Entre société civile et société du spectacle

lu dans Le DL du 21.05.2017

LE BILLET PAR ANTOINE CHANDELLIER 

Entre société civile et société du spectacle

 Valls a-t-il mérité ce chemin de croix ? 
Une primaire ratée, l’opprobre de la gauche et le pompon, ce « vent » adressé par Macron, lui claquant la porte de son parti au nom du sacro-saint principe de renouvellement. 
Avec condescendance, et parce que, faute de majorité solide, En Marche aura besoin d’alliés, le président ne lui a pas opposé d’adversaire en sa circonscription.
 Point de ces objets politiques non identifiés censés révolutionner la façon d’administrer la France, venus de cette planète appelée « société civile ». 
Mais le fier catalan n’a pas fini avec les épreuves humiliantes. 
Chez lui, dans l’Essonne, les parachutages de Francis Lalanne, barde de la chanson française, et de Dieudonné, suppléant de l’écervelé breton qui l’a giflé, vont attirer les caméras.
 L’humoriste sulfureux a un compte à régler avec celui qui fit interdire ses spectacles. 
Voilà lancé le train des législatives avec 577 matches dont certains attirent la lumière sans rehausser le niveau.
 Après avoir tenu promesse en confiant des ministères à des experts et non des ronds-de-cuir de la politique, le mouvement macronien réserve la moitié des investitures aux nouveaux visages. 
Une société civile censée échapper au moule de l’énarchie et du clientélisme.
 À bien y regarder, ces candidats tout beaux tout neufs ressemblent par leur sociologie aux députés qu’ils veulent remplacer. 
Issus des mêmes milieux ils pourraient, tôt ou tard, être guettés par des conflits d’intérêts avec leur profession mise entre parenthèses. Difficile de préjuger de l’action d’une nouvelle génération, représentant souvent la France d’en haut de Raffarin. 
Sans rupture avec les habitudes et le corset institutionnel, nos marcheurs risquent d’enfiler les pantoufles de ceux qu’ils auront doublés. 
Et de devenir, à leur tour, de parfaits professionnels de la politique.