Ce week-end, j’ai fait une overdose de captures d’écran. Or, on le sait, il y en a de deux catégories : « J’en fais pour le meilleur et pour le pire », écrit une journaliste américaine. Le premier groupe réunit les gentilles captures d’écran faites pour soi-même. Ce sont des extraits d’articles, des couvertures de livres vues en passant sur Instagram, des copies de messages contenant, par exemple, des compliments professionnels (dossier dans lequel on peut aller se noyer quand ça ne va pas) ou des horaires de films sur Allociné. Et puis, la deuxième catégorie dite méchante. Parmi elle, deux sous-groupes. Les screenshots moqueurs : tweet à la con, photo à la con, phrase à la con d’une conversation qu’on transmet à des potes pour rire ensemble de son auteur. Et ceux dits de traîtrise. Quand par exemple, pour éviter de résumer la situation d’une amie A à une amie B, on lui envoie un screenshot de ladite conversation avec l’amie A. Voilà : bonne base de discussion immédiate, ça. On s’épargne un long résumé avec des dialogues indirects. On plonge dans la violation d’intimité. Ce week-end, j’ai donc fait suffisamment de screenshots de deuxième catégorie pour me sentir coupable. Lundi, j’ai démarré la semaine en cherchant sur internet, où tout existe, des règles morales. Existe-t-il une éthique des screenshots ? J’ai découvert que le forum Reddit AmItheAsshole consacre une dizaine de posts à cette question – sans conclure. Qu’un article de Slate réclame que toutes les apps installent comme Snapchat des notifications de capture… Hmm, faudra prévenir. Qu’un formidable article de The Atlantic décrit le chaos dans lequel nous a plongés cette fonction installée en 2008 sur l’iPhone… Les frontières de la conversation privée s’amenuisent. Les scandales se multiplient (divorce, fuite de textos insultants dans un cadre professionnel). Une artiste américaine a récemment essayé de vendre les captures d’écran d’une conversation érotique qu’elle a eue avec l’acteur Armie Hammer… J’ai aussi relu l’article d’Henri Rouiller qui a montré qu’il y a aussi du bon derrière ces captures : de l’entraide féminine pour réussir une conversation amoureuse. J’ai eu du mal à avaler ma salive quand j’ai estimé, à partir de ma propre production, le nombre de screenshots m’impliquant se baladant dans le cyberespace. J’ai screenshoté un SMS envoyé à moi-même qui disait : « N’oublie pas d’arrêter de faire ça. » |
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