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lundi 24 septembre 2018

Les Crises.fr - Appel pour un démantèlement « raisonné » de l’empire américain. Par Eva Salinas


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                                Les Crises
24.septembre.2018 // Les Crises


Appel pour un démantèlement « raisonné » de l’empire américain. Par Eva Salinas


Source : OpenCanada, Eva Salinas, 29-08-2018
Avec la sortie d’un nouveau livre, Chris Hedges discute avec OpenCanada de ce à quoi ressemble la décomposition aux États-Unis, pourquoi Trump est un « symptôme et non la maladie » et de l’importance d’écouter les autres.
Par Eva Salinas / 29 août 2018

« Nous ne pouvons pas choisir parmi les opprimés quels sont ceux qu’il convient de soutenir », écrit Chris Hedges, journaliste et auteur lauréat du prix Pulitzer, dans son nouveau livre, AmericaThe Farewell Tour. « Nous devons nous tenir aux côtés de tous les opprimés ou d’aucun des opprimés… Cela signifiera une réorganisation énorme de notre monde… Notre empire sera démantelé. »
Son dernier ouvrage jette un regard sur le large éventail des opprimés aux États-Unis – ceux qui, dit-il, « sont en proie au désespoir et à la détresse », allant de la souffrance après la désindustrialisation aux vies déchirées par la toxicomanie, les jeux d’argent et la violence. C’est une image sombre des communautés du pays le plus puissant du monde, mais riche en témoignages, et image du contexte historique et théorique nécessaire pour que Hedges puisse explorer deux questions centrales tout au long de ce livre : Pourquoi et comment les choses ont-elles si mal tourné ?
Comme l’ancien correspondant à l’étranger l’a expliqué lorsqu’il s’est récemment entretenu avec Eva Salinas, rédactrice en chef d’OpenCanada, à la veille de la tournée canadienne de son livre, la réponse réside dans la nature même de l’empire, et la solution ne consiste pas à « ressusciter l’empire, mais à le démanteler d’une manière rationnelle et réfléchie ».
Alors que d’autres publications récentes critiquant le climat politique actuel semblent être une réponse directe à l’élection de Donald Trump, Hedges a commencé à rédiger ce nouveau volume avant que Trump n’annonce sa candidature. Comme il l’explique dans la conversation ci-dessous, Hedges était là pour rappeler à ses lecteurs le mythe du succès américain, l’impact négatif de l’empire et l’importance d’écouter les autres de tous les côtés du spectre politique.
Au début du livre, vous dites : « La fin est proche, c’est difficile à contester ». Parlez-vous de la fin du capitalisme mondial ou plus précisément de la fin de l’empire américain ? Voyez-vous une différence entre les deux ?
Il y a une différence entre les deux et je parle spécifiquement de l’empire américain.
Pensez-vous que c’est quelque chose que nous devrions déplorer ? Y a-t-il des aspects qu’il serait malheureux de perdre ?
Je pense que l’empire est un mal absolu. Et je ne pense pas qu’il faille pleurer la dissolution de quelque empire que ce soit. L’empire, comme [Karl] Marx l’a compris, c’est fondamentalement le contrôle de la main-d’œuvre étrangère et des ressources étrangères pour le bénéfice de ceux qui l’administrent.
Pourtant, votre message apparaît comme un avertissement, malgré cela.
Le problème, c’est qu’à mesure que les sociétés se désintègrent, les pathologies qu’elles présentent sont souvent très autodestructrices, et c’est vraiment ce dont je parlais. La décadence au sein de la société américaine est très prononcée et les pathologies qui l’accompagnent sont très répandues – groupes haineux, fusillades de masse, violence nihiliste, sadisme sexuel, jeu, dépendance aux opiacés, suicide, tout est là. Et tant que nous n’aurons pas reconfiguré la structure de notre société, plus nous continuerons d’essayer de maintenir l’empire et le mode de vie que nous ne pouvons plus nous permettre, plus nous allons avoir de problèmes.
Donc vous suggérez de dire adieu à l’empire américain.
Tout ce que vous avez à faire, c’est de traverser le pays en voiture – c’est un terrain vague désindustrialisé après l’autre. Le Canada n’en est pas exempt
Est-ce une vision romantique d’une époque où l’industrialisation était solide – êtes-vous en train de réclamer un retour à cette époque ? Ou avons-nous besoin d’un nouveau départ ?
Les centres industrialisés ont généralement une durée de vie de quelques décennies, de 60 à 80 ans, puis ils se déplacent. Ils se déplacent de Birmingham à Lowell, ils se déplacent de Lowell vers le sud, ensuite ils quittent le sud. Il y a une migration constante. Je ne pense pas que ce système de capitalisme industriel soit durable étant donné le coût écologique, car qu’est-ce qu’il laisse derrière lui – de l’eau empoisonnée, des terres empoisonnées, et bien sûr une population abandonnée. Donc, oui, je pense que nous devons commencer à reconfigurer assez radicalement nos relations les uns avec les autres au sein d’un système social, et certainement nos relations avec la biosphère, si nous voulons survivre en tant qu’espèce humaine, plutôt que de tenter essentiellement de soutenir un système qui n’est finalement pas durable.
On a reconnu la perte du leadership américain sur la scène mondiale à l’heure actuelle – par exemple, en ce qui concerne les droits de la personne et la gouvernance – plutôt que la perte de l’empire américain dans son ensemble. Êtes-vous d’accord avec cela ?
« Cette idée que l’Amérique a parcouru le monde pour défendre la liberté et les droits de l’homme est un mythe. »
Je ne pense pas que l’idée que l’Amérique parcoure le monde pour défendre les droits de l’homme soit une croyance fondée sur la réalité. Que vous soyez au Vietnam, ou regardiez ce que nous avons fait en Amérique centrale – j’ai couvert les guerres au Salvador, au Nicaragua – ou les gouvernements par procuration que nous appuyons, j’étais à Gaza, au Yémen, en Irak, en Afghanistan, dans la Baie des Cochons, j’étais là lors de la chute de [Salvador] Allende, de la chute de [Mohammad] Mosaddegh en Iran.
Cette idée que l’Amérique a parcouru le monde pour défendre la liberté et les droits de l’homme est un mythe, qui à la base a été vendu au peuple américain pour promouvoir l’empire. Beaucoup d’autres personnes qui ont profité de l’empire, comme les Canadiens, l’ont souvent cru aussi. Mais ce n’est pas vrai. Je veux dire, j’ai été correspondant à l’étranger pendant 20 ans, et la dernière chose dont l’empire américain se soucie, c’est de la liberté et de la démocratie et du droit des gens à une véritable autonomie – au contraire ils passent la plus grande partie de leur temps à faire en sorte que cela n’arrive pas.
Alors, les États-Unis sont-ils différents sous Trump ? Ce livre aurait-il pu sortir avant lui, et les gens auraient-ils écouté le message de la même façon ?
J’écris sur cette génération de la culture américaine et l’empire américain depuis un certain temps – Death of the Liberal Class, [mort de la classe progressiste, NdT], Empire of Illusion [l’empire de l’illusion, NdT], Days of Destruction, Days of Revolt [paru en français sous le titre Jours de destruction, Jours de révolte,NdT] – alors dans quelle mesure les gens écoutent-ils ? Ça, je ne le sais pas. Dans quelle mesure cette critique fait-elle l’objet d’une tribune ? On ne lui donne presque jamais une tribune au sein de la société américaine. Je peux obtenir une visibilité nationale en France ou au Canada avec ce genre de critique. Je n’arrive pas du tout à l’obtenir aux États-Unis. C’est le problème d’avoir une élite dirigeante qui empêche essentiellement cette critique d’être exposée à un public plus large, de sorte que vous êtes repoussé aux marges de l’Internet ou aux marges du paysage médiatique. Je dirais que les gens sont réceptifs à cette idée dans tout le spectre politique parce qu’ils se rendent compte que toute l’idéologie du néolibéralisme a été une escroquerie géante des oligarques et des élites du monde des affaires.
En fait, je pense que le public a toujours été disposé à écouter et s’il l’est peut-être moins maintenant c’est plutôt parce que Trump est une personnalité politique si vénale, répugnante et effrayante. Il y a donc davantage une réaction instinctive du genre « n’importe qui d’autre que Trump » et cela ne fait pas ressortir le fait que Trump est le symptôme et non la maladie ; il est la conséquence d’un système politique pourri, d’une culture en ruine. Beaucoup de gens comptent sur l’État ou le Parti démocrate pour se débarrasser de Trump. Ça ne résoudra pas notre problème.
Parlez-moi du processus d’écriture de ce livre. L’écriviez-vous depuis un certain temps avant l’élection de Trump ? Comment ces deux événements se sont-ils chevauchés ?
J’ai commencé il y a deux ans, donc avant l’annonce de Trump. Et j’ai écrit mon chapitre sur le jeu en m’inspirant du casino Taj Mahal de Trump à Atlantic City, ce qui était complètement fortuit. Je ne savais pas que Trump allait annoncer, encore moins se présenter, encore moins devenir président. Et je sais que les éditeurs de Simon et Schuster, quand j’ai proposé le livre intitulé America, the Farewell Tour [Amérique, la tournée d’adieu, NdT], pensaient que c’était peut-être un peu hyperbolique, mais certainement qu’après l’élection de Trump, ils n’ont plus été de cet avis.
Dans quelle mesure les conversations que vous avez avec votre public lors de vos séances de lecture sont-elles différentes de celles que vous avez eues lors de vos recherches sur ce livre ?
Eh bien, elles sont différentes parce que les gens qui se présentent aux manifestations du livre sont en grande partie blancs, plus âgés, alphabétisés et pas dans des situations économiques désespérées. Les personnes que j’interviewe dans le livre souffrent vraiment, réellement, et sont affectées d’une sorte de désespoir profond, une détresse qui se manifeste dans une véritable rage contre un système qui les a trahis. C’est pourquoi je pense que lors d’événements littéraires, les gens peuvent comprendre que le système a trahi les travailleurs, les travailleuses et les pauvres de ce pays, et même la classe moyenne, mais ils ne le ressentent pas de façon viscérale. Alors que les personnes que j’interviewe – et j’ai interviewé des personnes qui soutiennent Trump – les personnes que j’interviewe souffrent vraiment et expriment une colère réelle et, à mon avis, légitime.
Comment les souffrances que vous évoquez aux États-Unis s’intègrent-elles ou se comparent-elles à la situation mondiale ?
Ce qui se passe ici se passe dans de nombreux centres désindustrialisés – regardez la Pologne, la Hongrie, la France, l’Allemagne, l’Angleterre. Elle n’est pas unique. Le capitalisme d’entreprise mondial est un phénomène à l’échelle de la planète, de sorte que la décadence que connaissent les États-Unis est, d’une certaine manière, semblable à celle que nous observons dans d’autres poches de désindustrialisation, en particulier en Europe. La différence est que nous sommes un empire. Et les empires dépendent pour leur subsistance, en particulier leur subsistance économique, du fait d’avoir une portée mondiale, en maintenant le dollar comme monnaie de réserve du monde. Enlevez cela et les empires sont en fait beaucoup plus fragiles que les États qui ne sont pas des empires, qui ne dépendent pas du contrôle des marchés mondiaux et de la monnaie mondiale pour leur survie économique.
Voilà pourquoi les conséquences aux États-Unis sont bien pires que dans un pays comme le Canada. Avec ce livre, j’ai voulu montrer les conséquences humaines du délabrement, de l’agression psychologique, physique, émotionnelle qu’une société en décomposition mène contre l’individu, c’est ce que les sociologues appellent les « maladies du désespoir ». C’est vraiment ce que le livre tente d’expliquer et de rapporter. Et bien sûr, l’argument qui en découle est que tant que vous ne vous attaquerez pas aux causes profondes du désespoir, ce qu’Émile Durkheim appelle « l’anomie » de la société, non seulement cela va continuer, mais va s’aggraver.
Est-ce que certains interpréteraient cela comme un avertissement pour contrer l’extinction de l’empire américain et donc le retarder ?
« Ce sera la perte du dollar comme monnaie de réserve mondiale qui démantèlera l’empire. »
Eh bien, l’empire est le problème. La tyrannie imposée aux autres s’impose finalement à lui-même. Et les empires vont toujours trop loin. Regardez l’empire athénien – ils envahissent la Sicile, toute leur marine est coulée, des milliers de leurs soldats sont tués. C’est ce qu’on appelle le micro-militarisme, et l’empire athénien s’effiloche.
Ou bien l’empire britannique envahit l’Égypte en 1956 après la nationalisation du canal de Suez et doit se replier dans l’humiliation. Cela a été la fin. Je veux dire, l’Empire britannique a connu une lente désintégration après la Première Guerre mondiale, mais c’était la fin, et bien sûr la livre sterling a été abandonnée comme monnaie de réserve mondiale, ce qui a entraîné la chute libre de l’économie britannique.
Ce sera la perte du dollar en tant que monnaie de réserve mondiale qui aura pour effet de démanteler l’empire parce qu’il faudra qu’il y ait une énorme contraction, que les importations deviendront extrêmement chères, que personne n’achètera de bons du Trésor américain, et ainsi de suite. Mais nous ne nous y préparons pas. Nous prétendons que nous allons continuer indéfiniment, comme cela a toujours été le cas, et cela a été un tel désastre.
Il ne s’agit donc pas de ressusciter l’empire, mais de le démanteler d’une manière rationnelle et saine afin de causer le moins de dégâts possible. L’invasion de l’Irak et de l’Afghanistan, qui a maintenant 17 ans, a été notre adhésion fatale à l’aventurisme militaire. Et il n’y a pas d’issue. C’est ce que font inévitablement les empires. Nous étions déjà très loin dans cette voie, mais en ne le reconnaissant pas et en prétendant que ce que nous avions auparavant peut être préservé, nous pourrions créer des difformités politiques très effrayantes sous la forme du proto-fascisme que les sociétés en difficulté créent souvent.
Comment distinguez-vous l’empire du capitalisme mondial ou même de l’état actuel de la démocratie, s’ils sont tous interconnectés en ce moment ?
Le capitalisme sauvage est l’ennemi de la démocratie et je ne suis pas le premier à faire cette affirmation. Et le capitalisme mondial est supranational ; il n’a aucune loyauté envers un État-nation. Ainsi, le capitalisme mondial, qui est à bien des égards responsable de la décrépitude aux États-Unis, continuera à exister, même dans un monde multipolaire. Mais le maintien de l’empire et le maintien de la démocratie, compte tenu de la trajectoire que nous suivons, vont être extrêmement difficiles. Je veux dire, nous ne vivons plus vraiment dans une démocratie – c’est une démocratie ratée. Il n’y a pas d’institutions aux États-Unis que l’on puisse qualifier d’authentiquement démocratiques, même nos partis politiques. C’est comme la République romaine, où vous avez la façade de la république, vous avez toujours le Sénat, etc. mais c’est autocratique. Et ici, nous avons la façade de la politique électorale et d’une presse supposée libre, bien qu’elle soit entre les mains d’une demi-douzaine d’entreprises, mais il est impossible de défier les intérêts du pouvoir des entreprises de l’intérieur. Au sein du système politique américain, vous ne pouvez pas voter contre les intérêts de Goldman Sachs. C’est impossible.
Tous ces thèmes apparaissent lorsqu’il s’agit du changement climatique – intérêts privés, dégradation, etc. – mais ils ne sont pas toujours mentionnés directement.
[La privatisation] est au cœur des changements climatiques parce que ce que nous avons créé, c’est un système où les diktats du marché déterminent des politiques entières où rien, y compris les êtres humains, n’a de valeur intrinsèque. Tout est monétisé, puis on exploite à la fois le monde naturel et les êtres humains jusqu’à l’épuisement ou l’effondrement. C’est la nature d’un capitalisme sans entraves et sans réglementation et, comme Marx l’a compris, il a construit en lui ses propres semences de destruction. Vous voyez donc qu’à ce stade avancé du capitalisme aux États-Unis, ces sociétés cannibalisent les institutions et les mêmes structures démocratiques ou jadis démocratiques qui ont rendu possible un capitalisme démocratique.
Vous réduisez donc les impôts, ce qui prive le gouvernement de revenus. Vous privatisez – nous avons une proposition pour privatiser la guerre en Afghanistan – je veux dire, c’est dingue – sous Erik Prince, pendant que sa sœur Betsy DeVos privatise l’éducation américaine… Le livre débute à Scranton [Pennsylvanie]. Ils y vendent leur réseau d’égouts, leur autorisation de stationnement, n’importe quoi. Ils cherchent désespérément à générer des recettes en raison des baisses d’impôt, mais ce n’est pas une solution à long terme. Que se passera-t-il quand ils n’auront plus rien à vendre ? Et ces structures sont moins efficaces et beaucoup plus coûteuses. L’agression actuelle, est une agression prenant la forme d’un démantèlement des structures mêmes de l’État.
Ces avertissements ou les exemples de ce genre de conséquences ne sont pas nouveaux – le message ne passe-t-il donc pas ?
Cela ne fait pas l’objet d’une couverture médiatique. Aux États-Unis, les médias audiovisuel publics sont maintenant contrôlés par les entreprises, parce qu’ils reçoivent si peu d’argent du gouvernement qu’ils dépendent des dons des frères Koch et d’autres, de sorte qu’on n’en parle pas de façon significative. Il n’y a pas de débat significatif sur les soins de santé universels aux États-Unis. Notre système de santé à but lucratif est un désastre, mais il est très rentable pour les sociétés pharmaceutiques et les assurances, très mauvais pour les patients et pour les médecins. Il n’y a pas de débat constructif parce qu’ils bloquent le débat.
On n’entend jamais le mot capitalisme sur MSNBC, sur aucune de ces [stations], cela ne fait tout simplement pas partie du discours politique acceptable. C’est remplacé par des anecdotes et des ragots et Stormy Daniels et Omarosa, vous savez, ce que Michael Cohen va faire ou ne pas faire. Ainsi, les questions de fond auxquelles nous devrions faire face, l’effondrement du capitalisme et l’effondrement de l’écosystème, ne sont même pas mentionnées. Je veux dire, nous avons des événements météorologiques extrêmes terribles et ils ne parlent jamais du réchauffement climatique.
Vous avez dit que le Canada n’est évidemment pas un empire, mais y voyez-vous des similitudes ou des répercussions ?
Le Canada est une version plus douce de l’Amérique. L’ADN du Canada n’est pas aussi violent que celui des États-Unis. Ce n’est pas un empire, mais en même temps, l’effet de ricochet va inévitablement reconfigurer et déformer la société canadienne.
Y a-t-il des mouvements ou de jeunes penseurs qui, à votre avis, réussissent à bien faire les choses ou vous inspirent ?
Oh, certainement. Tout d’abord, vous avez été témoin d’actes étonnants de désobéissance civile soutenue au Canada de la part des collectivités des Premières nations [peuples autochtones canadiens qui ne sont ni des Inuits ni des Métis, NdT]. On a eu Standing Rock. Avant ça nous avons eu Occupy [mouvement international de protestation sociale, principalement dirigé contre les inégalités économiques et sociales, NdT] . Vous avez eu le mouvement étudiant de Montréal. Il faut que ça soit soutenu. Et dans tous ces cas, ils ont été soutenus. Je pense que c’est là que réside l’espoir. Il ne s’agit pas seulement de la compréhension technique de la façon de construire les mouvements, mais aussi de l’augmentation de la prise de conscience.
Quelle est l’importance pour chacun de sortir et d’avoir ses propres discussions avec les autres en plus de lire un livre comme celui-ci ?
Vital. Je pense qu’une partie du problème est que dans la société moderne, les gens sont seuls. Je veux dire, qu’ils n’existent pas vraiment au sein de la communauté. Une société où ils passent beaucoup trop de temps devant les écrans – c’est exactement là où l’État veut qu’ils soient. Et cela rend plus difficile l’établissement de liens qui créent des mouvements. Il n’y a qu’un seul moyen d’avoir une relation, c’est le face à face. Ce n’est pas par Facebook. Et il n’y a qu’une seule façon de construire des mouvements, c’est le face à face. [Nous devons] établir de vraies relations autour d’intérêts communs, souvent, avec des gens avec lesquels nous ne sommes pas forcément d’accord sur le plan politique. Tant que nous restons séparés les uns des autres et isolés, nous restons impuissants.
Cette interview a été revue et condensée pour plus de clarté.
Source : OpenCanada, Eva Salinas, 29-08-2018
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.
Nous vous proposons cet article afin d'élargir votre champ de réflexion. Cela ne signifie pas forcément que nous approuvions la vision développée ici. Dans tous les cas, notre responsabilité s'arrête aux propos que nous reportons ici. [Lire plus]

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zx8118 // 24.09.2018 à 07h46
” le capitalisme mondial, qui est à bien des égards responsable de la décrépitude aux États-Unis, continuera à exister, même dans un monde multipolaire”
Même si la fin de l’empire par la fin de l’hégémonie de dollar est une bonne chose on ne va pas pour autant récupéré souveraineté et démocratie.
La dépossession de notre pouvoir est le fait de ce capitalisme mondial qui instrumentalise tout et n’importe quoi, n’importe qui, au profit d’un pourcentage de personnes toujours plus insignifiant et puissant. Mais aussi intraçables.
A qui appartiennent les centaines de milliers de milliards de dette ?
Le nouvel empire est hors frontière il ne conquiert pas le reste du monde de l’extérieur mais la totalité de l’intérieur.
Ce n’est pas une blessure mais un cancer généralisé.


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