billet sur l’occupation de la Ruhr

L’hyperinflation allemande de 1923

L’hyperinflation apparaît alors en Allemagne la fin de l’année 1922, devenant exponentielle et donc incontrôlable : la planche à billets se met en route de façon frénétique, l’ensemble des grands agents économiques du pays (grosses entreprises, banques privées…) se mettant même à fabriquer des billets, ce qui ajouta à l’effet d’entrainement. On estime aujourd’hui que cette panique hyperinflationniste résulte d’un ensemble de facteurs, qui, cumulés formèrent une spirale inflationniste autoentretenue :
  • le niveau d’endettement du pays et un service de la dette écrasant,
  • la pression spéculative sur le cours du mark,
  • la perte de confiance dans la monnaie fiduciaire et les rentes d’État (remboursées en papier dévalué),
  • la mauvaise circulation des flux de marchandises d’origine agricole,
  • l’accélération cumulative de la vitesse de circulation de la monnaie,
  • la multiplication des agents producteurs de monnaie,
  • l’indexation des salaires ouvriers et des classes moyennes sur les prix.
Le dollar, qui s’échangeait à 4,2 marks en 1914, 42 marks en 1920 et 420 en juillet 1922 passa à :
  •                              49 000 marks en janvier 1923
  •                       4 900 000 marks en août 1923
  •                440 000 000 marks le 3 octobre 1923
  •        42 000 000 000 marks le 22 octobre 1923
  •     420 000 000 000 marks le 22 octobre 1923
  • 4 200  000 000 000 marks le 22 octobre 1923
inflation allemagne 1923o
inflation allemagne 1923
Toute l’économie fut désorganisée : les prix des repas servis au restaurant varient selon l’heure de la commande et l’heure à laquelle l’addition est présentée, si bien que les restaurateurs devaient offrir des plats en plus à leurs clients, ou leur faire payer l’addition en début de repas ; durant l’été 1923, les paysans refusaient en ville d’accepter le mark-papier en échange de leurs produits agricoles ; les salariés se faisaient payer deux fois par jour, etc.
inflation allemagne 1923
inflation allemagne 1923
inflation allemagne 1923o
Source complémentaire :

Les conséquences politiques

En 1923, la résistance passive coûte énormément (par exemple les salaires et les assurances sociales des grévistes sont pris en charge par les finances publiques) et fait chuter la valeur du mark. Le 12 août 1923, le chancelier Cuno démissionne. Le lendemain, le nouveau président de la République Friedrich Ebert nomme Gustav Stresemann au poste de chancelier, qui nomme un gouvernement de “grande coalition” avec les socialistes du SPD. Comme on l’a vu, Stresemann appelle à la fin de la résistance passive et s’engage à respecter les obligations imposées par le traité de Versailles.
En Rhénanie, plusieurs républiques éphémères sont fondées comme la République du Haut-Nassau, la République palatine, ou la République rhénane. Poincaré ne freine pas ces séparatismes, qui selon lui garantissent la paix. Ces initiatives de groupes nationalistes rhénans opposés à l’héritage prussien de l’Allemagne n’auront aucune suite car, aux yeux de l’opinion publique allemande, elles paraîssent aller dans le sens des intérêts étrangers.
Mais Stresemann a de grandes difficultés à préserver l’unité du pays. En Bavière, les extrémistes de droite décrètent l’état d’urgence. Stresemann demande au président Ebert de proclamer l’état d’urgence le 26 septembre, mais l’armée en poste en Bavière refuse d’obéir aux ordres. La Thuringe et la Saxe sont quant à elles aux mains des socialistes et des communistes. Stresemann envoie l’armée en Saxe pour rétablir la situation, mais elle ne s’améliore guère. Le 29 octobre 1923, Stresemann décide de destituer les membres du gouvernement de Saxe ; pour la Bavière, il préfère ouvrir des négociations. Stresemann va alors se trouver dans une situation très inconfortable car les ministres SPD quittent son gouvernement, provoquant la rupture de sa coalition.
Le chef de l’armée Hans Von Seeckt projette alors de mettre sur pieds une « dictature légale » pour contenir la crise, ce que Stresemann refuse. Il est alors attaqué de toutes parts. Le Putsch de la Brasseriedu 8 novembre 1923 mené par Ludendorff et Hitler à Munich est le point culminant du conflit. Lorsque Stresemann apprend la nouvelle, il se serait exclamé « Finis Germaniae ». Le putsch vise à renverser le gouvernement, l’affrontement avec la police fait vingt morts dont seize putschistes. Les responsables sont arrêtés, Adolf Hitler est condamné à une peine de prison, Ludendorff est jugé mais acquitté.
inflation allemagne 1923
Proclamation au peuple allemand ! Le gouvernement des criminels de novembre (NdT. : 1918…) à Berlin a été déposé aujourd’hui. Un gouvernement national allemand provisoire a été formé, composé du général Ludendorff, d’Adolf Hitler, du général von Lossow, du colonel von Seisser.
“Proklamation an das deutsche Volk! Die Regierung der Novemberverbrecher in Berlin ist heute für abgesetzt erklärt worden. Eine provisorische deutsche Nationalregierung ist gebildet worden, diese besteht aus General Ludendorff, Adolf Hitler, General von Lossow, Oberst von Seißer.”
Après ce point culminant des séparatismes, la situation politique se stabilise peu à peu, les partis extrémistes refluent.
Bien qu’il ait combattu l’inflation et préservé l’unité du pays, Stresemann est sommé de quitter le pouvoir le 23 novembre 1923, le SPD ayant déposé une motion de défiance la veille. On lui reproche ne n’avoir pas traité la Thuringe, la Saxe et la Bavière de la même manière, en n’envoyant pas par exemple l’armée en Bavière. Le président Ebert déclare alors : « Ce qui vous pousse à renverser le chancelier sera oublié dans six semaines, mais vous sentirez les conséquences de votre bêtise dix ans encore ».

La victoire contre l’inflation

Le 20 novembre 1923, le nouveau commissaire à la Monnaie du gouvernement (et ancien président de la banque centrale) Hjalmar Schacht, stabilise la monnaie en remplaçant le mark par le Rentenmark sur la base d’un Rentenmark pour 1000 milliards de marks. Il stoppa l’inflation, avec 3 séries de mesures visant à diminuer la quantité de monnaie :
  • l’interdiction des émissions de monnaies privées,
  • le rétrécissement du volume des moyens officiels de paiements,
  • la “congélation” du crédit (fin du réescompte à la banque centrale).
Les conséquences économiques de la crise monétaire sont contrastées. Si certaines couches de la population se retrouvent ruinées (une partie des classes moyennes et non pas son ensemble, à savoir les rentiers essentiellement, comme par exemple les retraités), d’autres s’en tirent sans trop de dommages : la classe paysanne, les artisans, les petites entreprises et les grosses fortunes. La prolétarisation des couches moyennes, cliché véhiculé à cette époque par des commentateurs peu informés des réalités économiques, n’a pas eu lieu :
« Il est peu aisé de connaître les conséquences de l’hyperinflation sur les différentes couches sociales. L’idée d’une détérioration généralisées des couches moyennes n’est plus partagée. Ces couches étaient trop diverses ; elles ont traversé la période dans des conditions plus variables. Ont perdu : les épargnants, les prêteurs, les détenteurs d’emprunts publics. Par contre, les petits entrepreneurs, les commerçants et les agriculteurs seraient sortis relativement indemnes de l’inflation. » [Alfred Wahl, L’Allemagne de 1918 à 1945, 2001]
Au final, c’est moins l’inflation que le sentiment d’être injustement puni par les différents traités de paix mais surtout la recréation de la Pologne à partir des terres prussiennes et la menace d’une guerre civile qui ont eu pour effet de donner un nouvel élan au nationalisme et au revanchisme allemands, lesquels ont toujours été présents dans certaines couches de population depuis l’avènement du pangermanisme. L’Allemagne n’ayant plus de colonies, elle va se recentrer sur son territoire linguistico-culturel et tout miser sur sa force de travail. Comparativement, octobre 1929 fut beaucoup plus dramatique et porta plus à conséquence que 1923.

Le plan Dawes de 1924

In extremis, Stresemann accepte début décembre 1923 de devenir ministre des affaires étrangères du  nouveau chancelier.
Il réussit à convaincre les Alliés de négocier un nouveau plan pour le paiement des réparations, avec le soutien des États-Unis.
Si 1922 avait finalement rendu inévitable l’occupation de la Ruhr, le coût élevé de celle-ci tant pour l’Allemagne (chômage, perte de contrôle de l’inflation…) que pour les Alliés (coût élevé pour un retour assez limité, problèmes diplomatiques…) rendait une renégociation envisageable.
Les Britanniques réclamèrent à la France plus de souplesse à l’égard de l’Allemagne et pour faire entendre raison à leur ancienne alliée, ils jouèrent contre le franc en Bourse. La devise française perdit en moins d’un an la moitié de sa valeur et Poincaré, de plus en plus isolé, fut bientôt contraint d’appeler à l’aide les financiers anglo-saxons et de renégocier les réparations allemandes.
Le 24 avril 1924, le plan Dawes fut accepté et remplaça le programme de paiement de Londres. Il ne modifia pas le montant total des réparations : alors que les obligations « C » furent omises dans le cadre du plan, elles ne furent pas officiellement annulées.
plan-dawes
Dans le cadre du plan :
  • les troupes alliées devaient se retirer de la Ruhr,
  • le paiement des réparations fut réorganisé. La première année, à la suite de la mise en œuvre du plan, l’Allemagne aurait à payer un milliard de marks. Ce chiffre passerait à 2,5 milliards de marks par an, à partir de la cinquième année du plan, sans précision sur leur durée. Une agence de réparations fut créée, avec les représentants alliés pour organiser le paiement des réparations
  • la banque centrale devait être réorganisée, devenir indépendante du gouvernement allemand, avec une direction à au moins 50 % non allemande, et la monnaie allemande devait être stabilisée.
  • un prêt de 800 millions de marks devait être accordé (50 % en provenance des États-Unis, 25 % du Royaume-Uni, et le reste d’autres pays européens) pour sauvegarder la monnaie allemande et aider l’Allemagne dans le paiement des réparations
Le plan Dawes réussit à stabiliser la monnaie, mais rendit le pays dépendant des marchés étrangers.
En effet, après 1924, les capitaux étrangers ont afflué en Allemagne. L’Allemagne a ainsi finalement payé durant ces années là, mais pas véritablement sur ses ressources propres.
Le paradoxe d’un afflux de capitaux dans un pays aussi surendetté s’explique par le fait que, en pratique, le plan Dawes avait inversé le rang des créances : les prêteurs privés devenaient prioritaires par rapport au paiement des réparations.À l’inverse, l’Allemagne étant déjà surendettée, rien ne l’incitait à ne pas s’endetter encore plus. Une note du ministère des Affaires étrangères indiquait d’ailleurs “Plus nous emprunterons à l’étranger, moins nous aurons à payer au titre des réparations.” (Ritschl) La politique de Stresemann a finalement consisté à rendre les créanciers étrangers otages du problème des réparations – leur intérêt étant dès lors qu’elles fussent le plus basses possible pour ne pas inciter l’Allemagne au défaut.
Une partie de ces ressources étaient consacrées à des investissements publics (logements sociaux, stades, lignes de métro, début de l’électrification des lignes ferroviaires, première autoroute Cologne-Bonn) mais non directement productifs pour aider aux réparations, ce que déplora l’Agent des réparations. Cependant la majeur partie de ces crédits a été consacrée au paiement des réparations, dans un mécanisme de Ponzi, de nouvelles dettes servant à payer des anciennes. Comme la plupart des prêteurs étaient américains, on assistait donc à un vaste recyclage des crédits : les prêts américains aident l’Allemagne à payer les réparations, ce qui permettait aux Alliés de rembourser leurs dettes de guerre aux américains.
L’historien américain Stephen Schuker fit valoir que les Allemands reçurent autant de prêts américains (qu’ils ne remboursèrent jamais) que l’Allemagne ne paya de réparations. En effet, Schuker nota qu’entre 1921 et 1931, l’Allemagne avait payé 19,1 milliards de marks de réparations, et dans le même temps, elle contracta 27 milliards de marks de prêts envers les États-Unis, sur lesquels l’Allemagne fit défaut en 1932.
On peut se demander pourquoi des investisseurs étrangers participèrent à ces prêts qui ne semblent avoir d’intérêt que pour l’Allemagne. Il existe plusieurs explications. Premièrement, il était dans l’intérêt de la communauté bancaire internationale – et plus particulièrement des États-Unis – de rouvrir le marché du crédit allemand, ce qui servait ses intérêts, d’autant qu’ils se pensaient protégés par leur priorité de remboursement..
La seconde explication est que ce plan paraissait incitatif même pour les alliés. En fait, le plan de de paiement des réparations n’incluait que l’indemnité nette (les obligations A) ne tenait aucun compte des dettes de guerre interalliées (obligations B) ; les responsables politiques et les experts espéraient que le Congrès américain finirait par annuler tout ou partie de ces dettes. Ce plan permettait donc d’inciter l’Allemagne à payer l’indemnité nette, et permettait de gagner du temps, tout en favorisant le reconstruction européenne par le biais du crédit américain.

L’évacuation de la Ruhr en 1925

Sur le plan international, l’occupation de la Ruhr provoqua un sentiment de sympathie à l’égard de l’Allemagne, mais aucune action concertée, car aucun pays ne voulut prendre la responsabilité d’une remise en cause du traité de Versailles. Confrontées à leurs propres difficultés économiques, ne tirant pas suffisamment de ressources de cette occupation (même si les puissances occupantes recevront en net 900 millions de marks-or, ce qui fait de l’occupation une affaire financièrement assez rentable, surtout après la fin de la résistance passive), la France et la Belgique finirent par accepter les propositions du plan Dawes et retirent leurs troupes en juillet et août 1925 ; elles évacuent Düsseldorf, Duisbourg et l’important port fluvial de Ruhrort. Le 25 août 1925, l’occupation de la Ruhr est terminée. Celle de la Rhénanie se poursuit encore jusque 1930, cette fois avec le soutien des Britanniques.
Occupation de la Ruhr par la France en 1923 Ruhrbesetzung
Caricature française de 1924 : Conférence à trois sur la Ruhr
Cependant, la vraie question derrière l’occupation n’était pas les défauts allemands sur les livraisons de charbon et de bois, mais de forcer l’Allemagne « à reconnaître sa défaite dans la Première Guerre mondiale et à accepter le traité de Versailles ». Poincaré reconnaissait que si l’Allemagne pouvait s’en tirer en défiant le traité de Versailles en ce qui concernait les réparations, un précédent serait créé, et, inévitablement, les Allemands feraient tout pour démanteler le reste du traité de Versailles. Aux élections législatives suivantes, le 11 mai 1924, la victoire du Cartel des gauches consacra l’échec de sa politique.
Du point de vue français et belge, l’opération ressemblait à un échec : elle démontrait que la communauté internationale ne voulait et ne pouvait rien faire au sujet des différents persistants avec l’Allemagne. Ceci est à mettre en rapport avec à la passivité des signataires de Versailles lors de laremilitarisation de la Rhénanie par Hitler en 1936, au mépris du traité.

Départ des derniers Français de Dortmund le 22 octobre 1924 :
Occupation de la Ruhr par la France en 1923 Ruhrbesetzung
Occupation de la Ruhr par la France en 1923 Ruhrbesetzung

Le traité de Locarno de 1925

Conséquence de l’impasse dans laquelle se trouvent la France et l’Allemagne et des changements de gouvernements (Cartel des gauches en France dirigé par Édouard Herriot, Parti travailliste au Royaume-Uni avec le modéré Ramsay Mac Donald) au sein des grandes puissances européennes, l’Europe connait en 1925 phase d’adoucissement des relations diplomatiques.
Le succès diplomatique du Plan Dawes se poursuit par un autre succès de Stresemann et pas l’un des moindres : la signature des accords de Locarno le 16 octobre 1925. Ils visent à assurer la sécurité collective en Europe et les frontières de l’Allemagne. Cinq traités sont alors signés : un pacte rhénan qui garantit les frontières occidentales de l’Allemagne, et quatre autres traités d’arbitrage (Allemagne-France, Allemagne-Belgique, Allemagne-Pologne et Allemagne-Tchécoslovaquie).
Le Pacte rhénan est signé par la Belgique, l’Italie, la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne. C’est un traité de garantie mutuelle qui permet aux puissances signataires d’affirmer le maintien du statu quo territorial et juridique de la région rhénane. Il pose trois problèmes majeurs : le principe de garantie des frontières occidentales de l’Allemagne (prévoyant même un renforcement de l’interdiction de remilitarisation de la Rhénanie), le principe d’interdiction d’utiliser la guerre comme moyen de règlement des conflits et le principe de l’arbitrage obligatoire.
Les accords de Locarno sont l’acmé du moment de paix européen dans l’Entre-deux-guerres. Pendant la période 1920-1925, les projets européistes foisonnent, tel celui de Coudenhove-Kalergi : l’Union paneuropéenne internationale.
Gustav Stresemann, Neville Chamberlain et Aristide Briand à Locarno

Le plan Young de 1929 

Au fur et à mesure de la croissance de la pyramide du crédit allemande, les banquiers new-yorkais révisèrent leur jugement sur le niveau de risque et diminuèrent leur apport de crédits. Lors de la conférence des banquiers centraux à Long Island en 1927, Benjamin Strong, gouverneur de la Fed de New-York, avait prédit que dans un délai d’un à deux ans, le mécanisme de recyclage qui permettait à l’Allemagne de financer ses paiements de réparation grâce aux prêts américains allait tomber ne panne, provoquant la pire dépression de l’histoire. La seule question, selon lui était de savoir si la crise éclaterait en Allemagne ou aux États-Unis (Ritschl).
En 1928, il apparut clairement que le Congrès n’annulerait pas les dettes interalliées. La France et les États-Unis signèrent alors un accord prévoyant la reprise intégrale des remboursements à partir de 1929/1930.
Dans le cadre du plan Dawes, les Allemands avaient rempli leurs obligations. Cependant, ils considéraient le plan comme une mesure temporaire et s’attendaient à un plan révisé à une date ultérieure. Le ministre allemand des Affaires étrangères Gustav Stresemann appela à un plan définitif de réparation en même temps qu’un retrait anticipé des troupes alliées de la Rhénanie. Les Français, conscients de leurs positions politique et financière affaiblies, acquiescèrent.
Si le plan Dawes avait assez bien marché, c’est que les marchés de capitaux purent absorber, dans ce contexte difficile, le montant des obligations A, soit 12 MdMo. Mais il apparaissait désormais qu’il faudrait rajouter les obligations B, soit 38 MdMo supplémentaires, ce qui dépassait largement les capacités de prêt.
En février 1929, un nouveau comité fut formé pour réexaminer les réparations. Présidé par le banquier américain Owen Young, le comité présenta ses conclusions au cours du mois de janvier 1930. Le « plan Young » qui visait à garantir le paiement des dettes de guerre interalliées fut accepté et ratifié par le gouvernement allemand le 12 mars 1930.

plan-young1
Il prévoyait principalement :
  • la fin de la protection des créanciers privés : les réparations étaient de nouveau prioritaires ;
  • le plan établissait un montant de réparation final à 112 milliards de marks-or (26,35 milliards de dollars), avec un nouveau calendrier de paiement sur 59 ans qui verrait les réparations terminées, en 1988 (c’était la première fois qu’une date limite avait été fixée). Il prévoyait une annulation partielle des réparations, habilement cachée à l’opinion publique.
  • en outre, le contrôle étranger des finances allemandes devait se terminer par le retrait de l’Agence des réparations, qui serait remplacée par la Banque des règlements internationaux. La banque avait été créée pour fournir de la coopération entre les banques allemandes et, recevoir et verser les paiements des réparations.
  • un autre prêt de 300 millions de dollars devait être levé, et donné à l’Allemagne.
Conséquence de ce plan, les paiements allemands étaient égaux à la moitié de ce qui avait été requis par le plan Dawes. Mais les conditions de paiement étaient beaucoup plus strictes.
Enfin, la mise en œuvre du plan Young nécessitait le retrait franco-anglais de la Rhénanie sous quelques mois.
La dureté du plan impliquait que l’Allemagne ne pourrait plus payer les réparations à crédit : le total des réparations et des dettes privées représentait au moins 70 % du PIB de 1929. L’Allemagne était ainsi proche d’une crise de l’endettement dès le début de 1929, avant même que n’éclate la crise économique.
Si l’Allemagne avait accepté un tel plan, c’est que, tant qu’elle pouvait espérer réintégrer l’économie mondiale, elle ne voulait pas se couper des marchés internationaux de capitaux. Elle savait aussi qu’elle ne pouvait interrompre le paiement des réparations, sous peine de sanctions de type 1923. Elle espérait gagner du temps, afin que, en cas de problème et suivant sa stratégie de prise en otage des marchés de capitaux, une nouvelle inversion des priorités des créanciers lui permette de suspendre le paiement des réparations tout en payant les créanciers privés.
Il y avait de plus une hostilité allemande envers le plan qui allait croissant. En décembre 1929, 5,8 millions d’électeurs inscrivirent leur opposition au plan au cours d’un référendum, qui permit à Adolf Hitler de gagner une « attention nationale importante et de précieux financements de droite ».
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Affiches de 1930 anti-Plan Young
À suivre dans le prochain billet : Les défauts des années 1930

3 réponses à [Réparations 3] L’hyperinflation allemande de 1923


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