L'histoire de Tim Berners-Lee ressemble à un conte moderne : celui d'un ingénieur qui aurait offert le Web au monde, sans contrepartie. Un storytelling qui omet l'essentiel. Au-delà de l'image de l'inventeur désintéressé, il est devenu un architecte politique et idéologique du Web, acteur central des sphères de gouvernance mondiale qui façonnent internet, la mondialisation et au-delà. Né en 1955 à Londres, Tim Berners-Lee (TBL) grandit dans un environnement scientifique. Sa mère, Mary Lee Woods, est programmeuse, son père, Conway Berners-Lee, informaticien, travaille sur les premiers ordinateurs britanniques et coécrit le manuel du Ferranti Mark I, 1er ordinateur commercial du Royaume-Uni. Après des études de physique à l'université d'Oxford, il commence sa carrière dans les télécommunications, puis dans l'industrie de l'impression. En 1984, alors consultant, il est missionné par le CERN, le centre européen de recherche en physique des particules près de Genève, pour concevoir une base de données destinée à améliorer la circulation de l'information entre chercheurs. En 1989, TBL propose une solution dans une note interne intitulée « Gestion de l'information : une proposition ». Il y décrit un système permettant de relier des documents via un réseau afin que chaque chercheur puisse accéder aux informations produites par d'autres, indépendamment du lieu ou du type d'ordinateur. Le principe repose sur l'attribution d'une adresse à chaque document, sur des liens cliquables reliant les contenus entre eux, et sur un protocole commun permettant aux machines de communiquer. Ces principes constituent les bases du Web. Le langage HTML structure les pages, les URL leurs donne une adresse et le protocole HTTP organise l'échange des données. Le World Wide Web désigne l'ensemble de ces pages interconnectées et accessibles via Internet. Ce qu'on voit aujourd'hui dans la barre d'adresse d'un navigateur repose toujours sur ce système. Son supérieur hiérarchique annote le document d'une formule restée célèbre, « vague mais prometteur ». Le projet est autorisé à titre expérimental. TBL est rapidement rejoint par l'ingénieur belge Robert Cailliau, qui joue un rôle central dans la structuration et la promotion du projet. Ils cosignent en 1990 le document « WorldWideWeb, proposition pour un projet hypertexte », considér… Raphaël Lepilleur |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire