Mobilisation. « Exigeons la séparation du Medef et de l’État ! »
KAREEN JANSELME
JEUDI, 31 AOÛT, 2017
L'HUMANITÉ
Manifestation devant l’université d’été du Medef. Gilles Rolle/REA
Devant l’université d’été du patronat, plus de 600 militants ont dénoncé les connivences avec le gouvernement menant à la destruction sociale du pays.
Comment faire tomber le mur du Medef ? Face au campus où se réunissent les entrepreneurs de son université d’été, plus de 600 citoyens s’y attellent, ce mercredi. Des boîtes de carton empilées affichent sur un côté les énormes rémunérations de dirigeants du CAC 40, le coût du château à 11 millions d’euros de Pierre Gattaz, la fin du Code du travail, la hausse de la CSG et la baisse du salaire brut… Autant de boîtes symbolisant les briques d’un mur construit par le patronat qui finira dégommé par les coups de poing des militants venus crier : « Séparation du Medef et de l’État ! »
Les réformes que va dévoiler le gouvernement ce jeudi
Car ici, personne n’est dupe. C’est bien l’organisation patronale qui a tenu le stylo rédigeant les ordonnances réformant le Code du travail, que va dévoiler le gouvernement ce jeudi. À l’appel d’Agir ensemble contre le chômage, de l’Apeis, d’Attac, du DAL, du MNCP, de Solidaires, des syndicats CGT, du Front social 78, des centaines de militants ont défilé de la gare de Jouy-en-Josas (Yvelines) au campus de l’école de gestion HEC où se tient chaque année « la grand-messe » des entrepreneurs. Occasionnant le retard de plusieurs bus locaux menant à l’université d’été. « La rentrée commence bien, je trouve, s’exclame Éric Beynel, porte-parole de Solidaires. C’était symboliquement important de manifester devant les donneurs d’ordres de ces ordonnances, les seuls dont les revendications ont été entendues : fusion des instances représentatives (IRP), plafond des indemnités prud’homales, fin du compte pénibilité devenu compte prévention. On aurait préféré que la pénibilité disparaisse des entreprises et non du Code du travail. »
Valérie, fonctionnaire de l’éducation nationale, est venue dénoncer les accords d’entreprise devenant supérieurs aux accords de branche, « qui vont favoriser le chantage à l’emploi et l’arbitraire dans chaque société ». Christophe Delaine travaille chez Renault depuis 1989. Au technocentre de Guyancourt, les médecins du travail ont alerté sur 316 cas de burn-out l’an dernier. « En novembre 2016, un ingénieur est décédé à la suite d’un entretien préalable à un licenciement. Le CHSCT a pu diligenter une enquête. Face à l’employeur, c’est un contre-pouvoir qu’on veut faire disparaître en regroupant toutes les IRP », dénonce le technicien.
Ce premier rassemblement annonce une belle manifestation le 12 septembre, affirment les participants. « Nous commençons doucement à mettre la pression sur le gouvernement, ami du Medef, reconnaît Laurent Théron. Mais je crois que la mobilisation va se durcir côté manifestants, suite aux répressions hors du commun subies sous état d’urgence et les assignations à résidence, toutes dénoncées par le rapport d’Amnesty International. » Ce secrétaire médical sait de quoi il parle : il a perdu l’usage d’un œil à une manifestation contre la loi El Khomri à la suite de l’explosion d’une grenade de CRS. À quelques mètres de lui, Loïc Canitrot a lui aussi été victime de la loi travail. Frappé devant le Medef par son directeur de la sécurité, cet intermittent du spectacle se retrouvera sur les bancs des accusés le 11 septembre au tribunal. Et appelle les militants à le soutenir : un second tour de chauffe avant le 12 septembre ?
Réforme du code du travail : une majorité de salariés craint pour ses droits
Les salariés français craignent de voir leurs droits bafoués par la réforme du Code du travail prévue par le gouvernement. C’est ce que montrent les résultats d’un sondage OpinionWay publié hier pour les éditions Tissot. 68 % des salariés interrogés pensent que les patrons profiteraient d’une plus grande place accordée aux accords d’entreprise pour réduire leurs droits. Alors que deux salariés sur trois considèrent le Code du travail comme inadapté au monde du travail d’aujourd’hui, il est cependant considéré comme l’élément le plus protecteur (29 % des interrogés) devant les accords de branche (20 %) et les représentants du personnel (15 %). Les accords d’entreprise n’arrivent qu’en quatrième position (14 %). Un résultat qui montre que les salariés sont attachés à la hiérarchie des normes que le gouvernement prévoit de bouleverser. Par ailleurs, 64 % des sondés contestent l’idée que les entreprises embaucheraient davantage si elles pouvaient licencier plus facilement. Une crainte surtout portée par les plus modestes (68 % des salariés appartenant aux catégories socioprofessionnelles les moins favorisées). Enfin, 64 % des interrogés estiment injustifié de plafonner les indemnités prud’homales.
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