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mardi 7 août 2018

HISTOIRE et MEMOIRE - Hommage à Arsène Tchakarian ancien membre du groupe Manouchian.

HISTOIRE et MEMOIRE
 Hommage à Arsène Tchakarian

7 août 2018

Arsène Tchakarian

Ancien membre du groupe Manouchian

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Avec la mort d'Arsène Tchakarian, le 4 août à Vitry-sur-Seine, disparaît le dernier survivant du groupe Missak Manouchian, dont 22  membres furent exécutés par les nazis le 21  février 1944 au Mont-Valérien. Après le décès d'Henri Karayan, le 2  novembre 2011, à Paris, à l'âge de 90 ans, celui d'Arsène Tchakarian renvoie la mémoire et la relation précise de cet  épisode, à la fois magnifié et  propice à certaines polémiques, à la seule responsabilité des historiens.
Il y a peu, Arsène Tchakarian, alerte nonagénaire, recevait encore au rez-de-chaussée de son pavillon de Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne) donnant sur un petit jardin. Là, au milieu de livres et de documents, il rappelait avec fougue l'action  du groupe Manouchian dans la Résistance.  Jusqu'à la fin de sa  très longue vie, il n'aura cessé d'apporter à ce sujet son  témoignage personnel, intervenant dans les établissements scolaires – où il a tenu des centaines  de réunions depuis le milieu des années 1960 –, les institutions civiles et militaires, les émissions de télévision et de radio et, bien sûr, les commémorations annuelles.
Il a aussi  réuni par écrit  ses souvenirs dans  plusieurs livres : d'abord  Les Francs-Tireurs de l'Affiche rouge (Ed. sociales, 1986), puis  Les Fusillés du Mont-Valérien (Ed. Comité national du souvenir des fusillés du Mont-Valérien, 1991) et, enfin, avec Hélène Kosséian, Les Commandos de l'Affiche rouge (Ed. du Rocher, 2012). De manière significative, ce dernier ouvrage a pour sous-titre La Vérité historique sur la première section de l'Armée secrète. Son dixième chapitre  revient en effet sur la polémique suscitée en  1985 par la sortie  du documentaire Des terroristes à la retraite, de Mosco Boucault.
Arsène Tchakarian  rejette  la thèse  de ce documentaire selon laquelle  le groupe Manouchian aurait été " lâché ", voire " sacrifié " par la direction clandestine du Parti communiste. Il assure être définitivement parvenu à la certitude d'une trahison dans ses rangs, comme le suggérait  la lettre adressée avant son exécution par Missak Manouchian à sa compagne  Mélinée, dans laquelle le chef du groupe dit pardonner à tous, sauf " à celui qui nous a trahis pour racheter sa peau et ceux qui nous ont vendus ".
ApatridePour Arsène Tchakarian, l'auteur de cette trahison  ayant mené aux arrestations de novembre  1943  est Boris Holban, mort en  2004 à l'âge de 96 ans, qui avait créé en mars  1942 et dirigé le groupe parisien des FTP-MOI (Francs-Tireurs et partisans de la main-d'œuvre immigrée).  Cette thèse du " traître ", qui était aussi défendue par Henri Karayan, est cependant loin de faire l'unanimité, de même que l'accusation précisément portée contre Boris Holban.  Des historiens de renom, spécialistes de cette période, comme  Denis Peschanski ou  Claude Pennetier, n'y adhèrent pas. Pour Denis Peschanski, le travail de filature réalisé par la police de Vichy suffit à expliquer  les arrestations.
Arsène Tchakarian est né le 21  décembre 1916 en Turquie, à Sabandja, ville à 80  kilomètres  au sud d'Istanbul, dans la région de Bursa.  A l'exemple de nombreuses familles arméniennes sur le territoire turc, les bouleversements de la première guerre mondiale et les suites du génocide de 1915 conduisent les Tchakarian sur les routes de l'exil, et tout d'abord en Bulgarie.
En  1928, la famille Tchakarian acquiert le " passeport Nansen ".  Ce document d'identité  créé à l'initiative de Fridtjof Nansen, premier haut-commissaire pour les réfugiés de la Société des nations, est destiné aux apatrides, principalement russes et arméniens. Un statut d'apatride qu'Arsène Tchakarian conservera jusqu'en… 1958, date à laquelle il obtiendra la nationalité française.
La France, le jeune Arsène  la  découvre à l'âge de 14 ans à la fin de l'année 1930 en débarquant à Marseille. Après un séjour à Decazeville, dans l'Aveyron, où son père a trouvé du travail dans les mines, il rejoint Paris et devient tailleur.  Passionné par l'actualité  politique, il participe en  1936 aux manifestations du Front populaire et adhère à la CGT, où il rencontre pour la première fois Missak Manouchian, intellectuel, poète et militant communiste en même temps qu'ouvrier.
En  1937, alors que les menaces de conflit  en Europe ne cessent de grossir, Arsène Tchakarian a tout juste 21 ans. Il est appelé au service militaire dans le 182e régiment d'artillerie lourde de Vincennes. Il participe en  1939 et 1940 aux combats des Ardennes et de la Meuse. A l'issue de la défaite de la France, il est démobilisé à Nîmes le 5  août 1940. Dès  novembre  1940, il se lance, à Paris, avec Missak Manouchian dans la distribution de tracts antihitlériens. Les deux jeunes gens, comme d'autres militants ou sympathisants communistes, anticipent ainsi  l'entrée en résistance du parti, qui ne s'effectuera  qu'après la rupture du  pacte germano-soviétique, en juin  1941. Leur activité politique se radicalisera progressivement jusqu'à l'organisation d'actions violentes.
" Nous n'étions pas des héros "En  1943, Manouchian et ses camarades, dont Arsène Tchakarian, font partie des FTP-MOI  de Paris, qui organisent des actions armées contre l'occupant. Le 17  mars, ils se livrent à leur première opération en attaquant  à Levallois-Perret une vingtaine de feldgendarmes, des policiers militaires allemands.
En mai  1943, Manouchian est nommé responsable provisoire de la première section parisienne de l'Armée secrète, dénomination désignant une structure de coordination de différentes composantes de la Résistance.  En juin  1943, après l'attaque d'un autocar de la Kriegsmarine près de l'église d'Auteuil, Arsène Tchakarian est nommé chef de la première section des " triangles commandos ". Une formation qui aurait, selon les communiqués de l'Armée secrète, réalisé près de cent quinze actions réussies entre juin et septembre. " Nous n'étions pas des héros, affirmait Arsène Tchakarian lorsqu'il commentait cette période.  Il ne faut pas croire que nous n'avions pas peur. Nous avons résisté parce que nous en avions la possibilité : pas de famille, pas de travail. Et parce que nous aimions la France. Elle nous avait adoptés. "
Mais, à la mi-novembre  1943, la sécurité allemande et la police de Vichy réalisent une série de  coups de filet, arrêtant d'abord  Manouchian et seize autres  membres de son groupe (qui en comptait " près de quatre-vingts ", confiait Arsène Tchakarian auMonde en  1984), puis complétant leur tableau de chasse avec d'autres arrestations.  Jugés par un tribunal militaire où étaient conviés les journaux de la collaboration, tous  seront condamnés à mort, puis  fusillés  au Mont-Valérien le 21  février 1944. La seule femme parmi les condamnés, Olga Bancic, sera décapitée en Allemagne le 10  mai 1944.
C'est en hommage à ces  exécutions que Louis Aragon devait écrire, en  1955, le poèmeStrophes pour se souvenir.  Texte qui sera mis en musique et chanté, en  1959, par Léo Ferré sous le nom de L'Affiche rouge, référence à la couleur de l'affiche de propagande placardée par les nazis au moment des exécutions  et traitant les membres du groupe d'" armée du crime ".
Ayant, comme Henri Karayan, échappé à la rafle, Arsène Tchakarian est recherché activement en décembre  1943 par les policiers du commissaire David de la Brigade spéciale n0  2. Il se cache à Paris, au deuxième étage du 3, rue Frédéric-Sauton, dans le Quartier latin. " La protection de Léon Navar, commissaire de Montrouge, et celle de la police résistante de la Préfecture de Paris m'ont permis d'échapper aux griffes de la police nazie ", affirmait-il au soir de sa vie.  En mai  1944, grâce à son expérience militaire et à son action de résistant, il est envoyé à Bordeaux afin de fournir des informations en vue de préparer le bombardement du camp d'aviation de Mérignac par les Alliés.
Rappelé à Paris début juin  1944, il est envoyé alors à Montargis dans le maquis de Lorris sous le commandement du capitaine Bourgeois. Nommé lieutenant, il commande une vingtaine de résistants et après de durs combats entre dans Montargis où il occupe la Kommandantur installée à l'Hôtel des Postes.
Après la Libération, il sera nommé sous-lieutenant le 13  juillet 1948, puis  obtiendra  la croix de combattant de la guerre 1939-1940 et la Médaille d'argent du ministère de la défense. En  2005, il est nommé chevalier de la Légion d'honneur. Lors de la cérémonie de remise des insignes d'officier de la Légion d'honneur à Arsène Tchakarian, le 8  mars 2012, Nicolas Sarkozy, alors président de la République, déclarait : " A travers vous, aujourd'hui, la République rend hommage à un groupe d'hommes et de femmes qui ont donné leur vie pour la France, à ce groupe Manouchian que l'occupant appelait “l'armée du crime” et dont l'arrestation fait connaître à tous les Français leur rôle dans l'Armée de libération. "
Dominique Buffier
© Le Monde
7 août 2018

" Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent "

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" Strophes pour se souvenir "est un poème d'Aragon écrit à l'occasion de l'inauguration de la rue du Groupe- Manouchian, dans le 20e arrondissement de Paris. Publié en  1956 dans Le Roman inachevé (Gallimard), ce poème est devenu célèbre après sa mise en musique par Léo Ferré en  1959 sous le titre L'Affiche rouge (sur l'album Les Chansons d'Aragon, en  1961). Le texte rend hommage aux " vingt et trois qui criaient la France en s'abattant ". Vingt-deux membres du groupe furent fusillés au Mont-Valérien le 21  février 1944, et Olga Bancic, la seule femme, fut décapitée le 10  mai 1944 à Stuttgart.

Vous n'avez réclamé la gloire ni les larmes Ni l'orgue ni la prière aux agonisants
Onze ans déjà que cela passe vite onze ans
Vous vous étiez servis simplement de vos armes
La mort n'éblouit pas les yeux des partisans
Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants
L'affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants
Nul ne semblait vous voir Français de préférence
Les gens allaient sans yeux pour vous le jour durant
Mais à l'heure du couvre-feu des doigts errants
Avaient écrit sous vos photos MORTS POUR LA FRANCE
Et les mornes matins en étaient différents
Tout avait la couleur uniforme du givre
A la fin février pour vos derniers moments
Et c'est alors que l'un de vous dit calmement
Bonheur à tous Bonheur à ceux qui vont survivre
Je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand
Adieu la peine et le plaisir adieu les roses
Adieu la vie adieu la lumière et le vent
Marie-toi sois heureuse et pense à moi souvent
Toi qui vas demeurer dans la beauté des choses
Quand tout sera fini plus tard en Erivan
Un grand soleil d'hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le cœur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline
Et je te dis de vivre et d'avoir un enfant
Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient leur cœur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient la France en s'abattant
© Le Monde
https://www.youtube.com

l'Affiche Rouge de Louis Aragon et Léo Ferré en Hommage aux Martyrs de la Résistance




Pascal BERNARD 
Ajoutée le 3 mars 2009
Léo Ferré chante l'affiche rouge, poème d'Aragon en Hommage au Groupe Manouchian chanson empruntée pour le site de Pascal BERNARD
https://sites.google.com/site/arsenet...
https://sites.google.com/site/sitedep...
LesPartisansHommageFilmdePascalBERNARDd'Outreau
http://www.youtube.com/watch?v=fqhdbJ...
Arsène La Vérité toute la Vérité de l'Histoire de l'Affiche Rouge 1ère partie
http://www.youtube.com/watch?v=B_W0-X...
Tchakarian Arsène La Vérité, toute la Vérité de l'Histoire de l'Affiche Rouge 2èmpartie
http://www.youtube.com/watch?v=BFH0sg..

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