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samedi 28 octobre 2017

Les gardes civils commencent à trouver le temps long

28 octobre 2017

Les gardes civils commencent à trouver le temps long

Après les violences du 1er octobre, les policiers espagnols, logés sur des bateaux dans les ports de Barcelone et de Tarragone, restent discrets

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La police espagnole n'est jamais partie. Mais après les débordements le jour du référendum indépendantiste du 1er  octobre, les renforts déployés par Madrid en Catalogne – un peu plus de 5 000 effectifs en comptant la police nationale et la garde civile – sont depuis beaucoup plus discrets.
Le gouvernement de Mariano Rajoy a décidé de les maintenir sur place pour parer à toute éventualité. Quel sera leur rôle dans le cadre d'une mise sous tutelle de la région ?" Cela dépendra beaucoup de ce qui se passera, explique l'un des membres d'une unité antiémeute. Nous sommes prêts à affronter tous les scénarios. " Même celui de remplacer une partie des 17 000 mossos d'esquadra, la police catalane que Madrid accuse de n'avoir rien fait pour empêcher le vote interdit par la justice.
" Nous avons vécu ce jour comme une trahison, rien de ce qui s'est passé n'aurait eu lieu s'ils avaient fait leur boulot. La confiance a été rompue ", ajoute le policier, qui souhaite garder l'anonymat, comme les autres agents rencontrés. Un premier incident entre les deux forces de l'ordre a eu lieu le 26  octobre lorsque la police a intercepté un camion des mossos qui s'apprêtaient à détruire des documents jugés " confidentiels " dans un incinérateur au nord de Barcelone.
L'opération " Copernic ", la plus grande opération antiémeute de ces dernières années, se prolonge depuis plus d'un mois. La plupart des agents sont arrivés fin septembre et ne savent pas quand ils pourront repartir. " On devrait rester jusqu'en décembre mais on improvise au jour le jour. Personne ne pensait que nous allions rester si longtemps ", raconte l'un des agents déplacés à Barcelone.
" Pire que des prisonniers "De la cinquantaine d'unités antiémeute dont dispose la police espagnole, qui d'habitude assurent la sécurité des matchs de foot ou des grands événements de foule dans toute l'Espagne, les deux tiers sont en Catalogne, " ce qui risque de poser des problèmes sécuritaires dans le reste du pays si la situation perdure ", indique un autre agent.
Pour loger un pareil déploiement, le ministère de l'intérieur a  loué trois ferries à deux compagnies maritimes italiennes, Moby Lines et Grandi Navi Veloci, qui assurent diverses liaisons en Méditerranée. Deux navires sont ancrés dans le port industriel de Barcelone, un autre à Tarragone. D'autres unités des forces de l'ordre ont été installées dans des hôtels ou des casernes militaires de la région.
" Ça fait plus d'un mois que l'on vit ensemble dans des cabines toutes petites, c'est vraiment limite, se plaint l'un des policiers.  Pour se défouler, on fait du jogging dans le port. " Aucun remplacement n'a été prévu. " On nous a fait miroiter une rotation des effectifs, mais il n'y a pas assez d'unités dans le reste de l'Espagne pour nous remplacer. "
C'est à bord du Moby-Dada – qui peut transporter 1 600 passagers – que la situation est la plus pesante. En arrivant en rade de Barcelone, le navire a fait les délices des réseaux sociaux lorsqu'ils ont découvert les gigantesques Titi et Grosminet, les personnages des dessins animés de la Warner Bros, affichés sur son flanc, comme sur tous les autres ferries de la compagnie de navigation italienne. Bientôt, Titi (" Piolin " en espagnol) est devenu la mascotte des indépendantistes qui, depuis, réclament sa " libération " sur Twitter.
L'équipage des trois bateaux est italien. Les relations sont parfois tendues " au point que l'on a failli en venir aux mains plusieurs fois ". Des images de l'intérieur du navire ont été diffusées par les médias. On y voit des vêtements séchant sur les portes des cabines " car il n'y a presque pas de service de blanchisserie, raconte un policier. On nous traite pire que des prisonniers ".
Les syndicats des forces de l'ordre ont relayé leurs plaintes auprès du ministre de l'intérieur, qui ne s'est pas prononcé  sur la question. Un agent décrit la situation comme celle d'une  " chaudière sur le point d'exploser ".
I. P.
© Le Monde

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