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mardi 11 décembre 2018

Merkel, les risques d’un vrai-faux départ - le 9.11.208

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Merkel, les risques d’un vrai-faux départ
Il y a de la sagesse dans la décision annoncée par Angela Merkel, lundi 29 octobre, au lendemain du revers subi par son parti, l’Union chrétienne-démocrate (CDU), dans le Land de Hesse. En renonçant à se représenter à la présidence de la CDU lors du congrès des 7 et 8 décembre et en assurant qu’elle quitterait la chancellerie après les législatives de 2021, elle a fait ce dont peu de dirigeants politiques savent se montrer capables : prendre acte que le moment est venu de passer la main.
Cette retraite en deux temps n’en est pas moins risquée. Jusque-là, Mme Merkel avait toujours jugé indissociables les fonctions de chancelier et de chef de parti. En choisissant finalement de conserver la première tout en renonçant à la seconde, un danger la guette : celui de laisser les clés du parti à un adversaire. Deux des trois candidats à sa succession sont dans ce cas : l’ancien député Friedrich Merz ne lui a pas pardonné de l’avoir détrôné de la présidence du groupe CDU-CSU du Bundestag, en 2002, et Jens Spahn, actuel ministre de la santé, fut le premier membre de la direction de la CDU à s’opposer frontalement, en 2015, à la politique d’accueil des réfugiés décidée par Mme Merkel.
Quant à la troisième candidate, Annegret Kramp-Karrenbauer, élue en février secrétaire générale de la CDU, elle passe pour être une fidèle de Mme Merkel, même si elle incarne une ligne plus conservatrice. Toutefois, si elle l’emporte, rien ne garantit que sa cohabitation avec la chancelière sera plus apaisée : « AKK » pourrait juger de son intérêt de se démarquer de Mme Merkel pour briguer la chancellerie le jour venu – à l’instar de Mme Merkel en 1999, lorsqu’elle rompit avec son ancien mentor, Helmut Kohl, pour préparer sa propre conquête du pouvoir…
Depuis septembre, Mme Merkel n’a plus la main sur le groupe CDU-CSU du Bundestag, dont les membres ont refusé de réélire à leur tête le candidat qu’elle soutenait. En décembre, elle pourrait voir le parti échapper à son contrôle. Dans ces conditions, ses marges de manœuvre à la tête du gouvernement risquent de se réduire considérablement. Sa « grande coalition » était déjà guettée par l’immobilisme. La voici désormais menacée de paralysie par les guerres intestines de la CDU.
De cette situation inconfortable, la chancelière peut cependant sortir par le haut. N’étant plus candidate à rien, elle a plus que jamais intérêt à réussir la fin de son quatrième et dernier mandat. Cela lui laisse deux ans pour prendre des décisions courageuses, à commencer par ce « nouvel élan pour l’Europe » promis dans l’intitulé même du « contrat » de sa coalition, mais que l’on ne voit toujours pas venir.
La chancelière allemande est-elle prête à faire preuve d’audace, maintenant que l’enjeu n’est plus celui de sa prochaine réélection ? A elle de le décider, si elle ne veut pas que sa fin de règne devienne une peu glorieuse agonie. A elle de prendre le risque d’achever sa longue carrière en inscrivant son action dans l’histoire, et non plus seulement en faisant de la politique au jour le jour.

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