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dimanche 26 août 2018

Mireille Darc, à la vie à la mort

TÉLÉVISION




24 août 2018

Mireille Darc, à la vie à la mort

Nourri de témoignages, d'archives et d'extraits de films, le documentaire dresse un portrait émouvant de l'artiste

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C'est le portrait aussi stimulant qu'émouvant d'une femme française. L'histoire d'une gamine brune, timide et solitaire élevée dans un milieu plus que modeste à Toulon et qui, très tôt, décide de mener une autre existence. De vivre plus près de la lumière, des planches de théâtre, puis des plateaux de tournage. Quitter la torpeur varoise et les pesanteurs familiales pour Paris et ses opportunités était plus qu'un choix : une nécessité pour éviter de sombrer. Dans un document d'archive datant d'août  1959, on voit une jeune brunette à la voix douce et au sourire mutin avouer " ne connaître personne " mais rêver de devenir comédienne. La petite provinciale n'a pas d'argent mais du talent, du -bagout, de la chance. Vivant en colocation dans un studio à Montmartre, elle découvrira vite, et avec passion, les joies du théâtre.
Dès 1960, la télévision lui fera aussi les yeux doux. La voilà dans Hamlet, filmé par Claude Barma. Bien plus tard, elle avouera en souriant face caméra : " J'ai toujours eu envie d'être une intellectuelle. Cela n'a jamais marché ! " La suite est connue : Mireille Aigroz, dit Darc (1938-2017) a tutoyé les étoiles du cinéma, de la mode, du théâtre, de la photographie. Elle a fait tourner les têtes, impressionné Jean Gabin, apprivoisé un grand fauve nommé Alain Delon, attendri Michel Audiard, Lino Ventura, Bernard Blier ou Jean Yanne, notamment, et mené sa vie en se souciant des autres. Peu après son arrivée dans la capitale, elle changera de look. " J'étais brune, j'étais triste. Je suis blonde, je me sens gaie ! "
Cœur fragilisé dès l'enfanceIcône capable de se moquer d'elle-même, comédienne, actrice, modèle, photographe, documen-tariste, bonne copine à l'aise au milieu de machos coriaces ou femme libre jouant de son corps au cœur des années pop. Et même femme au foyer, à une époque où Darc et Delon forment un couple de feu : " J'ai envie de dépendre de lui des pieds à la tête ! ", lance-t-elle, comme pour provoquer. Chez Darc, il y a de la tendresse, un désir de construire. Le plaisir de tourner des pochades puis d'enchaîner avec Jean-Luc Godard. Femme fatale devenue réalisatrice engagée dans ses documentaires traitant de délicats sujets de société (on se souvient notamment d'un remarquable travail avec les prostituées du bois de Boulogne). " Derrière chaque documentaire, j'affronte mes peurs ! ", avoue-t-elle.
En dépit du succès, des fous rires avec la bande à Lautner, des escapades cheveux au vent au volant de bolides décapotés, des maisons construites avec passion et de grands amours (Delon, bien sûr, mais aussi le journaliste Pierre Barret, puis l'architecte Pascal Desprez), une ombre planera en permanence sur elle : un cœur fragilisé dès l'enfance par une mauvaise angine et les complications qui suivirent. En  1972, après le succès du Grand Blond avec une chaussure noire, film d'Yves Robert, dans lequel elle fait une fois de plus chavirer les cœurs, moulée dans une robe affolante signée de son ami Guy Laroche, elle avoue : " C'est une belle période de ma vie. Mais avec ce problème cardiaque, j'ai toujours cette épée de Damoclès au-dessus de moi… "
La richesse des archives rassemblées, les extraits de films passés à la postérité et la diversité des témoignages (de son assistante et confidente Véronique de Villèle à Michel Sardou, en passant par Michel Audiard, Alain et Anthony Delon et le -photographe Francis Giacobetti, pour ne citer qu'eux), toutes et tous évoquent la grande blonde avec une admiration non feinte. Après avoir visionné ce documentaire, on comprend mieux pourquoi.
Alain Constant
© Le Monde

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