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dimanche 17 juin 2018

Les Crises.fr - Pourquoi l’Équateur veut-il faire sortir Assange de son ambassade à Londres ?



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16.juin.2018 // Les Crises

Pourquoi l’Équateur veut-il faire sortir Assange de son ambassade à Londres ?


Source : The Guardian, Dan Collyns, 15-05-2018
Superfans, bonbons à sucer et Pamela Anderson : six ans d’espionnage sur Julian Assange – vidéo explicative
L’Équateur a-t-il perdu patience avec Julian Assange ?

Oui. Carrément.
Au cours de sa première année de mandat, le président équatorien, Lenín Moreno, a qualifié Assange de « hacker », de « problème hérité » et de « caillou dans la chaussure ». Les termes ne pourraient pas être plus clairs. Moreno a clairement indiqué que le locataire le plus célèbre du monde a abusé de l’hospitalité de l’ambassade équatorienne à Londres.
Il y a près de six ans, c’était une autre histoire. Lorsque l’Équateur a accordé l’asile politique à Assange le 16 août 2012, le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Ricardo Patiño, a déclaré que la crainte de persécution du fondateur de WikiLeaks était légitime et a fait l’éloge de « son dévouement à défendre la liberté d’expression » dans un discours prononcé à Quito.
Mais ce qui ne devait être qu’une escale s’est transformé en un long séjour et Assange est devenu l’un des fugitifs les plus en vue au monde. Au cours des six dernières années, il a refusé de quitter le bâtiment de l’ambassade, craignant d’être arrêté par la police britannique et extradé vers les États-Unis pour être interrogé sur les activités de WikiLeaks.
La Suède a abandonné son enquête sur des allégations d’infraction sexuelle en mai 2017, affirmant que « toutes les possibilités de mener l’enquête ont été épuisées ». Toutefois, il fait toujours l’objet d’une arrestation au Royaume-Uni pour avoir enfreint les conditions de sa libération sous caution. Même son défenseur d’antan Rafael Correa, qui a été président de l’Équateur de 2007 à 2017, a récemment déclaré aux journalistes à Madrid que les « jours d’Assange étaient comptés ». Correa a dit que Moreno, son ancien protégé avec lequel il est maintenant en profond désaccord, « jetterait [Assange] hors de l’ambassade à la première pression des États-Unis ».
Pourquoi l’Équateur a-t-il changé d’avis à son sujet ?
Le comportement d’Assange ne l’a pas fait apprécier de ses hôtes. Par exemple, ses tweets en faveur de l’indépendance catalane auraient ennuyé le gouvernement espagnol, amoindrissant les relations entre Madrid et Quito.
En 1940, le président élu de Catalogne, Lluís Companys, a été capturé par la Gestapo, à la demande de l’Espagne, livré et exécuté. Aujourd’hui, la police allemande a arrêté le président élu de Catalogne, Carles Puigdemont, à la demande de l’Espagne, pour être extradé.
La publication par WikiLeaks de courriels liés à la campagne d’Hillary Clinton à l’approche de l’élection présidentielle américaine de 2016 pourrait être une autre raison pour laquelle la ministre équatorienne des affaires étrangères, María Fernanda Espinosa, a déclaré au début de cette année que le séjour d’Assange était « non durable ».
Moreno a cherché à jeter des ponts avec les États-Unis, en rétablissant les liens commerciaux qui avaient été endommagés ces dernières années.
Un sondage en mars a montré que 76,2% des Équatoriens voulaient que le gouvernement expulse Assange de l’ambassade.
Comment l’Équateur peut-il le faire sortir de l’ambassade ?
En mars, l’Équateur a coupé la connexion Internet d’Assange, justifiant son action par le fait qu’Assange avait enfreint un accord de ne pas diffuser de messages susceptibles d’interférer avec d’autres États [NdT : Wikileaks nie qu’un tel accord ait jamais existé.]. Dans une déclaration, le gouvernement a déclaré que son comportement sur les réseaux sociaux « met en danger les bonnes relations que [l’Équateur] entretient avec le Royaume-Uni, avec les autres États de l’Union européenne et avec d’autres nations ».
L’Équateur semble espérer que l’enfermement déjà inconfortable d’Assange lui deviendra intolérable.

Assange fait une déclaration depuis le balcon de l’ambassade pendant que les policiers montent la garde en août 2012. Photographie : Tony Kyriacou/Rex Features
Y a-t-il d’autres options ?
Il est difficile de voir comment Assange peut quitter l’ambassade et ne pas être arrêté pour violation de sa liberté sous caution, ce qui pourrait le conduire à l’emprisonnement.
L’Équateur a exploré un certain nombre d’autres pistes, mais aucune ne semble réalisable.
En janvier, son ministère des Affaires étrangères a déclaré qu’Assange avait été fait citoyen équatorien pour tenter de résoudre l’impasse concernant son séjour permanent à l’ambassade. Le ministère britannique des Affaires étrangères a répondu en disant : « L’Équateur sait que le moyen de résoudre ce problème est que Julian Assange quitte l’ambassade pour faire face à la justice ».
Espinosa est l’un des deux candidats en campagne pour être élu le 73e président de l’Assemblée générale des Nations Unies le mois prochain. Certains en Équateur ont spéculé qu’elle pourrait nommer Assange comme représentant de l’Équateur auprès des Nations Unies, afin de lui obtenir un statut diplomatique auprès de l’ONU pour qu’il puisse quitter le Royaume-Uni. Cependant, le ministère des Affaires étrangères a dit que si Espinosa est élue, elle ne serait pas en charge du cas d’Assange.
Les documents des services de renseignement vus par le Guardian suggèrent que l’idée de l’ONU a déjà été mise sur la table. La nomination d’Assange comme représentant de l’Équateur auprès de l’ONU lui accorderait l’immunité diplomatique lorsqu’il se rendrait à des réunions de l’ONU dans le monde entier, selon un document.
Le document énonce également l’idée d’essayer de le faire sortir clandestinement dans un véhicule diplomatique, mais reconnaît que, pour ce faire, il devrait quitter l’ambassade etrisquer d’être détenu, avant de monter dans la voiture. La police britannique a mis fin à une coûteuse garde de 24 heures sur 24 de l’ambassade en octobre 2015, mais le bâtiment reste sous surveillance dissimulée.
Chiffres clés
Rafael Correa : président de l’Équateur de 2007 à 2017

Rafael Correa a eu à un moment donné le plus haut taux de confiance de tous les leaders de l’histoire de l’Équateur. Photographie : Rodrigo Buendia/AFP/Getty Images
Correa est arrivé au pouvoir en 2007 à la fin de la « marée rose » qui a balayé l’Amérique latine, mettant en place des leaders de gauche comme Hugo Chávez au Venezuela et Evo Morales en Bolivie. Correa s’est présenté comme un anti-impérialiste, rejetant ce qui était perçu comme de l’ingérence des États-Unis dans la région.
Il a remporté trois élections et modifié la Constitution tout en se targuant, au sommet de sa puissance, de la plus haute cote d’approbation de tous les dirigeants de l’histoire du pays.
Cet économiste formé aux États-Unis a dû faire face aux critiques lorsqu’il a annoncé en 2008 que l’Équateur faisait officiellement défaut sur des milliards de dollars de dette extérieure, forçant le pays à solliciter des prêts désavantageux, en particulier auprès de la Chine.
Q&A : questions / réponses
Que se passerait-il si Julian Assange quittait l’ambassade équatorienne ?
Mais c’est le style autoritaire de Correa et les attaques constantes contre la presse qui ont attiré l’opprobre internationale. Il a introduit une loi sur les communications qui obligeait les médias à diffuser les messages du gouvernement et a utilisé ses émissions de télévision hebdomadaires pour attaquer des journalistes personnellement, en déchirant souvent des journaux.
Correa a attiré l’attention internationale après avoir offert l’asile à Assange en 2012. Il a laissé derrière lui un pays plus riche et plus juste, mais aussi plus divisé.
Lenín Moreno : président de l’Équateur

Lenín Moreno était vice-président de Correa, mais a critiqué son prédécesseur en lui reprochant une mauvaise gestion économique. Photographie : Mariana Bazo/Reuters
Moreno a remporté de justesse l’élection de 2017 en tant que successeur de Correa et candidat de son parti Alianza País. Certains ont rejeté Moreno comme une marionnette de son prédécesseur autoritaire, mais il s’est rapidement avéré être son propre maître.
Moreno, le seul chef d’État au monde à utiliser un fauteuil roulant, a tenu sa promesse de s’attaquer à la corruption en licenciant l’ancien vice-président Jorge Glas, un proche allié de Correa, et Glas a été condamné à six ans de prison pour corruption.
Il a reproché à Correa d’avoir mal géré l’économie et d’avoir laissé le pays endetté, principalement envers la Chine.
Il en résulte une amère querelle entre ces anciens alliés. Moreno, qui a été vice-président de Correa de 2007 à 2013, a laissé entendre à plusieurs reprises qu’il veut faire partir Assange de l’ambassade de l’Équateur à Londres.
Il a également souligné que son respect de la liberté de la presse est l’une de ses principales différences avec son prédécesseur.
Moreno a un penchant pour chanter en public et faire des blagues. Il a écrit des livres sur l’humour, qu’il a utilisé pour soulager la dépression qu’il a traversée lorsqu’il est devenu partiellement paralysé après avoir été atteint par un tir lors d’un cambriolage en 1998.
Il est le principal défenseur des droits des personnes handicapées en Équateur, ce qui lui a valu d’être nominé pour le prix Nobel de la paix en 2012. Moreno a été nommé envoyé spécial de l’ONU chargé des questions relatives aux handicaps et à l’accessibilité en décembre 2013.
Cet article a été révisé le 16 mai 2018. Une version antérieure affirmait que les procureurs suédois avaient abandonné leur enquête parce qu’ils ne pouvaient interroger Assange. Assange a en fait été interrogé à l’ambassade de l’Équateur en novembre 2016.
Source : The Guardian, Dan Collyns, 15-05-2018
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.
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DUGUESCLIN // 16.06.2018 à 07h02
Sera-t-il remis à la gestapo américaine par les anglais et emprisonné à Guantánamo?

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