Quelle belle soirée autour de l’Humanité. La réussite, lundi soir, de la soirée organisée par l’Humanité est un beau pied de nez au royaume marocain, où des oreilles ont dû siffler. Plus de 300 participants ont pu prendre connaissance d’une multitude d’informations et d’expériences vécues au Maroc par des militants des droits humains et des avocats.
Devant une assistance scandalisée, le député Jean Paul Lecoq, membre de la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée Nationale, a révélé comment les autorités et la police marocaine l’ont maltraité alors qu’il venait défendre le droit international et celui des habitants du Sahara Occidental à disposer de leur terre et de leur front de mer.
Cette soirée de mobilisation, conclue par un dynamique discours du directeur de l’Humanité, Fabien Gay, a eu une multitude de retentissement parmi nos confrères, notamment à France Inter, et jusqu’au Maroc.
Forts de ce succès, nous nous sommes retrouvés mardi à 13h30 sonnantes devant les nouveaux locaux du Palais de justice de Paris, à seulement quatre stations de métro du siège de l’Humanité.
Après, une petite demi-heure d’échanges avec notre avocat Joseph Breham, nous nous sommes retrouvés avec Fabien Gay, directeur de l’Humanité, Rosa Moussaoui, grand reporter à l’Humanité, Anthony Daguet, secrétaire général de l’Humanité, face à la 17e chambre correctionnelle du tribunal, aussi connue sous le nom de « chambre de la Presse ».
Et cela commençait bien !
Selon la règle, la Présidente du tribunal a donné les décisions des jugements des comparutions précédentes.
Soudain, surgit le nom de Ian Brossat. Décidément, on se croirait en famille ! Et la présidente annonce une bonne nouvelle, avec le verdict de la plainte déposée par Ian contre un ancien responsable du parti d’extrême droite auteur de propos homophobes, proférés à son encontre sur les réseaux sociaux.
La sentence est sans appel. L’homophobie n’est pas une opinion, c’est un délit. L’insulteur de Ian Brossat est donc condamné.
Puis, vient notre tour. Commence alors l’appel des prévenus que nous sommes avec d’autres médias, excusez du peu, Le Monde, France TV monde, Mediapart, Amnesty International et aussi plusieurs antennes de Radio France, la radio de service public, tous poursuivis par le Royaume du Maroc.
Rien que ça !
Autant de plaintes contre autant de journaux et médias révèlent l'acharnement du pouvoir marocain à faire taire les journalistes même hors de ses propres frontières. Ainsi, des plaintes similaires ont été déposées en Italie et en Espagne.
Cet agacement du Royaume et de ses services secrets fait suite aux révélations dans la presse du monde entier de l’utilisation par ce pays d’un logiciel de surveillance, baptisé Pegasus, acheté auprès des services du pouvoir israélien, pour espionner journalistes, avocats, militants des droits humains, élus, responsables politiques… Tel le maire d’Ivry-sur-Seine, notre ami Philippe Bouyssou, ou encore des membres du gouvernement français, jusqu’au président de la République.
Autrement dit, l’Humanité, comme d’autres médias n’a fait qu’informer de l’utilisation par le Maroc de ce logiciel de surveillance Pegasus. Et, au-delà de ses démentis de forme, on attend toujours du pouvoir marocain qu’il apporte la preuve du contraire !
Manifestement il ne peut pas prouver son innocence. Aucun média n’à proférer, ni propos insultants ou diffamatoires contre ce pays et encore moins contre sa population, première victime des privations d’information dans ce Royaume où les geôles se referment violemment sur de nombreux journalistes locaux.
Il nous est aussi reproché de les défendre car évidemment, au Royaume, la liberté de la presse est à géométrie variable. Mais revenons au récit de cette journée... La présidente du tribunal commence par donner la parole au procureur représentant le Ministère public. Dès ce début d’audience le procureur de la République soulève la question majeure, celle que j’ai déjà mentionnée ici la semaine dernière : un État peut-il traduire devant les tribunaux un particulier comme le formule la citation à comparaître ? On peut aisément imaginer que, si les trois avocats du pouvoir marocain étaient sûrs de leurs faits, la plainte aurait été déposée au nom d’une administration ou d’un responsable de la sécurité. Or ici, il s’agit bien plus d’une opération de propagande politique à destination des populations marocaines visant à victimiser ce pouvoir qui serait blanc comme neige. C’est pour tenter de faire croire à son innocence qu’il multiplie les plaintes tous azimuts contre la presse. Or comme l’a répété à plusieurs reprises le représentant du Ministère public, la jurisprudence répond clairement : non, un État ne peut pas poursuivre un particulier. Il a donc « soulevé l’irrecevabilité dans l’ensemble de ses affaires ». Nos avocats ont également plaidé en ce sens. L’audience de mardi dernier n’a donc pas permis de trancher cette question. Le tribunal devra le faire lors d’une nouvelle audience fixée pour le 6 décembre prochain. Que la question d’irrecevabilité soit ainsi posée, démontre la superficialité de la plainte de l’État du Maroc, qui en vérité ne poursuit qu’un objectif : intimider les journalistes et tenter de bâillonner la presse.
La liberté d’informer nous commande de ne pas céder !
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