Gaza a connu dans la nuit du mercredi 8 au jeudi 9 août l'une des plus intenses escalades militaires entre Israël et le Hamas depuis l'été 2014. En réponse à des tirs de projectiles -lancés depuis l'enclave palestinienne, l'aviation israélienne a ciblé au cours de raids répétés des sites " stratégiques " du Hamas qui contrôle la bande de Gaza. Le risque d'une guerre à Gaza -s'aggrave alors même que des -négociations indirectes sont en cours depuis plusieurs semaines entre l'Etat hébreu et le Hamas pour l'en empêcher.
Jeudi, l'aviation israélienne a affirmé avoir visé dans la nuit 140 cibles militaires du Hamas, dont des sites de production d'armes et de tunnels, des entrepôts de stockage d'équipements et des camps d'entraînement.
" L'armée israélienne n'a frappé que des sites clairement utilisés par le Hamas, aucun site civil à Gaza n'a été visé ", a assuré le lieutenant-colonel Jonathan Conricus, le porte-parole des forces armées, jeudi matin.
" Notre mission est de défendre la souveraineté israélienne et de protéger les civils israéliens. Nous sommes préparés à plusieurs scénarios ", a ajouté M. Conricus.
Plus de 150 roquettes et obus ont été tirés par le Hamas et d'autres factions palestiniennes depuis la bande de Gaza. Le -système israélien de défense aérien " Dôme de fer " a intercepté 25 tirs, les autres ayant atterri dans des zones inhabitées. Dans les localités israéliennes proches de Gaza, les sirènes d'alarme ont retenti presque sans discontinuer, poussant les résidents à se mettre à l'abri. La branche armée du Hamas a revendiqué les tirs sur Israël tandis que l'armée -israélienne répétait, jeudi matin, qu'elle tenait le Hamas -responsable pour tous les tirs -venant de l'enclave.
Une jeune femme enceinte de Gaza, Enas Khammash, a trouvé la mort dans une frappe israélienne avec sa fille de 18 mois. Sept autres civils ont été blessés. Un membre de la branche armée du Hamas, les Brigades -Ezzedine al-Qassam, a été tué. Sept Israéliens ont été blessés.
Tension permanenteSelon l'armée israélienne, les hostilités ont commencé, mercredi en fin de journée, par des tirs -contre un véhicule civil israélien, provoquant en riposte des tirs de l'artillerie israélienne. Un premier barrage de six roquettes a ensuite été lancé depuis Gaza, deux ont été interceptés par le Dôme de fer et les quatre autres sont tombés dans la ville israélienne de Sderot, faisant plusieurs blessés. L'armée israélienne a ensuite mené trois séries de raids aériens en réponse aux tirs de roquettes.
" L'escalade n'est pas terminée ", indiquait M. Conricus jeudi matin. L'armée israélienne devrait renforcer sa défense aérienne et étendre les batteries de défense du Dôme de fer, anticipant des frappes de plus longue portée pour le Hamas. Jusqu'à jeudi -matin, celui-ci s'est gardé de frapper les grandes agglomérations en Israël. Une attaque du Hamas était attendue par Israël en réponse à la mort de deux membres de sa branche armée dans une frappe israélienne dans le nord de Gaza, mardi 7 août.
Dès mercredi après-midi, Israël avait fermé les routes longeant la bande de Gaza, après avoir observé une évacuation par le Hamas de sites militaires frontaliers, indiquant que le groupe palestinien se préparait à des frappes israéliennes. L'escalade a lieu alors que des -négociations indirectes sont en cours entre Israël et le Hamas. Menées par l'Egypte et l'ONU, -elles visent à instaurer, en plusieurs étapes, un accord de cessez-le-feu de longue durée entre les deux parties concernées.
" Le retour au calme le long de la bordure frontalière avec Gaza est la priorité d'Israël ", précisait jeudi le général Yossi Kuperwasser, -ex-directeur général du ministère des affaires stratégiques. Depuis quatre mois, la tension y est en effet permanente. La répression israélienne des manifestations de la Marche du retour organisées le long de la clôture frontalière quasiment tous les vendredis depuis le mois de mars a fait 150 morts et des milliers de blessés. Les cerfs-volants incendiaires envoyés depuis l'enclave ont, quant à eux, ravagé plus de 25 km2 de terres en Israël.
Selon le général Kuperwasser, Israël recherchait dans un premier temps un
" accord limité ". L'Etat hébreu s'engagerait à alléger le blocus qu'il avait resserré le 19 juillet pour faire pression sur le Hamas. La zone de pêche autorisée serait étendue le long de la bande côtière, et les dernières restrictions en vigueur au point de passage de marchandises de Kerem Shalom levées. En échange, le Hamas devrait s'engager à mettre un terme aux manifestations hebdomadaires de la Marche du retour ainsi qu'à l'envoi d'objets incendiaires et aux tirs de projectiles depuis Gaza. Si l'escalade en cours prenait fin et qu'un
tel accord était trouvé et respecté, d'autres négociations pourraient s'engager pour envisager un accord de cessez-le-feu à plus long terme, qui dépendra de la réconciliation entre le Fatah dominant en Cisjordanie et le Hamas à Gaza. Des projets d'infrastructures visant à améliorer la situation humanitaire à Gaza, ainsi qu'un échange de -prisonniers pourraient alors être envisagés.
Avant la reprise des hostilités, un optimisme prudent était -exprimé de part et d'autre quant à l'issue des pourparlers. Mercredi, une délégation du Hamas est arrivée en Egypte pour poursuivre les négociations. Le cabinet de sécurité israélien devait se réunir jeudi pour discuter des conditions d'une possible trêve. La progression des négociations n'a toutefois pas empêché l'escalade de mercredi soir, et les mises en garde de l'Egypte ou de l'ONU sont restées lettre morte.
L'émissaire de l'ONU Nickolay Mladenov s'est dit mercredi soir très inquiet de la reprise des hostilités, soulignant que des
" efforts sans précédent " sont entrepris pour empêcher une guerre. En Israël, l'opposition a vivement critiqué le gouvernement, qu'elle juge incapable de résoudre la situation avec Gaza. Avi Gabbay, le chef du parti travailliste, accusait jeudi matin, sur Twitter, le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, et le ministre de la défense, Avigdor Liberman, d'avoir
" échoué " dans les négociations en cours.
Claire Bastier
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