La Macronie est plus que jamais l'indignité nationale ! ( BV)
Loi immigration : cette concession fait glisser la Macronie vers la préférence nationale
Cette brèche, ouverte par Aurore Bergé et Yaël Braun-Pivet, fait bondir la gauche. Le Rassemblement national ironise.
POLITIQUE - C’est l’histoire d’un principe républicain qui, malgré quelques entailles, perdurait : l’universalité des allocations familiales. Une vision des prestations sociales qui permet, entre autres, à une famille étrangère vivant en situation régulière et cotisant comme n’importe quelle famille française de pouvoir percevoir des aides. Or, en cherchant désespérément un accord avec la droite sur le projet de loi immigration en vue de la CMP prévue lundi, la Macronie semble disposer à asséner un sérieux coup à ce concept en vigueur depuis 1946.
C’est en tout cas ce qui ressort de plusieurs déclarations faites ce dimanche 17 décembre par Aurore Bergé, ministre des Solidarités, et Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale. Au cœur du débat, une mesure visant à instaurer un délai de plusieurs années avant qu’une famille étrangère en situation régulière puisse faire une demande d’allocation familiale. « Je ne dis pas non », a déclaré Aurore Bergé sur le plateau de Dimanche en politique sur France 3. « Nous avons besoin de faire évoluer le texte si nous voulons un accord », a-t-elle justifié.
Pierre angulaire du discours lepéniste
Au même moment, sur BFMTV, la présidente de l’Assemblée nationale disait quasiment la même chose. « Si nous devions aller dans cette direction, ça me coûterait probablement. Mais moi, je suis partisane du compromis », a expliqué Yaël Braun-Pivet.
Or, dans notre histoire politique, cette perception de la solidarité porte un nom : la préférence nationale. Cette idée, qui a fini par gagner Les Républicains, est la pierre angulaire du discours historique du Front national, devenu Rassemblement national. Ce que note d’ailleurs le député RN du Var Philippe Schreck. « Yaël Braun-Pivet sur BFM très gênée de reconnaître que l’arrangement en cours sur la loi immigration rejoint le programme de Marine Le Pen sur la préférence nationale. Ces gens n’ont pas d’idées, pas de colonnes vertébrales », a-t-il taclé sur le réseau social X.
Difficile de lui donner tort. En 2017, par exemple, alors élu FN, le sénateur Stéphane Ravier proposait au Sénat une disposition similaire. Ce qui avait été balayé par la Chambre haute, au nom justement du principe d’universalité et d’un problème d’égalité, car ces familles étrangères « participent au financement de la politique familiale au travers des cotisations versées par leurs employeurs ».
C’est d’ailleurs pour cette raison que la préférence nationale pour les allocations familiales – réclamée par le RN au nom du principe « les nôtres avant les autres » – est souvent jugée anticonstitutionnelle. Car, comme le souligne le site spécialisé Les Surligneurs, les Sages ont déjà tranché sur cette question en 1990, estimant que cette « exclusion des étrangers résidant régulièrement en France du bénéfice de l’allocation (…) méconnaît le principe constitutionnel d’égalité ».
« Quelle honte »
Même si le dispositif envisagé aujourd’hui n’est pas une exclusion de l’allocation, mais une sorte de sas d’attente, cette perception de l’accès au droit entaille considérablement le progressisme qu’Emmanuel Macron portait en bandoulière lors de son accession au pouvoir. De quoi expliquer la réaction éruptive de Pierre Henry, président de France Fraternités, qui avait rejoint En Marche en 2017. « Quelle honte ! Élisabeth Borne, la préférence nationale c’est dans votre programme ? La duplicité ça va 5 minutes ! », a fustigé sur le réseau social X cet expert des migrations.
Sans surprise, cette éventualité fait aussi bondir la gauche. « Aller priver d’allocations familiales des étrangers en situation régulière qui paient des impôts et cotisent : le gouvernement est prêt à tout pour rallier la droite et l’extrême droite. Leurs lignes rouges étaient écrites à l’encre sympathique. À peine écrites, déjà effacées », a regretté sur le réseau social X le sénateur communiste Ian Brossat, tandis que le député LFI Paul Vannier accusait Yaël Braun-Pivet de se rallier « au projet lepéniste de préférence nationale ».
Un constat partagé par Boris Vallaud, président du groupe PS à l’Assemblée nationale. Député écolo ayant commencé sa carrière chez les marcheurs, Aurélien Taché voit dans cette mesure « le racisme à l’état brut ». Selon lui, « aucun gouvernement, même les plus à droite, n’avait jusqu’ici osé s’attaquer à l’universalité des allocations familiales ». Pas sûr que ce glissement soit de nature à rassurer l’aile gauche de la Macronie, déjà inquiète d’une droitisation du texte.

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