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samedi 23 février 2013

La rigueur ? Non, jamais

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La rigueur ? Non, jamais

Photo Reuters
Donc la France gagne un an. Enfin non, pas vraiment. Elle a obtenu de Bruxelles de pouvoir ramener son déficit public à 3 % du PIB non pas en 2013, mais douze mois plus tard.
Mais comme elle frôle la récession, ce sursis ne lui est en réalité pas d’un grand secours : elle va bel et bien devoir amplifier les réductions de dépenses et les hausses d’impôts pour tenir son nouvel engagement.
C’est toute l’ambiguïté de la situation actuelle et du discours qui va avec : la France pratique la rigueur, mais sans le dire. Depuis qu’il est élu, François Hollande se rêve en Monsieur croissance de l’Europe. Il se bat contre “l’austérité sans fin”, se place du côté des pays souffrants, résiste autant qu’il le peut sur la scène européenne au rabot d’Angela Merkel et de David Cameron. Mais les faits sont têtus.
Plus les mois passent, plus son gouvernement doit serrer les vis, tailler dans les dépenses, réduire le train de vie des collectivités locales, s’attaquer à l’Etat providence. Retraites, assurance chômage, politique familiale, tout y passe, avec derrière, la main invisible de Bruxelles, qui veut bien consentir un délai, mais à condition que des “réformes structurelles” soient menées.
C’est la maladie française : la rigueur tait son nom, elle ressemble à une maladie honteuse. Elle n’est pas davantage assumée par l’actuel président de la République que par son prédécesseur, qui avait ouvert son mandat en s’exonérant spectaculairement des disciplines européennes. Le résultat, c’est qu’à chaque fois, les réformes semblent elles aussi honteuses, comme imposées de l’extérieur.
Jean-Marc Ayrault rouvre le dossier du financement des retraites comme l’avait fait Nicolas Sarkozy en 2010, parce qu’eu égard au poids de la dette, il faut donner des gages à Bruxelles. C’est comme s’il fallait jeter régulièrement un os au molosse européen pour le calmer.
Etrange conception de la souveraineté nationale, qui reflète l’incapacité française à voir les réalités en face, à penser le long terme et à construire le rassemblement autour du redressement. C’était pourtant l’objectif du “rêve français” évoqué pendant la campagne par le candidat Hollande : donner une visée au quinquennat pour transcender les vicissitudes conjoncturelles.
Le “rêve français” avait les mêmes vertus que “la politique de civilisation” mise en avant par Nicolas Sarkozy en janvier 2008, lorsque les premières difficultés étaient apparues : trouver un objectif qui fasse ciment national. Mais rien n’est venu donner corps au slogan, rien n’a permis de dégager l’horizon.
Il ne reste qu’un chemin escarpé qui ne dit pas son nom. La rigueur ? Non, jamais !

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