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lundi 22 mai 2017

Le Macron-telling

22 mai 2017
Laurent Joffrin
La lettre de campagne
de Laurent Joffrin

Le Macron-telling

La communication politique progresse à grands pas. L’insupportable parti pris de transparence adopté sous la présidence Hollande va enfin disparaître. Le président recevait souvent les journalistes, expliquait longuement sa politique et toutes sortes d’informations filtraient de l’exécutif. François Hollande accueillait volontiers enquêteurs et équipes de télévision, ayant choisi, à tort ou à raison, de démystifier le pouvoir. Il avait même alimenté un livre-somme qui donnait pour ainsi dire en direct l’analyse complète du quinquennat par celui qui l’avait conduit. Cette horrible manipulation se termine. Ouf ! Le nouveau président parlera peu, à des moments soigneusement choisis, selon un propos parfaitement calibré, à des médias triés sur le volet. La parole était d’argent. Le silence sera d’or.
On a eu un avant-goût de cette bienfaisante méthode quand l’Elysée a voulu éliminer d’un voyage à l’étranger les journalistes politiques suspects de vouloir savoir ce qui se passait en coulisses, au profit de reporters spécialisés dans les affaires de défense, peu susceptibles de fourrer leur nez là où il ne faut pas. Ou bien quand Emmanuel Macron a refusé de répondre en Allemagne à une question qui sortait du champ par lui délimité. Fini l’horrible règne des petites phrases, des confidences intempestives, des indiscrétions qui flattent la curiosité du lecteur mais qui gênent tant le gouvernement. On saura désormais non ce qu’on veut savoir mais ce qu’on doit savoir. On ne s’informera pas, on sera informé. Finie la dictature médiatique ! Vive la communication maîtrisée !
Même chose en matière de vie privée. Le nouveau président a tiré la leçon des difficultés de l’ancien, rapportées avec tant de célérité par Closer ouVoici. Une femme de l’art, Mimi Marchand, qui n’est pas Mimi Pinson mais qui est la reine des pirates du people, a désormais la haute main sur la chronique intime du règne et négocie au couteau la moindre des photos pour éviter tout débordement. On savait toutes sortes de choses sur Valérie Trierweiler, Ségolène Royal, Julie Gayet, comme auparavant sur Cécilia et Carla Sarkozy. On ne saura qu’une seule chose sur Brigitte Macron : elle est en tout point admirable. Le reste, c’est de la presse de caniveau.
Le plus drôle, c’est que les journalistes, probablement, applaudiront. Profitant des brèches ouvertes par Hollande dans la forteresse élyséenne, ils avaient sorti toutes sortes d’échos gênants et de confidences imprudentes, ce qui rendait le pouvoir plus accessible au lecteur. Sans doute mécontents de remplir leur fonction démocratique en relatant les faits et gestes d’un régime plutôt débonnaire et transparent, ils en ont profité pour l’assassiner à qui mieux mieux, condamnant de surcroît, avec gravité et componction, une communication qu’ils jugeaient, tel l’hôpital qui se moque de la charité, trop ouverte et trop candide. Désormais privés d’informations et dépendant entièrement du bon vouloir du prince pour écrire leurs articles, ils ne manqueront pas de louer ce nouveau pouvoir si compétent et rigoureux, qui les met enfin en position de ne pas pouvoir exercer leur métier.

Et aussi

• Les grands patrons n’oublient pas de faire de la politique. Jusque-là Peugeot et Renault refusaient de promettre un chiffre d’affaires précis à leur fournisseur GM&S en difficulté grave. Miracle : deux jours après l’arrivée de Bruno Le Maire à Bercy, les deux Carlos (Ghosn et Tavares) ont augmenté le chiffre prévu auparavant, de 5 à 10 millions pour le premier, de 10 à 12 pour le second. Cela laissera un peu plus de temps pour trouver un repreneur à l’entreprise. Tant mieux pour les salariés, qui entrevoient un rayon de soleil. Tant mieux pour Le Maire et Macron, qui reportent l’échéance après les législatives. Le CAC 40 a voté.
• Le PS continue de broyer du noir. A Marseille, un sondage placeMélenchon en tête et Mennucci loin derrièreA Lyon, Najat Vallaud-Belkacem se retrouve virtuellement battue au deuxième tour par le candidat d’En marche, Bruno Bonnell, entrepreneur macronien type. Deux pertes symboliques annoncées dans les enquêtes, qui augurent mal du résultat national.
• Le FN ne veut plus sortir de l’euro. Prétextant que la nouvelle Assemblée n’aurait pas à traiter du sujet, ses candidats, à l’instar de Marine Le Pen, font désormais silence sur ce point crucial. Problème : sans sortie de l’euro, point de banque centrale française autonome, puisque la BCE reste gestionnaire de la monnaie unique. Du coup, le programme frontiste, déjà farfelu sur beaucoup de points, n’est plus du tout finançable. Pas grave : le FN n’a aucune chance d’arriver à la majorité et donc de gouverner. Il protestera, c’est sa nature.
LAURENT JOFFRIN
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