Existe-t-il un sujet qui mette tout le monde d’accord ? Ne me demandez pas comment ni pourquoi, mais l’autre jour, à la cantine, nous étions plusieurs collègues à buter sur cette question ô combien existentielle : le consensus absolu existe-t-il en ce bas monde ? Vous l’aurez sans doute remarqué, les journalistes ont un penchant naturel pour le dissensus (à L’Obs, c’est même le nom d’une rubrique). Nous chérissons la controverse, nous sommes doués pour flairer les tensions ou les conflits qui traversent la société, comme le veut la formule consacrée… Pour une fois, nous prenions nos natures à rebrousse-poil. Notre postulat de départ, face à une assiette de gnocchis à la tomate et une salade de fruits, était celui-ci : il existe forcément des choses qui nous unissent, qui ne font pas débat. Confiants, nous avons cherché. Les chats ? Les vacances ? Etonnament, ils et elles ne font pas l’unanimité. Le début d’une relation amoureuse ? Pas forcément la panacée, tranche un habitué. Les jeux ? Au grand regret de notre concepteur de mots croisés, certains les boudent. Le fait que c’était mieux avant ? D’autres prétendent le contraire. La guerre ? La paix ? Le nazisme ? Hélas, non. Serviable, ChatGPT nous souffla trois propositions, non sans reconnaître qu’il existe pour chacune de rares exceptions : « l’eau est nécessaire à la vie », « respirer de l’oxygène est essentiel à la vie humaine » et « causer des souffrances inutiles est moralement répréhensible ». Pour cette dernière, le logiciel suggère que le concept de souffrances justifiées varie fortement selon la culture, l’éthique et la philosophie d’un individu… Juste avant le café, un consensus se dégagea de la tablée : nous étions unanimement d’accord sur rien. « Et dire que l’on parvient à ne pas tous s’entretuer », observa une collègue lucide. C’est beau, n’est-ce pas ? | 
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