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mardi 21 août 2018

Venezuela : Maduro fait arrêter plusieurs officiers


18 août 2018

Venezuela : Maduro fait arrêter plusieurs officiers

Après l'attaque aux drones du 4 août, le président fait le ménage dans l'armée

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Quatorze personnes, dont deux militaires hauts gradés, ont été arrêtées au Venezuela dans le cadre de l'enquête sur l'attentat qui, le 4  août, a visé le président Nicolas Maduro. Ce bilan a été fourni, mardi 14  août, par le procureur Tarek William Saab au cours d'une allocution télévisée. Le chef du parquet a précisé, mardi matin, que vingt autres personnes étaient impliquées et que ce nombre pourrait augmenter, certains prévenus ayant " admis leur responsabilité " et opté pour la " délation ".
Parmi les personnes présentées au juge figurent un colonel et un général, a précisé William Saab. Mais lundi, tard dans la soirée, un deuxième général a été arrêté. Il s'agit de Hector Hernandez Da Costa, de la garde nationale bolivarienne. Le procureur n'a pas évoqué sa situation, et les autorités n'ont pas précisé les motifs de sa détention. " Deux généraux arrêtés en vingt-quatre heures, cela ne s'était jamais vu, souligne ainsi Rocio San Miguel, experte en questions militaires. Ce fait inédit ne peut que contribuer à augmenter le malaise et l'instabilité au sein de l'armée. "
Le général Hector Hernandez a été arrêté à son domicile lundi soir par les hommes de la direction du contre-espionnage militaire (DGCIM). La scène a été filmée par ses proches. Avant d'être embarqué, le général a posté sur les réseaux sociaux une brève déclaration : " La DGCIM est arrivée sans ordre de perquisition ni mandat d'arrêt. Ils veulent m'obliger à les suivre. Je me déclare innocent de toute charge qui serait formulée contre moi, de façon perverse. "
" Le général Hernandez jouissait d'un grand prestige au sein de la garde nationale bolivarienne ", affirme Rocio San Miguel.Plus de cent cinquante militaires – tous grades confondus – ont été arrêtés cette année, et " les trois prisons militaires du pays sont surpeuplées ". Les arrestations tournent à la purge et laissent penser que le président Maduro commence à craindre son armée.
" Complot de la droite "Le président vénézuélien, qui se dit victime d'un " complot de la droite ", a réitéré les accusations formulées le soir même de l'attentat. Les " terroristes " auraient été entraînés par des paramilitaires colombiens (avec la complicité de l'ancien président colombien Juan Manuel Santos, dont le mandat a pris fin trois jours après l'attentat) et financés par des exilés vénézuéliens installés à Miami, en Floride.
Le 8  août, le jeune député d'opposition, Juan Carlos Requesens, avait été arrêté à son domicile, en dépit de son immunité parlementaire. Trois jours après son interpellation, les autorités ont laissé filtrer une vidéo de M. Requesens qui avoue avoir aidé à exfiltrer du Venezuela l'un des comploteurs présumés de l'attentat, à la demande de Julio Borges, un opposant qui vit à Bogota et qui est accusé par Caracas d'être le cerveau de l'attentat du 4  août.
Une autre vidéo, sur laquelle le député apparaît dans un caleçon souillé, a accrédité l'hypothèse qu'il aurait été torturé. Agé de 29 ans, Juan Carlos  Requesens est père de deux enfants. Accusé de " traîtrise, terrorisme et tentative d'assassinat ", il risque trente ans de prison.
Faire diversionAlors que Nicolas Maduro présidait, le 4  août, une cérémonie militaire sur une grande avenue de Caracas, deux drones ont explosé aux abords de l'estrade où il se trouvait en compagnie de son épouse et d'une partie du haut commandement militaire. Les détonations ont provoqué un moment de panique dans les rangs de l'armée et blessé sept personnes. Mardi, Nicolas Maduro a demandé que les responsables de l'attentat fassent l'objet " d'un procès public, ouvert et transparent afin de créer une conscience nationale ".
Mais l'opposition ne croit pas à la version des autorités. Certains pensent que l'attentat a été le fait des secteurs " anti-Maduro " au sein du parti chaviste qui est au pouvoir depuis dix-neuf ans. D'autres contestent l'existence même d'un attentat. Mme San Miguel évoque l'hypothèse d'une erreur des services de sécurité du président, qui auraient choisi d'abattre deux drones après en avoir perdu le contrôle.
Toujours selon l'opposition, l'incident des drones aurait servi de prétexte pour renforcer la répression politique et faire diversion, alors que des mesures d'ajustement sont attendues pour faire face à l'hyperinflation – qui devrait atteindre 1 000 000 % en  2018, selon le Fonds monétaire international – et à la crise qui ravage le pays. " La dictature profite du montage de l'attentat supposé pour faire condamner l'opposition ", a écrit sur son compte Twitter l'opposant Julio Borges.
L'entrée en vigueur d'une nouvelle monnaie – le bolivar va perdre cinq zéros – et l'annonce d'une augmentation sans précédent du prix de l'essence ajoutent à l'inquiétude ambiante. Selon les Nations unies, 2,3  millions de Vénézuéliens ont déjà choisi le chemin de l'exil, soit environ 7 % du total de la population.
Marie Delcas
© Le Monde

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