Lu dans le DL du 17.06.2018
LE BILLET
PAR GILLES DEBERNARDI
Leclerc, Carrefour,
pourquoi se gêner ?
Avec ses faux airs de dandy philosophe, Michel-Édouard Leclerc se pose
volontiers en humaniste.
À l’entendre, il s’acharne à lutter pour « améliorer
le pouvoir d’achat des Français ».
Paysans compris ?
Pas sûr. Négociant
avec eux, fort de sa position dominante, l’épicier médiatique aurait une
fâcheuse tendance à leur « tordre le bras ». S’ils veulent être distribués
dans ses magasins, par exemple, les éleveurs de porcs doivent baisser
leurs prix de manière drastique. Quitte à crever un peu plus tard, l’ukase ne
se discute pas.
Pour avoir dénoncé ces pratiques, en 2006, le journaliste Périco Légasse
se fit traiter de « salopard » par l’élégant PDG.
Le ministère de l’Économie
vient pourtant d’enfoncer le clou et engage des poursuites contre son
groupe.
Bercy lui reproche d’avoir indûment touché 83 millions d’euros,
somme des remises « illégales » imposées à une vingtaine de fournisseurs.
Les candidats, auparavant commercialisés par une marque concurrente, se
voyaient ainsi taxés de 10 % pour entrer chez Leclerc.
Façon Marlon Brando
dans “Le Parrain” : « Je vais te faire une offre que tu ne pourras pas
refuser ! ».
Le tribunal de commerce appréciera.
Mais la Direction générale
des fraudes a déjà donné son avis : « Ce déséquilibre structurel dans les
contrats a un impact sur toutes les filières agricoles ».
Et comment.
L’affaire n’arrange guère l’image dégradée du monde de la grande
distribution.
D’autant qu’à Carrefour, alors que les licenciements s’enchaînent, le conseil d’administration accorde une mirifique « prime de départ »
au patron responsable du fiasco.
Hier, devant l’ampleur du scandale,
Georges Plassat a fini par renoncer à ses 3,9 millions de bonus.
N’empêche,
le « nouveau monde » continue de ressembler furieusement à l’ancien.
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