| | Hadrien Mathoux Directeur adjoint de la rédaction Record de dette : le problème, c'est qu'on ne sait pas compter
La scène se déroule sur CNews, ce jeudi 18 décembre. Marine Le Pen, invitée par la chaîne à expliquer quelles sont ses « solutions pour désendetter le pays », doit répondre à une question posée lors d'une séquence de micro-trottoir par Marc, retraité qui a été chef « d'une entreprise d'électricité ». Voici la suggestion de Marc : « Je voudrais savoir si dans votre programme, vous seriez en même d'envisager de diminuer le nombre de députés et de sénateurs. Comme on cherche des économies, ce serait un bon moyen. »
L'idée est répandue, et ultra-populaire parmi les Français : avant de demander au péquin moyen de se serrer la ceinture, pourquoi ne pas demander aux parlementaires de renoncer à leurs privilèges ? La mesure a le don de flatter le populaire : elle laisse entendre que le système fonctionnerait à merveille sans les excès d'un personnel politique se gavant sur le dos du contribuable. Une belle fable qui ne correspond malheureusement pas à la réalité.
Bien sûr, entre les comités Théodule, les dérapages sur les notes de frais et les confortables retraites des ministres, il y a bien des efforts à mener. Mais leur portée serait uniquement symbolique : réduire d'un tiers le nombre de députés et sénateurs, une mesure qui aurait des effets démocratiques néfastes, permettrait des économies d'environ 150 millions d'euros par an. Le déficit public pour 2025 est estimé à environ 132… milliards. Bref, se priver d'un député et d'un sénateur sur trois, ce serait enlever un grain de sable dans le Sahara.
Le débat public autour des grands équilibres économiques est ruiné par l'absence de maîtrise des ordres de grandeur. Experts et politiques jonglent avec les millions et les milliards, les points de croissance et les postes budgétaires, dans un flou général. Cette méconnaissance généralisée des citoyens autorise toutes les impostures. Qui sait qu'un point de PIB français vaut environ 31 milliards d'euros ? Que 56% des dépenses publiques sont en fait des prestations sociales ? Que les dépenses liées à l'ordre public (police, pompiers) ne représentent même pas 5% des dépenses de retraites ?
Comme le disait Condorcet, « une démocratie où les citoyens ne sont pas instruits est une chimère ». Tant qu'on n'informera pas le plus grand nombre de citoyens sur ces proportions, il sera impossible de mener un débat de qualité sur les moyens de redresser la situation d'un pays qui vit tellement au-dessus de ses moyens que sa dette vient d'atteindre 117,4% du PIB, record absolu en temps de paix. Twitter @hadrienmathoux
|
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire