Un article du Monde en date du 15/12/2012
Le
Gouvernement envisage une décentralisation à la carte
.
Les arbitrages sont en cours pour présenter, début
2013, Un projet de loi modifiant les compétences des collectivités locales
Dans ses habits neufs de
président de la République, François Hollande annonçait, dès le 15 mai, l’acte
III de la décentralisation ,promettant «des libertés nouvelles pour le développement de nos territoires». Un projet de loi qui devait être à l’ordre du jour du Parlement
pour l’automne. Sept mois plus tard, l’hiver a notablement refroidi la sémantique
gouvernementale.
Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’Etat, de la décentralisation
et de la fonction publique, modère: «L’objectif est de réorganiser, au mieux, l’action publique déléguée
sur les territoires.» En période de crise, la priorité est à la rationalisation des
services. «La dépense publique doit générer de la valeur», glisse la ministre, donnant le ton du projet de loi, élaboré sous
le signe de la rigueur.
Le cadre du projet de loi a été fixé par le discours de François Hollande, le 5octobre, lors des états généraux de la démocratie
territoriale,à la Sorbonne,à Paris.Le président
décline alors ses priorités: la désignation d’un «chef de file » dans chaque domaine délégué aux collectivités territoriales; la relance du dialogue entre l’Etat
et les collectivités; la «restauration des équilibres financiers» de la France pour
laquelle le chef de l’Etat demande «une contribution de tous». La feuille de route élyséenne annoncée, le gouvernement
poursuit, depuis lors, concertations et arbitrages, peaufinant par touches successives
le texte dont une version aboutie devrait être soumise au Conseil d’Etat au
cours de la seconde quinzaine de janvier 2013. Pour la reprise du dialogue entre
Etat et collectivités territoriales, le gouvernement prévoit la création d’un haut conseil des territoires, présidé par le premier
ministre, et composé d’élus locaux et nationaux susceptibles de débattre et d’évaluer
tout projet de loi relatif à l’organisation des collectivités locales.
Le détail de sa composition n’est pas encore défini.
«Emiettement du pouvoir»
A l’échelon local, une «conférence territoriale de l’action publique » sera chargée d’établir une stratégie.C’est ici que la région souhaite
asseoir sa responsabilité de chef de file. Un problème demeure
: «Comment les régions
vont elles réussir à s’imposer à côté de villes comme
Lille, Lyon, Marseille»,s’interroge-t-on au sein de l’Association des régions de France (ARF). «François Hollande n’a voulu fâcher personne», reconnaît-on du côté des métropoles. La région devra, avec les
représentants des collectivités du territoire,adopter et mettre en œuvre un schéma
régional de développement économique et de l’innovation. Toute fois, elle n’est
pas assurée aujourd’hui de disposer d’un outil prescriptif assurant une mise en
œuvre efficace de sa politique.
«C’est tout le paradoxe du système territorial
français, l’émiettement
du pouvoir est tel qu’il est impossible d’imposer
une décision», s’agace Alain Rousset,député socialiste
de Gironde et président de l’ARF.
La conférence territoriale de l’action publique sera aussi le lieu
où se décideront les responsabilités (tourisme, transports,etc.) de chaque
collectivité en fonction de ses compétences. Les territoires
pourront
devenir des lieux «d’expérimentation » des
politiques publiques.
A titre d’exemple, un département pourra être chargé des lycées,
aujourd’hui confiés aux régions. Au risque d’accroître les inégalités,s’inquiètent
des élus. La ministre rassure : «L’ Etat reste
garant de l’égalité des droits des citoyens, même
si les systèmes sont différents.» «Vouloir appliquer les mêmes règles
dans la Corrèze et dans le Rhône, c’est aller droit dans le mur », tranche Michel Destot, député et maire PS de Grenoble, président
de l’Association des maires des grandes villes de France.
« Il ne peut plus y avoir de loi universelle
pour gérer les territoires», souligne
ce défenseur de l’adaptabilité des normes en fonction des territoires.
Aux bons élèves de l’intercommunalité, comme la
métropole lyonnaise et le département du Rhône, le gouvernement accorderait la création
d’une nouvelle entité
territoriale.
En revanche, aux «cancres» de la
région Provence-Alpes-Côte d’Azur, où la création d’une métropole marseillaise
est compliquée par les rivalités locales, le rapprochement des communautés de communes
et de l’agglomération est envisagé par décret.
Le
texte dessine donc les contours d’une décentralisation à la carte.Avec un objectif
:rationaliser les compétences des services publics et maintenir l’acceptabilité des prélèvements
locaux. «Il y a des économies à faire au niveau des
intercommunalités», assure la ministre de la décentralisation
en rappelant que les communes ont un an pour s’organiser avant une baisse de
750 millions des dotations de l’Etat.
Le
projet de loi pourrait être soumis aux votes des parlementaires au printemps
2013.
Eric Nunès
Le
rôle actuel des collectivités territoriales
Les
régions
Le texte en préparation les désigne
chefs de file dans le domaine économique. Elles sont aujourd’hui chargées du développement
social, culturel et scientifique, de l’apprentissage et de la formation professionnelle.
Elles sont aussi responsables de la gestion des transports
de voyageurs, des lycées, de la protection du patrimoine…
Les
départements
Ils demeurent un guichet social. Leur champ
d’action concerne l’enfance, les personnes âgées, le handicap et la
distribution des prestations légales d’aide sociale. Ils assurent la construction
et l’entretien des collèges, l’équipement
rural, l’aménagement foncier, la gestion de l’eau.
Les
communautés de communes
Elles ont la responsabilité du développement
économique de leur territoire et de l’aménagement de l’espace. Elles peuvent également assumer les charges liées
à l’environnement, à l’assainissement…
Le texte en préparation prévoit de leur accorder l’élaboration
du plan local d’urbanisme.
Les communes
Elles s’occupent des écoles, de la construction et l’entretien
des bibliothèques, musées, écoles de musique, salles de spectacle et de sports
et de l’entretien de la voirie communale. Elles sont aussi responsables de l’état
civil et de l’organisation des
élections.
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