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samedi 25 août 2018

Parcoursup : le gouvernement au pied du mur


23 août 2018

Parcoursup : le gouvernement au pied du mur

A l'approche de la rentrée universitaire, la lenteur et l'engorgement de la nouvelle plate-forme inquiètent

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LES DATES
27 août
Date limite des inscriptions pour  les formations sélectives -(prépas, BTS, DUT), dont la -rentrée est début septembre
5 septembre
La procédure principale, qui a débuté le 22  mai, s'achève
21 septembre
Fin de la procédure complémentaire, qui permet aux candidats qui le souhaitent de formuler de  nouveau 10 vœux d'orientation en direction des formations ayant des places disponibles.
Ils peuvent, en parallèle, saisir la  commission d'accès à l'enseignement supérieur, présidée par  le recteur, chargée de leur  faire des propositions.
Le mois de trêve estivale n'aura pas permis un déblocage d'ampleur de Parcoursup. Et pas non plus apporté de bonne nouvelle au gouvernement. Rien n'a bougé, ou presque. Alors que la rentrée universitaire approche à grands pas, l'attente se prolonge pour des dizaines de milliers de jeunes, pas encore fixés sur l'établissement qu'ils rejoindront pour leurs études, trois mois après l'ouverture de la nouvelle procédure d'admission dans l'enseignement supérieur.
Système trop lent, grippé, bloqué… Les questions qui fâchent ont été posées à la ministre de l'enseignement supérieur, mercredi 22  août, sur France Inter, où elle faisait sa rentrée. Sans relâche, elle a écarté les critiques récurrentes portées sur la plate-forme. " Si Parcoursup fonctionne plus lentement, c'est justement parce qu'on accompagne et qu'on aide les jeunes sans affectation, contrairement à l'an dernier ", a-t-elle défendu. Tout en affirmant n'avoir " pas d'inquiétude particulière " : plus de 591 000 jeunes -savent où ils seront à la rentrée, a-t-elle répété.
La ministre devait enchaîner avec le conseil des ministres, puis une réunion avec les recteurs… Le gouvernement est désormais au pied du mur, il faut que la " machine " passe à la vitesse supérieure. L'enjeu est de taille pour l'ancienne présidente d'université qui s'est fait connaître en dénonçant, à l'été 2017, l'immense " gâchis " d'APB (admission post-bac), le précédent système, et en menant, tambour battant en moins d'un an, la réforme de loi orientation et réussite des étudiants avec la mise en place de Parcoursup.
Engorgement prolongéS'il est encore trop tôt pour tirer un véritable bilan des affectations dans l'enseignement supérieur, le nouveau système apparaît à ce stade moins performant en matière de réponses aux candidats, avec un engorgement qui se prolonge. D'après les chiffres officiels, en date du mercredi 22  août,72  % des 812 000 lycéens et étudiants en réorientation inscrits sur la plate-forme ont validé une formation, soit une proportion qui n'a quasiment pas évolué depuis un mois. En revanche, 62 500 candidats demeurent sans aucune proposition. Parmi eux, 15 400 sont considérés par le ministère comme étant toujours en quête d'une inscription, les autres étant comptabilisés comme des " inactifs ". Le17  août 2017, ils étaient 6 010 " sans-fac " sur APB. Le choix du ministère de ne plus comptabiliser dans la colonne des jeunes en attente ces fameux " inactifs " – soit 47 100 bacheliers et étudiants en réorientation au 21  août – ne fait pas l'unanimité. Il s'agit de candidats qui n'ont " pas manifesté leur souhait d'être accompagnés ", auprès du rectorat ou en procédure complémentaire, a détaillé Jérôme Teillard, chargé de mission Parcoursup au ministère, lundi 20  août sur -Europe 1. " Pour l'essentiel ", des jeunes qui auraient " d'autres projets ", a-t-il estimé, citant pêle-mêle la volonté de rejoindre une formation hors Parcoursup, un emploi, un service civique, des formations à l'étranger…
" C'est de la communication gouvernementale pour faire redescendre la polémique Parcoursup de l'été ", dénonce Lilâ Le Bas, présidente de l'UNEF, syndicat étudiant opposé à la réforme. Celle-ci estime que rien ne permet de dire que ces candidats ne sont pas toujours dans l'attente, au vu des témoignages qu'elle reçoit. Cas représentatif ou exception ? C'est en tout cas la situation de Marine,une jeune Francilienne, qui n'a émis que deux vœux sur la plate-forme, en licence de sciences de l'éducation et s'y accroche de toutes ses forces. " Je ne suis pas inactive, dit-elle. Je suis 12e sur liste d'attente à Nanterre, 158e à Paris-Descartes, mais j'attends ! J'ai regardé en procédure complémentaire, il n'y a pas de place dans cette licence, ou bien à deux heures de chez moi… "
La jeune titulaire d'un bac ES, qu'elle a réussi avec mention assez bien, est en colère : " Parcoursup a promis que tout le monde aurait une place dans ce qu'il souhaitait, j'ai demandé une licence non sélective dans la fac de mon secteur - Nanterre - et je me retrouve sans rien, à deux semaines de la rentrée. " Elle attend le 5  septembre, date à laquelle la procédure principale va s'achever, pour n'avoir plus aucun espoir avant de s'orienter vers une autre licence, en saisissant le recteur.
Un phénomène nouveau est venu amplifier le sentiment d'attente prolongée, et gripper d'autant plus le système : près de 96 000 candidats ont obtenu et validé une proposition, mais ils maintiennent toujours des vœux en attente au 22  août – ce qui n'était pas possible en  2017 après le 19  juillet. Difficile de ne pas imaginer qu'un grand nombre espère toujours une réponse d'une formation leur convenant mieux. Ils ne sont en tout cas, eux non plus, pas encore fixés pour la rentrée.
" Souplesse "Des places vont se libérer dès " la semaine prochaine ", a tenu à rassurer M.  Teillard. Les formations sélectives (BTS, classes préparatoires,…), dont la rentrée est prévue début septembre, ont été invitées par le ministère, dans un mail envoyé mi-août, à fixer leur date limite d'inscription au 27  août. Une recommandation qui s'ajoute aux divers ajustements que le ministère a multipliés depuis les résultats du bac, pour tenter d'accélérer les choses (affichage des taux de remplissage des formations, surbooking de 10  % dans les licences d'Ile-de-France…). Jusqu'ici en vain.
Cette date sera appliquée " avec une certaine souplesse ", souligne néanmoins Philippe Vincent, secrétaire général du syndicat national des personnels de direction de l'éducation nationale, qui suit de près le remplissage des classes prépa et des BTS dans les lycées : " Il s'agit surtout d'envoyer un message aux candidats pour essayer de réactiver plus vite le processus qui est bloqué. " Si plusieurs responsables de formation alertent sur une rentrée qui s'annonce chaotique, avec le fort retard des inscriptions constaté partout, le syndicaliste se veut rassurant.
" Plus vite on saura, mieux on se portera, mais il n'y a pas péril en la demeure ", confie-t-il, tout en appelant à des améliorations substantielles l'année prochaine, pour ne pas faire revivre cette extrême lenteur aux jeunes comme aux formations. La ministre de l'enseignement supérieur, Frédérique Vidal, n'a pas exclu des " ajustements " pour les années à venir, rappelant avoir " toujours dit qu'on ferait le bilan du fonctionnement fin septembre ".
S'il se montre serein pour la rentrée, Gilles Roussel, président de la conférence des présidents d'université, pointe néanmoins une autre " véritable inconnue ", qui ne sera levée que courant septembre, au gré des commissions rectorales pour accompagner les " sans-places " " Dans quelle proportion vont-ils être envoyés à l'université ? ", interroge le président de l'université de Marne-La Vallée (Seine-et-Marne), qui souligne que les facs ont déjà largement augmenté leurs capacités d'accueil pour cette rentrée. Et que les principales filières en tension de l'an dernier, le sont toujours, comme les sciences et techniques des activités physiques et sportives ou la psychologie.
Camille Stromboni
© Le Monde

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