Quand un corbeau nanti d’un sabre falsifie Trotsky
Le préfet Lallement entend jouer un rôle politique indépendant. On s’en doutait un peu mais la preuve est faite par Trotsky ! Par Trotsky ? Hé bien oui, les vœux de nouvel an du préfet marchant dans la foulée de Chiappe et de Papon, envoyés à toute la maréchaussée parisienne et à tout le monde politique franco-français, sont soi-disant – une citation de Trotsky :
« Je suis profondément convaincu, et les corbeaux auront beau croasser, que nous créerons par nos efforts communs l’ordre nécessaire. Sachez seulement et souvenez-vous bien que, sans cela, la faillite et le naufrage sont inévitables. » (Écrits militaires, 21 avril 1918).
Cette citation est tronquée ! Voici la version véritable, traduite par nos soins depuis l’édition anglaise des « Écrits Militaires » :
« Avec une telle différence radicale entre le régime social de la République des Soviets et celui de la monarchie nobiliaire, je suis profondément convaincu que nous établirons l’ordre dont nous avons besoin, avec nos forces combinées, quels que soient les croassements des sombres corbeaux. Vous devez seulement comprendre et garder fermement à l’esprit qu’hors de cela, la chute et la ruine sont inévitables. »
Et ce qui précède immédiatement dans le paragraphe de Trotsky concerne … la discipline et l’ordre du préfet Lallement ! Qu’on en juge :
« Et sous votre régime, y avait-il une discipline ? » – Oui ! -Pourquoi ?- Au sommet il y avait le tsar, les nobles, et en dessous il y avait le soldat, et vous soumettiez ces soldats à la discipline. Rien d’étonnant à cela ! Le soldat était esclave, il travaillait pour vous, vous servait à ses dépens, tirait sur son père et sa mère au nom de vos intérêts – et vous aviez pu instaurer la discipline et maintenir longtemps sous le joug les masses populaires. Mais nous, nous voulons que le soldat lutte et combatte pour lui-même, que les ouvriers travaillent pour eux-mêmes, et c’est pour cela que nous voulons instaurer la discipline. » (Suit le passage tronqué).
Seul un corbeau nanti d’un sabre pouvait tenter de vider une phrase de Trotsky de tout contenu, et n’y arrivant pas, la tronquer !
Mais quel est donc cet « ordre nécessaire », non pas de Trotsky, mais du corbeau sabré ?
« Le sabre, en lui-même, n’a pas de programme indépendant. Il est l’instrument de « l’ordre ». On fait appel à lui pour conserver ce qui existe. S’élevant politiquement au dessus des classes, le bonapartisme, comme son prédécesseur le césarisme, a toujours été et reste, du point de vue social, le gouvernement de la partie la plus forte et la plus solide des exploiteurs ; par conséquent, le gouvernement actuel ne peut être rien d’autre que le gouvernement du capital financier qui dirige, inspire et achète les sommets de la bureaucratie, de la police, de l’armée et de la presse. » (Bonapartisme et fascisme. Pour une caractérisation de la situation actuelle en Europe. 15 juillet 1934).
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