La polarisation politique en Catalogne, entre des indépendantistes prêts à défier la loi pour mettre en marche une République catalane et le bloc " constitutionnaliste " – Parti populaire (PP, droite, au pouvoir), Ciudadanos (libéraux) et Parti socialiste ouvrier espagnol (PSŒ) – qui a soutenu la mise sous tutelle de la Catalogne, a mis Podemos dans une situation difficile. Le parti de la gauche radicale est en chute libre dans les sondages et au bord d'une grave crise interne.
" Es-tu pour que Podem se présente aux élections du 21 décembre en Catalogne, en coalition avec Catalunya en Comu et les forces politiques qui ne soutiennent ni la déclaration d'indépendance ni l'application de l'article 155 ? " Les sympathisants et militants de Podem, la marque du parti de gauche radicale Podemos en Catalogne, ont commencé à voter, mercredi 1er novembre, pour décider s'ils intégreront le mouvement Catalogne en commun de la maire de Barcelone, l'ancienne activiste du droit au logement Ada Colau, qui était soutenu par Podemos.
Ce vote a été imposé par le chef de file de Podemos, Pablo Iglesias, qui souhaite ainsi reproduire localement l'alliance qui le lie aux " communs " à l'échelle nationale, et surtout forcer le départ du leader régional de sa formation, Albano Dante Fachin, qui s'est rapproché ces dernières semaines des indépendantistes.
" Déphasé "M. Fachin dit qu'il a voté non lors du vote de la déclaration d'indépendance présentée au Parlement régional le 27 octobre, afin de protéger de possibles poursuites pénales les députés indépendantistes. Mais il a envisagé ces derniers jours de participer à une liste commune avec les séparatistes lors des élections du 21 décembre imposées par Madrid, afin de dénoncer la
" répression " et l'application de l'article 155 de la Constitution espagnole, qui permet la mise sous tutelle des régions rebelles.
" Ce sont des positions légitimes mais qui sont sûrement plus proches d'autres options politiques que de la nôtre ", a déclaré Pablo Iglesias, qui a dû clarifier de nouveau son
" pari pour l'Espagne comme pays plurinational ". " Nous ne sommes pas des indépendantistes ", a-t-il tranché, tentant de mettre fin à la confusion générée par ses prises de position ambiguë.
Sa défense d'un référendum d'indépendance mais légal, en accord avec Madrid, lui vaut d'être souvent marginalisé dans le débat actuel. La formation a aussi soutenu la participation au référendum illégal sur l'indépendance du 1er octobre, tout en le présentant comme une simple
" mobilisation politique ". Elle a aussi critiqué la voie unilatérale des séparatistes tout en s'opposant fermement à l'application de l'article 155.
" Podemos a manqué de réflexes, juge le politologue Pablo Simon.
Défendre l'idée d'un référendum était courageux, mais à présent qu'il a abouti à une voie unilatérale, c'est déphasé. Ils ne se sont pas adaptés à la contamination du référendum par le bloc indépendantiste. Leur crédibilité en a souffert. "
Le 29 octobre, c'est un communiqué des Anticapitalistes, un des mouvements fondateurs de Podemos, reconnaissant la
" nouvelle République catalane " et se félicitant du coup porté au
" régime de 1978 " – la Constitution post-franquiste –, qui a obligé Pablo Iglesias à réagir.
" Ils se sont situés politiquement en dehors de Podemos ",a déclaré le leader de la formation.
Podemos est à l'aise sur des thèmes comme l'axe droite-gauche, les questions sociales et la corruption du PP. Mais pas sur la question territoriale, face à un mouvement indépendantiste qui a repris bon nombre de ses critiques contre le PP de Mariano Rajoy, contre le " régime de la transition ", contre la " fausse démocratie " espagnole et contre la " monarchie héritée de Franco ". D'autant plus que son électorat, en Catalogne, est très divisé. Près de 60 % des électeurs du mouvement d'Ada Colau sont opposés à l'indépendance, et 40 % y sont favorables.
Son ambiguïté locale semble lui promettre des déboires à l'échelle nationale. Selon un sondage publié le 31 octobre dans
El Mundo, la coalition Unidos Podemos perdrait plus d'un électeur sur quatre par rapport à 2016, passant de 21,1 % des voix à 15,3 %.
Sandrine Morel
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