Autrefois le bourreau percevait, en vertu du droit de havage — ce droit consistait à prendre dans les marchés autant de grains ou de denrées que la main peut en contenir. Le bourreau, en percevant ce droit, marquait avec de la craie l’habit des marchands, pour quittance du paiement — qui lui était dévolu, une contribution, en argent ou en nature, sur les denrées de la halle, le jour où il devait faire une exécution. On dit même qu’en certains lieux il attendait pour se mettre à l’œuvre qu’un officier de la justice lui eût jeté sur l’échafaud, en présence de la foule, la somme qui lui revenait. C’est sur cet usage qu’est fondée la locution.
On rapporte à l’an 1260 l’origine du nom de
bourreau, qu’on fait dériver de celui du clerc Richard Borel, qui possédait le fief de Bellencombre à la charge de faire pendre les voleurs du canton, et qui prétendait que le roi lui devait des vivres tous les jours de l’année en conséquence de ces fonctions. Mais cette origine ne paraît point admissible, quoiqu’elle soit consignée dans les
Olim (ancien registre du parlement), car le nom de
Borel, pris dans le sens de
bourreau, est antérieur à l’époque assignée. Odon ou Eudes I
er, qui était duc de Bourgogne sous le règne de Louis VII, avait été surnommé
Borel, parce qu’il ne se faisait aucun scrupule d’assassiner les riches voyageurs qui passaient sur ses terres, pour s’emparer de leur argent ; chose assez commune, au reste, dans ces temps barbares, parmi les gentilshommes, ou
gens pille-hommes, comme dit Rabelais, et désignée par l’expression
aller à la proie.
On ne sait pas précisément quelle est l’étymologie du mot
bourreau. Le père Labbe le fait venir par contraction de
bouchereau, petit boucher ; et Ménage de
buccarus,
buccarellus,
burellus, qui a la même signification. Caseneuve le tire du grec
borros, dévoreur de chair humaine ; et il observe que, dans un glossaire,
manger la chair est pris pour
bourreler. Suivant Borel, il est dérivé du latin
burrus, roux, parce que les gens roux sont méchants, ou parce que l’exécuteur de la haute justice en divers lieux était vêtu d’une livrée jaune et rouge.
Ducange veut qu’il ait sa racine dans le mot
bourrée, faisceau de verges, à cause du supplice de la fustigation. Eusèbe Salverte croit qu’il a été formé du bourguignon
buro,
lance. Mais il peut l’avoir été tout aussi bien de
borellus, nom d’une arme prohibée :
Borellus inter arma prohibita numeratur, dit le glossaire de Carpentier. C’était peut-être l’arme affectée à l’exécuteur des hautes œuvres.
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