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lundi 24 septembre 2018

Comment une promesse simple va transformer 2019 en "année noire" budgétaire



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POLITIQUE
24/09/2018 05:13 CEST 

Comment une promesse simple va transformer 2019 en "année noire" budgétaire


Transformer le CICE en baisses de cotisations immédiates pour les entreprises? Plus facile à dire qu'à financer.



Par Geoffroy Clavel

Comment une promesse simple va transformer 2019 en "année noire" budgétaire.


POLITIQUE - Pendant la campagne présidentielle, ce fut une des promesses les plus emblématiques du candidat Macron pour simplifier la vie des entreprises et doper leur compétitivité. En jurant de transformer le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) créé par François Hollande en baisses de cotisations pérennes, le fondateur d'En Marche! voulait offrir aux entrepreneurs d'importants gains de trésorerie tout en continuant à réduire le coût du travail. Et ce avec un effort budgétaire théoriquement minime.
C'est cette promesse que le projet de loi de finances 2019, dévoilé ce lundi 24 septembre en Conseil des ministres, doit mettre en musique. Et si elle ne devrait pas plomber durablement les comptes de l'État, elle s'avère, au moins à court terme, particulièrement douloureuse à mettre en oeuvre.
Double peine pour un effet "globalement neutre"
Jusqu'ici, le dispositif né sous le précédent quinquennat consistait en une réduction d'impôts sur les salaires inférieurs à 2,5 fois le Smic. Un crédit d'impôt lourd pour les finances publiques (il est évalué à près de 20 milliards d'euros) et pourtant critiqué pour sa complexité administrative et le décalage d'un an entre le moment où les sociétés payent leurs salariés et celui où elles perçoivent leur CICE.
L'idée d'Emmanuel Macron se veut donc simple, du moins en apparence: à compter du 1er janvier 2019, le gouvernement remplacera ce dispositif par une baisse de cotisations immédiate pour l'ensemble des entreprises, de l'ordre de six points pour les salaires allant jusqu'à 2,5 fois le Smic, et jusqu'à 10 points pour les salaires compris entre 1 et 1,6 Smic. Un geste significatif puisqu'il allège le coût de chaque salarié dès l'émission de sa feuille de paie.
Le problème, et il est de taille, réside dans l'année de transition entre les deux systèmes. En 2019, l'État va devoir supporter la baisse de charges patronales pour l'année en cours, et en même temps le remboursement du CICE pour les précédentes, les créances pouvant être remboursées jusqu'à quatre ans après le versement des salaires.
En tout, ce ne sont donc pas 20 mais 40 milliards d'euros qui devront être déboursés par l'État l'an prochain, 2019 s'annonçant d'ores et déjà comme une "année noire". Récompense de cet effort ponctuel? Quasiment rien, à en croire le rapport du comité de suivi du CICE cité par Les Echos. Si cette bascule offrira une avance de trésorerie réelle aux entreprises ainsi qu'une simplification bienvenue du dispositif, son bénéfice sera "globalement neutre".
Croissance en berne et déficits publics en hausse
La difficulté d'absorber cette "double facture" avait déjà justifié le report d'un an de cette mesure très attendue par le patronat, Emmanuel Macron jugeant crucial de réduire les déficits publics pour restaurer la crédibilité de la France sur la scène européenne. Malheureusement pour lui, la bascule du CICE intervient au moment où la croissance marque le pas, réduisant encore un peu plus les faibles marges budgétaires du gouvernement.
À elle seule, la réforme du CICE devrait doper le déficit public de près de 0,9 point de PIB. Le gouvernement assure toutefois que l'opération ne fera pas dérailler le respect des règles budgétaires européennes: selon Bercy, le déficit nominal devrait s'établir à 2,8% l'an prochain, soit sous la barre des 3% exigée par les traités européens. Quant au déficit structurel surveillé de près par Bruxelles, il ne devrait pas être affecté, cette mauvaise opération budgétaire étant circonscrite à l'année 2019.
Mais pour limiter la casse dans ses dépenses publiques, l'exécutif a tout de même été contraint de réduire la voilure, au risque d'agacer les chefs d'entreprise. Alors que les entreprises bénéficieront d'un "double chèque" en 2019, ce qui va faire bondir artificiellement leur impôt sur les sociétés, le gouvernement ne compensera que partiellement ces rentrées fiscales supplémentaires, économisant au passage jusqu'à 2 milliards d'euros. Le champs d'application du CICE a lui aussi été légèrement revu à la baisse.
Assez pour se mettre à dos le Medef, mais peut-être pas assez pour éviter le dérapage budgétaire si d'aventure la conjoncture économique, déjà minée par les coûts du pétrole, devait se dégrader davantage que prévu. "Le moindre fléchissement de la croissance pourrait mettre à terre les objectifs du gouvernement", a mis en garde Alain Trannoy, directeur de recherches à l'EHESS, qui voit dans le Projet de loi de finances 2019 "le budget le plus difficile du quinquennat".
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