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samedi 24 février 2018

A Nouméa, Manuel Valls hérisse les indépendantistes


24 février 2018

A Nouméa, Manuel Valls hérisse les indépendantistes

Le député a pris position pour le maintien de la  Nouvelle-Calédonie dans la République

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Manuel Valls a-t-il été imprudent, en exprimant, mardi à Nouméa, son " attachement au lien qui unit la Nouvelle-Calédonie à la France " ? En déplacement dans l'archipel avec une délégation de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur l'avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie qu'il préside, M.  Valls n'a pas fait mystère de son choix personnel sur le destin du Caillou, lors d'un débat avec le public calédonien au Congrès.
A près de huit mois d'un ré-férendum d'autodétermination histo-rique et ultrasensible, les propos de l'ex- premier ministre ont écorché les oreilles des partisans de l'indépendance. " Les indépendantistes doivent désormais intégrer qu'ils auront tout l'appareil de l'Etat derrière les loyalistes dans la campagne pour le référendum ", a fustigé Louis Mapou, président du groupe UNI au Congrès (Union nationale pour l'indépendance-FLNKS) dont le parti a pris part à l'organisation de la primaire du PS en janvier  2017. Selon lui, Manuel Valls est " sorti du cadre " de sa mission destinée à informer la représentation nationale sur le contexte calédonien et à contribuer à la préparation de la période postérieure au référendum prévu d'ici novembre.
Lors de ce débat, face à un auditoire majoritairement acquis à la cause républicaine, l'ancien premier ministre a en outre plaidé pour que " le président de la République, le gouvernement apportent leur propre éclairage dans les semaines qui viennent " sur le dilemme calédonien. Rapporteur de la mission, le député LR Christian Jacob a lui aussi fait part de sa " conviction que la place de la Nouvelle-Calédonie est dans la France ", jugeant inimaginable que le gouvernement " n'ait pas d'avis ".
" Aux Calédoniens de choisir "Tandis qu'Emmanuel Macron est attendu en mai à Nouméa, M. Mapou s'est interrogé : " Va-t-il venir pour lancer la campagne du non au référendum ? ", avant d'asséner dans une allusion féroce au nom du parti présidentiel que " les vieux réflexes de la république -coloniale, conservatrice sont en marche ". Si durant sa campagne, M.  Macron avait dit souhaiter que l'île " reste dans la communauté nationale ", aucun membre de l'exécutif ne s'est positionné. Tout aussi mécontent, Roch Wamytan, chef du groupe Union calédonienne-FLNKS et signataire de l'accord de Nouméa (1998), a déploré que l'on vienne " souffler sur les braises alors que c'est la population calédonienne qui doit décider "" Laissons les -Calédoniens choisir, la mission est là au nom de l'Assemblée nationale, elle n'a pas à dire ce qu'on doit faire ou pas ", a-t-il cinglé.
La position de Manuel Valls a d'autant plus surpris qu'elle fait écho à la ligne défendue par le sénateur calédonien Les Républicains, Pierre Frogier. La semaine dernière, à l'occasion de l'examen au palais du Luxembourg de la loi organique sur le délicat sujet du corps électoral pour le référendum, l'élu s'est livré à un réquisitoire contre l'Etat, lui reprochant d'être " le seul dont l'avis n'est pas connu "" Est-ce si difficile pour l'Etat de dire son attachement à une Calédonie dans la France ? ", a taclé le sénateur. Pour cette raison, il boycotte le groupe de travail mis en place au Haut-Commissariat de la République (préfecture) pour préparer la consultation et amortir ses conséquences.
Durant le quinquennat de François Hollande, quand M. Valls était à Matignon, l'Etat s'était fixé comme ligne de conduite " la neutralité " ou " l'équidistance ". Une esquive pour éviter de froisser l'une ou l'autre famille politique dans un territoire où les plaies des violences des années 1980 ne sont pas cicatrisées et où les équilibres demeurent fragiles.
Secrétaire général de Calédonie ensemble (droite modérée) et président de la Province sud, Philippe Michel déplore également cet " impair " de Manuel Valls. " Nous pensons que si l'Etat marque sa préférence pour une solution ou une autre, on coupe court à toute discussion et on engendre des crispations comme on le voit ", a-t-il estimé, regrettant que " cet épisode vienne compliquer une situation qui l'est déjà bien assez ".
Cette controverse intervient en effet dans un climat lourd et confus. A quelques mois d'une échéance capitale, les dirigeants calédoniens, prisonniers de calculs politiciens alors que six mois après le référendum se tiendront des élections provinciales disputées, se révèlent incapables d'en éclairer les enjeux et de livrer une vision lucide de l'avenir du pays.
Même le choix de la date et de la formulation de la question du référendum alimente la zizanie. La multiplication des actes de délinquance et son instrumentalisation par des élus de droite, qui a récemment conduit le haut-commissaire à mettre en cause " ceux qui jouent avec les peurs ", échauffent les esprits.
Claudine Wéry
© Le Monde

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