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vendredi 17 août 2018

HISTOIRE et MEMOIRE - Il y aura 59 ans le 2 décembre, Fréjus était engloutie par les eaux du barrage de Malpasset

HISTOIRE et MEMOIRE



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Il y aura 59 ans  le 2 décembre, Fréjus était engloutie par les eaux du barrage de Malpasset




VIDÉO - Le 2 décembre 1959 à 21h13, après des pluies torrentielles, le barrage de Malpasset, dans le Var, cède. Une vague de 40 mètres s'engouffre dans la vallée et dévaste la ville de Fréjus, provoquant la mort de 423 personnes.
Article paru dans Le Figaro du 4 décembre 1959.


Une nuit et une journée d'épouvante

La catastrophe de Fréjus est plus grave encore que les premières nouvelles pouvaient le laisser supposer.
Ce soir, on avait déjà trouvé plus de 270 cadavres dans les décombres ou sur les lagunes laissées par les eaux en se retirant. Soixante blessés ont été soignés à l'hôpital de Fréjus et dix d'entre eux hospitalisés. Ce tragique bilan s'allongera encore hélas! au fur et à mesure des recherches qui doivent se poursuivre dans un terrain difficile et très étendu.
Des centaines de maisons ont été détruites. 1.600 mètres de voies ferrées et un viaduc ont été emportés. Les sinistrés se comptent par milliers.
Deux rescapés, MM. Potenza et Martini, transporteurs, qui habitent l'avenue de Verdun, voie empruntée par la route nationale 7 de Paris à Nice, m'ont conté la nuit atroce qu'ils ont vécue:
«Il était 20 h30 nous assistions au spectacle de la télévision lorsque l'électricité vint à manquer. La lumière fut coupée. Tout de suite, nous avons pensé: «C'est le barrage du Malpasset qui a cédé». Quelques instants plus tard, notre maison était entourée d'eaux furieuses qui montaient à l'assaut des étages avec une vitesse effroyable. Nous n'eûmes que le temps de nous réfugier sur le toit. Nous y sommes restés deux heures- deux heures affreuses. Autour de nous, nous pouvions distinguer les maisons voisines dont certaines s'écroulaient.
Nous nous attendions à tout instant à subir le même sort. Heureusement, le niveau des eaux s'arrêta à quelques mètres de notre refuge. Puis, il s'abaissa lentement. Durant tout le temps, nous entendions les cris de terreur et les appels des victimes. Nous revenions de loin.»
Quand je suis arrivé à Fréjus, au milieu de la nuit, ces cris résonnaient, lugubres, dans les quartiers ravagés de boue qui déferla pendant une demi-heure. Déjà, quelques sauveteurs avaient retiré des morts des décombres. Mais les troupes de la garnison, les pompiers de Nice et de toutes les villes de la région ainsi que des éléments de la marine attendaient le jour pour explorer les quartiers où s'étaient ruées les eaux du Reyran.

Un tableau sinistre

Quand l'aube se leva dans un ciel limpide, ce fut pour éclairer un tableau sinistre. L'avenue de Verdun n'était plus bordée que par des ruines. Dans la boue laissée par les eaux en se retirant, on voyait des débris de mobiliers, des voitures retournées, parfois furieusement cabrées roues en l'air. Aux cris que j'avais entendus la nuit succédait un silence plus terrible encore.
Sur la voie ferrée, les eaux avaient arraché et tordu les rails, balayé le ballast, renversé un train de marchandises dont les wagons éventrés semblaient évoquer les opérations de guerre.
L'autoroute Esterel-Côte d'Azur dont on sait qu'elle était actuellement en construction avait beaucoup souffert: la chaussée avait été emportée sur deux kilomètres.


Plan paru dans Le Figaro du 5-6 décembre 1959.
En contrebas, une plaine inondée scintillait sous le soleil levant. Des maisons qui la recouvraient, on cherchait vainement la trace. Partout de vieux pneus, des voitures entraînées par les eaux, des arbres déracinés jonchaient les flaques sur des kilomètres et des kilomètres. Des hélicoptères de la gendarmerie, de la marine et de la protection civile survolaient ce marécage.

Des cercueils de boue

Cependant les secours s'activaient. Les ambulances des pompiers et des ambulances privées de Nice et de Cannes pénétraient dans la mer de boue et les sauveteurs faisaient un va-et-vient incessant pour ramener des cadavres et des blessés. Les corps des victimes étaient parfois cachés dans les endroits les plus invraisemblables. Au cours de la nuit, des habitants de Fréjus, des gendarmes, des journalistes étaient passés non loin de la gare de marchandises auprès d'un amas de branches et d'arbres. Or, sous cet amas informe, il y avait le corps d'un enfant que j'ai vu retirer par les pompiers qui l'enveloppèrent d'urne couverture.
Des scènes, déchirantes se multipliaient. Des parents rescapés recherchaient leurs enfants; des enfants recherchaient leurs parents. A Fréjus, l'école des filles était aménagée en refuge pour les sinistrés et l'hôpital se remplissait rapidement de blessés et de morts.
L'identification des victimes est particulièrement délicate. La plupart d'entre elles, engluées dans de véritables cercueils de boue et de vase, sont plus ou moins défigurées.
Le nombre des sans-abri est peu élevé, la plupart ayant trouvé asile chez des parents, des amis ou dans des familles, qui ont échappé à la catastrophe.
A quelque distance de Fréjus, au passage à niveau des Esclapes, un autorail panoramique de la S.N.C.F, qui, parti de Marseille aurait dû arriver à Nice à 22 h. 35, était comme suspendu en l'air sur les rails arrachés. Par bonheur, les voyageurs n'avaient été que légèrement blessés.

Les avions de la base aéronavale emportés dans la mer comme des fétus

La base aéronavale de Fréjus, qui se trouvait dans le trajet du torrent, avait été aux trois quarts détruite. Des avions avaient été emportés à la mer comme des fétus, des murs épais avalent cédé. De lourds camions étalent en miettes. Là aussi, il y avait des disparus.


Carte parue dans <i>Le Figaro</i> du 4 décembre 1959.
M. Antoine Roulies, préfet du Var, qui dirige sur place les opérations de secours, m'a déclaré, à la gendarmerie de Fréjus, devenue son P.C.: «La catastrophe est imputable aux précipitations abondantes de ces derniers jours, qui ont fait sauter le barrage de Malpasset retenant les eaux du Reyran. La poussée des eaux a été telle qu'il ne reste rien du barrage. Pourtant, ce barrage remplissait les conditions normales de sécurité et, il y et quelques mois il avait fait l'objet de vérifications.»
«Les secours, poursuit le préfet du Var, ont été organisés avec le concours du directeur de la protection civile des ponts et chaussées, de la gendarmerie, des services de santé, de la police et bien entendu, de l'armée. De son côté, la marine a mis le porte-avions La Fayette, embossé devant l'embouchure de l'Argens, à la disposition des sauveteurs comme base opérationnelle des hélicoptères. Ces appareils, en l'occurrence, rendent de multiples services. Non seulement ils permettent de repérer les victimes, mais ils servent aussi au ravitaillement des rescapés isolés.
Le préfet du Var me quitte alors pour aller saluer les morts à la morgue de l'hôpital. La liste hélas! s'allonge d'heure en heure. Le ravitaillement de la ville est assuré par des camions. La centrale électrique de Fréjus a été anéantie.
Un appel a été fait à la population pour apporter des vêtements aux réfugiés, dont certains ont tout perdu, jusqu'à leur linge de corps. Un grand mouvement de solidarité a été constaté et des gestes touchants d'abnégation et de bonté atténuent un peu l'horreur du désastre.
Par René Rousseau et Maurice Guillon
VIDÉO-INA - La catastophe du barrage de Malpasset



http://www.lefigaro.fr/histoire/2014/12/02/26001-20141202ARTFIG00077-il-y-a-55-ans-frejus-englouti-par-les-eaux-du-barrage-de-malpasset.php



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