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samedi 30 avril 2016

Les Crises.fr : Nuit debout, convergences, horizontalité, par Frédéric Lordon

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                                       Des images pour comprendre
30
Avr
2016

Nuit debout, convergences, horizontalité, par Frédéric Lordon


Petit point sur les débats en cours…
Entretien avec Xavi Espinet, pour le journal barcelonais El Critic, réalisé le 16 avril, publié le 23 avril.
par Frédéric Lordon, 25 avril 2016
Avec les migrants sous le métro La Chapelle à Paris Felipe Vincenot / Mouvement de libération graphique et artistique #NuitDebout
Avec les migrants sous le métro La Chapelle à Paris
Felipe Vincenot / Mouvement de libération graphique et artistique #NuitDebout
D’après-vous, qu’est-ce qui a bien pu décider le gouvernement à proposer un tel projet de réforme, et de quoi la loi El Khomri serait-elle le symbole ?
Il n’y a aucune autre explication que l’aveuglement idéologique le plus absolu. Ce gouvernement dit de gauche fait en réalité, et dans tous les domaines, la politique la plus à droite qu’aucun autre gouvernement sous la Ve République. Quand on considère les choses avec un peu de recul, il y a là un réel événement politique à l’échelle historique du régime. Les conséquences ne vont pas tarder à s’en manifester — au plus tard lors des élections de 2017 — et elles seront de très grande ampleur. Nous sommes en train d’assister à la liquidation historique de la social-démocratie française — ce qui en réalité est un soulagement. Mais il aura fallu qu’elle aille plus à droite que n’importe quel autre gouvernement pour que celle liquidation soit acquise. Bref, c’est le fanatisme néolibéral du Parti socialiste qui aura conduit ce gouvernement à proposer cette loi que même un gouvernement Sarkozy n’aurait pas osé présenter. C’est dire l’état de décomposition intellectuelle et de perdition idéologique dans lequel se trouve ce parti qui n’a plus avec la gauche que des rapports d’inertie nominale. Mais en plus de l’enfermement idéologique, il faut avoir complètement perdu contact avec l’état réel de la société, et tout ignorer de la souffrance et de la précarité générales où se trouve pris le travail salarié, pour avoir l’idée folle de les approfondir encore.
Après la défaite des mobilisations contre la réforme sarkozyste des retraites, la rue gronde enfin à nouveau. Quels rapports devrait entretenir, selon vous, Nuit debout avec la mobilisation syndicale contre la réforme du droit du travail ?
Des rapports bien plus étroits que ceux qui existent actuellement. Il n’y aura pas de transformation politique d’ampleur sans un mouvement populaire de masse. Or un tel mouvement prend nécessairement, pour partie, la forme de la grève générale. Et il n’y a pas de grève générale sans le concours des organisations de salariés. C’est aussi simple que ça. Mais même sans aucune certitude (c’est une litote) quant au déclenchement effectif de la grève générale — et quoiqu’il nous faille faire tout ce que nous pouvons pour en relever la probabilité —, il est d’une importance stratégique d’opérer la jonction entre différentes fractions de la gauche que d’invisibles barrières sociologiques tiennent ordinairement séparées, et notamment la gauche militante des centre-villes et celle des classes ouvrières syndiquées. En dépit de tous les obstacles, il existe une base objective à cette convergence : la condition salariale. Le rapprochement est d’autant plus facilité que le néolibéralisme maltraite désormais aveuglément et uniformément, y compris donc sa propre base sociale a priori, à savoir les étudiants, futurs cadres du capitalisme, mais condamnés par lui à la précarité et à des formes de plus en plus dégradées de l’insertion dans le monde du travail — et ceci alors même que ces étudiants nourrissaient des ambitions en rapport avec leurs trajectoires scolaires… et découvrent qu’elles seront amèrement déçues. Il y a là tous les ingrédients pour des retrouvailles entre classes sociales que leur hétérogénéité tenait éloignées l’une de l’autre. Mais je ne peux pas terminer cette réponse sans mentionner l’existence d’une commission « grève générale » à la Nuit debout, à qui l’on doit les premières actions très concrètes, et notamment le fait d’avoir organisé une délégation d’étudiants à la gare Saint-Lazare pour aller à la rencontre des cheminots mardi 12 avril. Ces actions sont absolument exemplaires, et c’est en les multipliant que nous serons à la hauteur de notre propre mot d’ordre de convergence des luttes.
Beaucoup voient en Nuit debout un phénomène générationnel. Pourquoi cette jeunesse, qu’on prétendait par ailleurs dépolitisée, déploie son être politique en dehors des canaux institutionnels ?
Pour ma part je suis assez réticent à l’idée d’enfermer Nuit debout dans la catégorie de « phénomène générationnel ». Assez souvent, le recodage « générationnel » d’un phénomène social est le propre du commentaire médiatique — et, reconnaissons les choses avec lucidité, l’une des raisons pour lesquelles l’accueil médiatique de la Nuit debout n’a pas été jusqu’ici trop mauvais, les journalistes répondant, la plupart du temps sans s’en apercevoir, à des rapports d’affinité sociologiques — qui sont totalement absents lorsqu’il s’agit de mouvements syndicaux classiques : et, de manière tout aussi inconsciente, les médias s’abandonnent alors à un racisme social ouvert. En tout cas le point important est celui-ci : le recodage générationnel risque toujours de fonctionner comme un opérateur de dépolitisation ; c’est juste une « histoire de jeunes », donc une histoire sans importance qui passera dès qu’ils seront devenus vieux — le plus vite possible, espère-t-on, et entre temps on est prêt à faire preuve de mansuétude pourvu que ça n’aille pas trop loin. Voilà typiquement où mène l’analyse « générationnelle »… Ceci étant dit, j’observe, même si c’est depuis mon point de vue qui est partiel comme tous les points de vue, une effervescence intellectuelle et politique inédite de la jeunesse étudiante et même — c’est un fait extrêmement marquant — lycéenne. Je reçois de plus en plus de contacts, de sollicitations, de messages de lycéens, et des messages qui témoignent, je peux vous le dire, d’une conscience politique critique déjà très affûtée. C’est un phénomène tout à fait nouveau. Les gouvernements qui seront aux affaires dans dix, quinze ans, ont du souci à se faire : quelques sérieux problèmes les attendent, qui sont en train de mûrir dès à présent.
Lors de votre allocution du 31 mars, vous en appeliez au « désir politique qui pose et qui affirme ». En pleine crise de l’Etat-nation et du politique, qui serait le sujet de ce désir et de quels « objets politiques » pourrait-il/devrait-il se saisir ? Et que répondriez-vous à tous ceux qui qualifient cette « affirmation », renouvelée tous les soirs place de la République, de purement « volontariste » ?
Le sujet de ce désir est insaisissable ex ante. Le « nous » se construit dans le processus même de ses réalisations. « Convergence des luttes » est une sténographie qui dit son désir d’être le plus large possible — et si l’on veut en nommer plus explicitement les composantes : la jeunesse urbaine précarisée, les classes ouvrières syndiquées (et en réalité plus largement le monde du travail), les quartiers abandonnés des banlieues. Quant à ses objets, il les élira lui-même. Il est certain en tout cas que ce mouvement ne doit pas s’abandonner au ravissement intransitif de soi, et que si son énergie ne se convertit pas en désirs déterminés — en objectifs politiques explicites —, il restera improductif. Conserver ce sens de l’objet suppose d’en rappeler en permanence la nécessité dans les débats pour lutter contre l’éparpillement. Pour ma part, je pense à quelque chose comme un mouvement « télescopique », j’entends par là qui se donnerait une gradation d’objectifs, allant du (proche) retrait de la loi El Khomri à la (lointaine) écriture de la constitution d’une république sociale, en passant par toute une série d’idées « intermédiaires » à imposer dans le débat politique, à l’image par exemple de l’imposition faite aux banques de se désengager de toutes les activités spéculatives, mais on pourrait mentionner bien d’autres choses de ce registre. Y a-t-il dans tout ça un « volontarisme de l’affirmation » ? Mais quelle politique ne procède pas ainsi ? Même si évidemment elle ne peut pas s’en contenter, l’intervention politique joue essentiellement du performatif. Dire « il y a » est un moyen de contribuer à faire exister la chose dont on dit qu’elle existe avant qu’elle existe vraiment. Et c’est vrai : c’est un type d’intervention qui a tout du pari ! Pour autant, même si le pari est perdu, il sème quelque chose qui fera son chemin : une idée, le sens d’un problème, une exigence, etc.
Sieyès, lors de la Révolution française, énonçait le principe de la démocratie représentative : la volonté populaire ne peut s’exprimer que par les représentants du peuple. De par sa configuration même, Nuit debout remet en question ce principe et la démocratie représentative y est durement critiquée à chaque AG. Quels nouveaux modes de décision/légitimation/création politiques vous semblent laisser entrevoir Nuit debout ?
Ce que je vais dire a sans doute tout pour prendre à rebrousse-poil les inclinations spontanées de la Nuit debout mais tant pis. Je pense qu’à l’échelle macroscopique il n’y a pas de politique sans une forme ou une autre d’institutionnalisation, et même de représentation. Au demeurant l’AG de la Nuit debout n’est même pas conforme au modèle d’horizontalité pure qu’elle revendique d’accomplir. Par exemple, il n’y a pas d’AG sans règles — règle du tour de parole, règle du temps de parole, respect de la personne modératrice, règles gestuelles de manifestation des opinions, etc. — et ces règles ont par définition un caractère institutionnel et verticalisé puisqu’elles s’imposent à tous, qu’elles font autorité, que tous les reconnaissent — conceptuellement, la verticalité c’est cela. Nous avons donc d’emblée affaire, et dès cette échelle, à de l’institutionnel-verticalisé, ce qui prouve bien l’inanité d’un mot d’ordre maximaliste d’horizontalité pure, en fait intenable. La vraie question n’est pas dans d’absurdes antinomies « institutions vs. pas d’institution » ou « horizontal vs. vertical » mais dans la manière dont nous agençons nos institutions et dont nous parvenons à contenir la verticalité que nécessairement nous produisons du simple fait de nous organiser a minima collectivement. Quoiqu’elle se verticalise de son propre mouvement, la Nuit debout peut cependant se maintenir fermement dans une configuration aussi proche que possible de ses idéaux d’horizontalité et de démocratie directe. Mais elle ne le peut sans doute qu’en raison de sa taille et de l’échelle réduite à laquelle elle opère. Il faut donc tenir ensemble deux idées qui en réalité n’ont rien de contradictoire : d’une part la configuration institutionnelle d’une collectivité à l’échelle macroscopique, disons nationale, ne saurait être le simple décalque du modèle expérimenté à l’échelle de la place de la République ; mais inversement la Nuit debout illustre en elle-même des principes génériques qui doivent guider l’élaboration d’une configuration institutionnelle globale : subsidiarité maximale, c’est-à-dire la plus grande délégation d’autonomie possible aux niveaux locaux, méfiance à l’égard du potentiel de capture que représente toute institutionnalisation, contrôle serré des représentants et des porte-parole — contrôle qui signifie révocabilité permanente (quoique réglée) —, organisation de l’écoute constante des niveaux d’organisation inférieurs par les niveaux supérieurs, en particulier pour ne pas laisser aux niveaux supérieurs le monopole de l’initiative qui transformerait les niveaux inférieurs en simples chambres d’approbation : les idées doivent circuler dans les deux sens, et les niveaux supérieurs continuer de s’inspirer des niveaux inférieurs.
Savoir étendre Nuit debout aux classes populaires des banlieues vous semble être une condition nécessaire à son succès et a sa légitimité. Et quid des classes populaires de la « France périphérique », passablement lepenisées ? Comment s’adresser aux uns sans susciter la réprobation des autres ? Et, faute de trouver un langage commun, y aurait-il le danger d’une sorte de réaction populaire pro statu quo « gaulliste » comme en 68 ?
C’est une question tellement décisive qu’elle en est presque douloureuse… Quand on voit déjà les difficultés à simplement faire agir de concert des fractions politisées mais sociologiquement hétérogènes comme les classes ouvrières syndiquées et les milieux du militantisme urbain, on mesure plus lucidement les barrières à franchir pour nouer le contact avec d’une part les populations des quartiers, et d’autre part celles de ce que vous appelez la « France périphérique » — je n’ai même pas besoin d’insister sur tout ce qui d’ailleurs oppose ces deux populations… Il ne faut pas se raconter des histoires : un surgissement événementiel comme la Nuit debout n’a en lui-même aucun pouvoir de retravailler aussi profondément le terreau social pour y produire une modification massive comme la délepénisation. Ce sont là des affaires de militantisme local, opiniâtre, le plus souvent invisible, qui part à la reconquête des gens un par un ou presque. Ce à quoi peut toutefois contribuer un mouvement comme la Nuit debout, c’est de remettre en place dans le paysage politique d’ensemble une vraie proposition de gauche qui, si elle fait son chemin, pourra à terme apparaître comme une alternative envisageable par tous ceux pour qui le FN est devenu la seule figure de l’alternative. Inutile de le dire, c’est là une œuvre de longue haleine…
 Nuit debout sonnerait le glas du réductionnisme revendicatif des luttes et dépasserait les ambitions de la mobilisation syndicale contre la loi El Khomri. Vous déclarez le décès de l’actuel ordre politique français et appelez de vos vœux une république sociale. Le roi est enfin nu ? Nuit debout, Assemblée constituante ? Et quelles dispositions adopter au sein du mouvement pour qu’il puisse effectivement en devenir une ? 
La formule « nous ne revendiquons rien » demande à être adéquatement comprise — je me suis rendu compte post festum qu’elle avait créé toute une série de malentendus notamment du côté syndical où elle semblait attaquer de front la grammaire même de l’action qui est fondamentalement revendicative. Il est tout à fait évident qu’il ne s’agit nullement de déclarer caduques les luttes revendicatives là où elles ont lieu — ce serait dénué de pertinence et même passablement bouffon. Mais il s’agit d’attirer l’attention sur le fait que les revendications, par construction, viennent s’exprimer dans un cadre qui lui-même demeure inquestionné… et ceci alors même que ce cadre dessine les conditions de possibilité (ou d’impossibilité) de certaines revendication. Le succès d’une revendication de hausse du Smic, par exemple, devient hautement improbable si l’on oublie de mettre en question aussitôt les structures de la mondialisation néolibérale — le pouvoir actionnarial, le libre-échange sans frein, les délocalisations — qui opposent objectivement toutes sortes de contraintes à l’augmentation salariale. Demander « un autre partage des richesses » est vain si on ne s’intéresse pas aux structures qui déterminent le partage des richesses. Le célèbre TINA (There Is No Alternative) demeurera vrai tant qu’on n’aura pas déplacé notre attention sur l’ensemble des structures néolibérales qui le rendent vrai ! Et hors duquel il cesse instantanément d’être vrai. Pour remplacer TINA par TIAA (There Is An Alternative !) il faut en recréer les conditions de possibilité structurelles — c’est-à-dire refaire le cadre. Refaire le cadre c’est autre chose que revendiquer. C’est entamer un processus hautement politique de reconstruction institutionnelle, au sens large du mot « institutions ».
Ce processus prend une portée plus grande encore quand il s’élève à un niveau constituant, pour le coup le méta-cadre. On voit bien qu’il n’y a personne auprès de qui apporter la « revendication » d’une Constituante ! C’est le peuple lui-même qui se saisit de ce désir, qui l’affirme et qui le pose. Maintenant il faut préciser le statut d’un appel à une Constituante qui relève de deux interprétations différentes. La première a à voir, une fois de plus, avec le registre performatif de l’intervention politique. En appeler à une Constituante est une manière de poser des problèmes, deux en particulier :
 nous estimons que le système institutionnel actuel, celui de la Ve République, est à bout de souffle, qu’aucune transformation significative du cadre ne peut s’y produire, et qu’il doit être entièrement refait, pour le redémocratiser, et pour rendre à nouveau possibles des différences politiques significatives — car en définitive c’est cela la démocratie : la possibilité toujours ouverte de faire autrement ;
 une Constituante s’impose également non comme un jeu juridique formel hors-sol mais comme le moyen de donner la plus haute forme juridique aux principes fondamentaux d’un modèle de société : de même que les constitutions successives des républiques françaises, par-là bien toutes les mêmes !, avaient pour finalité réelle de sanctuariser le droit de propriété qui donne sa base au capitalisme, il apparaît que le projet d’en finir avec l’empire du capital sur la société ne peut que passer par une destitution du droit de propriété et une institution de la propriété d’usage (quand je parle ici de propriété, il n’est évidemment question que des moyens de production et pas des possessions personnelles). Seul un texte de la portée juridique ultime que revêt la constitution peut opérer ce changement à proprement parler révolutionnaire.
Et voilà, du coup, la deuxième lecture de l’appel à une Constituante, une lecture historique et stratégique : il faut bien voir en effet tout ce qui nous éloigne en réalité d’un processus constituant, à plus forte raison qui déboucherait sur une république sociale telle que je la pense, à savoir débarrassée du droit de propriété (au sens que j’ai indiqué à l’instant) ! Dans cette deuxième lecture, positive, la Constituante est la consécration d’un processus révolutionnaire à venir, qui en est en réalité la condition de possibilité. Mais alors pourquoi se projeter ainsi dans un horizon quasi-irréel ? Parce que c’est une manière de mettre des problèmes à l’agenda du débat public. C’est une manière de poser fermement dans l’espace public qu’il y a un problème avec les institutions de la dépossession, et qu’il y a un problème avec l’empire du capital sur la société — comme la loi El Khomri a la vertu de nous le faire voir plus clairement que jamais. C’est sans doute une longue marche qui nous sépare de la solution à ces deux problèmes. Raison de plus pour nous mettre en route tout de suite !
[Question inévitable de journal ibérique] Les élections 2017 approchent. Outre le fait que le paysage politique à gauche du PS ne semble pas se prêter à la création d’un nouveau parti, vous affirmez qu’envisager un Podemos à la française serait se méprendre. Pourquoi ?
La Constituante est aussi une réponse à cette question. Je crois qu’il nous faut sortir de ce que j’appellerai l’antinomie Occupy Wall Street (OWS) / 15M-Podemos. D’un côté OWS, mouvement qui a malheureusement fait la démonstration de son improductivité politique directe (ceci dit sans méconnaître tous les effets de Occupy qui ont cheminé souterrainement, et à qui l’on doit sans doute, par exemple, la possibilité aujourd’hui d’un Bernie Sanders). De l’autre 15M qui n’est devenu productif qu’en se prolongeant sous la forme de Podemos… c’est-à-dire sous une forme qui en trahissait radicalement l’esprit des origines : un parti classique, avec un leader classique, classiquement obsédé par la compétition électorale, et décidé à en jouer le jeu le plus classiquement du monde : dans les institutions telles qu’elles sont et sans afficher la moindre velléité de les transformer. L’appel à une Constituante est une manière de sortir de cette contradiction de l’improductivité ou du retour à l’écurie électorale. Il faut que le mouvement produise « quelque chose » mais ce « quelque chose » ne peut pas être rendu au fonctionnement des institutions en place. Conclusion : le « quelque chose » peut consister précisément en la transformation des institutions.
Frédéric Lordon
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L’inquiétant projet de Nuit debout

Source : Challenges, Bruno Roger-Petit, 25-04-2016
Contrairement à ce que ses organisateurs tentent de faire croire, le mouvement Nuit debout dispose d’un vrai projet politique, dévoilé la semaine passée par l’économiste souverainiste Frédéric Lordon. Qui se comporte en maître-à-penser.
L'économiste Frédéric Lordon, tel un
L’économiste Frédéric Lordon, tel un “guide” de Nuit Debout intervenait longuement à la Bourse du Travail le 20 avril. DR/Capture d’écran
Avec l’économiste Frédéric Lordon, Nuit debout a renouvelé le genre ancien du culte de la personnalité. On n’avait pas vu cela depuis les années Mao et révolution culturelle. La dernière apparition du maitre à penser du mouvement en atteste. Nous sommes mercredi soir, à la Bourse du travail, et pour la troisième fois le guide Lordon apparait à ses disciples. Signe qu’il n’est pas un Nuit debout comme les autres, il exige de disposer d’une chaise afin de pouvoir livrer sa parole aux fidèles assemblés à la Bourse du travail. Les disciples s’empressent d’obéir. Vite une chaise pour Lordon ! La règle commune, on parle debout à Nuit debout, souffre d’une exception pour l’universitaire charismatique. Privilège assumé d’autorité : “Je suis le représentant du courant l’université assise”. Comme il se doit la scène est mise en ligne …par la Télé de gauche Paris.
A Nuit debout, tout le monde est à égalité mais Lordon est plus égal que les autres. En chaise à défaut d’être en chaire.
Sont rassemblés là, face au guide, les têtes pensantes de Nuit debout, les éléments les plus actifs et militants, les permanents de la place de la République. C’est une minute de vérité. Il faut voir et revoir cette intervention de 11 minutes, parce qu’elle livre la vérité sur Nuit debout. Qui le pense. Qui l’organise. Qui le manipule.

Et Lordon de dénoncer la secte malfaisante, celle de la “chefferie éditocratique”

Dans un premier temps, Lordon désigne l’ennemi. Les médias et la presse. Non pas les “journalistes de terrains, jeunes et précarisés” qui se reconnaissent en Nuit debout (pas fou Lordon) mais “la chefferie éditocratique” qui “confisque la parole autorisée”. Lordon met ses troupes en garde. La “chefferie éditocratique” veut pousser Nuit debout à débattre dans un cadre démocratique, afin d’imposer encore et encore “le citoyennisme intransitif, qui débat pour débattre, mais ne tranche rien, ne clive rien, et est conçu pour que rien n’en sorte”. Lordon tranche, il faut refuser cette démocratie “All inclusive”.
A Nuit debout, on ne débat pas, on combat. Pour Lordon, le débat démocratique, c’est l’impasse qu’entendent imposer “la secte malfaisante, la secte de l’oligarchie néolibérale intégrée”, celle des “médias organiques de l’ordre social”.
Et Lordon de justifier l’intimidation physique infligée à Alain Finkielkraut, l’ennemi suprême : “Nous voilà sommés d’être inclusifs, violence du capital et violence identitaire raciste, violence dont Finkielkraut est peut-être le propagateur le plus notoire”. Et de réitérer le refus de la confrontation avec l’ennemi désigné : “Ces médias nous demandent d’accueillir Finkielkraut et bien non ! Pas d’animation citoyenne all inclusive comme le voudraient Laurent Joffrin et Najat Vallaud Belkacem !” Et de conclure avec des mots lourds de sens : “nous ne sommes pas ici pour être amis avec tout le monde, et nous n’apportons pas la paix, nous n’avons aucun projet d’unanimité démocratique”.
Convenons que Lordon est cohérent. Et transparent. Le voici qui précise ensuite comment Nuit debout doit désormais mener le combat, hors du champ démocratique.
D’abord en dépassant le cadre revendicatif traditionnel des luttes sociales, qui n’est pas révolutionnaire : “Revendiquer est une nécessité, parfois même vitale”, mais de portée limitée, “ceci n’aura pas de sens tant que nous ne mettrons pas en question les structures du néolibéralisme”. En vérité, Lordon veut casser le cadre dans lequel évolue les rapports de forces entre partenaires sociaux : “S’il n’y a plus d’alternative dans le cadre, il y a toujours possibilité de refaire le cadre. C’est de la politique, pas du revendicatif. On chasse les gardiens du cadre”.
Une fois le but assigné, Lordon passe à la méthode, celle “des grains de sable” : “Il faut mettre des grains de sable partout” lance-t-il, illustrant cette stratégie à l’aide d’exemples concrets : “C’est débouler dans une réunion d’Anne Hidalgo, c’est débouler dans la conférence d’une association d’étudiants à l’ESCP qui invite Florian Philippot”. Et de scander : “C’est faire dérailler le cours normal des choses, les harceler, leur ôter toute tranquillité !”
Et Lordon de compléter le cours de méthode : grâce à la stratégie des “grains de sable”, s’opérera “la jonction”,  soit la coagulation du “militantisme de centre-ville, des classes ouvrières et de la jeunesse ségrégée des quartiers”, et “cette force sera irrésistible”. Constituée, elle se lancera à l’assaut du “cadre à refaire”, notamment “les traités assassins, les traités européens et le TAFTA”. Lordon fait dans le prophétique, qui ne cache pas à ses ouailles que “La nuit debout, la grève générale, la république sociale, c’est loin”.
Et voilà.

Nuit debout a bien une feuille de route, tracée par un chef

Mercredi dernier, le rideau Nuit debout s’est déchiré. En réalité, l’évènement initié par François Ruffin et ses camarades dispose d’un cerveau qui montre le chemin, établit la feuille de route et fournit le prêt-à-penser des objectifs et de la méthode.
Nuit debout est bel et bien pensé, monté et organisé par des professionnels de la politique. Révisons notre Lénine. Là où il y a organisation, il y a direction. Là où il y a direction, il y a guide. Et ce guide, c’est Frédéric Lordon, dont les interventions savamment mises en scène le hissent au-dessus du bruit médiatique. A Nuit debout, tout le monde parle, mais on entend que Lordon. Rassurons Emmanuel Todd, qui s’inquiétait de l’avenir du mouvement “Pas de révolution sans organisation”, l’organisation de Nuit debout, pour qui veut bien la voir, est bien là. Présente. Active. Et menaçante.
Relisons bien Lordon, et méditons. Le sous-texte de son intervention, applaudie à tout rompre, est empreint de sentiments qui ont peu à voir avec la gauche de Jaurès ou Blum. Refus du débat démocratique organisé. Haine de l’Europe du libre-échange. Promotion du populisme souverainiste. Négation de la liberté de la presse. Rejet de l’autre à raison de sa différence de pensée. Appel à des perturbations de réunions publiques…  Est-ce vraiment un programme politique destiné à libérer les opprimés ? A apaiser le pays ? A libérer les consciences ? Osons la question : s’il se trouve des esprits pour passer à l’acte selon les préceptes de Lordon, quelle sera l’étendue des dégâts à constater ?
Le Nuit debout de Lordon est bien loin de la vision idyllique que certains politologues tentent d’imposer, à l’image de Gaël Brustier déclarant (sans rire) au Figaro : “Il y a plutôt une forme de joie de vivre Place de la République… qui tranche justement avec la hantise du déclin commune à nos sociétés”. Cet éclairage fait honneur à la politologie contemporaine. Ainsi, quand Lordon déclare : “Nous n’apportons pas la paix” et “nous n’avons aucun projet d’unanimité démocratique”, il est le Charles Trenet de Nuit debout chantant “Y a de la joie”. C’est tellement évident. Nuit debout, c’est fun. La politologie est (aussi) devenue un sport de combat.
Source : Challenges, Bruno Roger-Petit, 25-04-2016
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Lordon debout dans la nuit…

Source : Russeurope, Jacques Sapir, 26-04-2016
 La question de l’avenir du mouvement « Nuit Debout » se pose avec acuité. Nul n’en conteste l’importance, même si les différences que l’on peut trouver entre ce qui se passe à Paris et dans les villes de province est une évidence. Le mouvement parisien a donné de lui une image sectaire et semble vouloir retomber dans les errements de la « démocratie d’AG » post-68. Mais, juger ce mouvement à la seule aune de son apparence parisienne serait une profonde erreur. L’émergence de réunions se tenant sous la bannière de « Nuit Debout » dans des dizaines et des dizaines de villes de province, dont certaines ne sont nullement des centres universitaires, est une réalité tout aussi, et en un sens même plus importante, que les péripéties de la place de la République.
Fréderic Lordon vient de publier le texte d’une interview qu’il a donné à un journal espagnol[1]. Cette analyse est intéressante mais elle est aussi révélatrice des illusions de ce mouvement dont certaines sont reprises par Lordon. Il est par ailleurs férocement attaqué. On le sait, une presse aux ordres, car le magazine Challenges[2] est une succursale du Nouvel Obs’, lui-même succursale du P « S », lui attribue un rôle qu’il n’a pas[3]. Les délires complotistes de Bruno Roger-Petit seraient plutôt à porter au crédit de Lordon, et il peut considérer le fait d’être devenu la cible des sentines du vice et de la mauvaise littérature comme un honneur. Mais le dire ne signifie pas qu’il n’ait aucun rôle. D’où l’importance de son avis.
Lordon et l’extension sociale du mouvement
Quand il dit, répondant à la question sur l’extension de ce mouvement aux classes populaires et défavorisées : « C’est une question tellement décisive qu’elle en est presque douloureuse… Quand on voit déjà les difficultés à simplement faire agir de concert des fractions politisées mais sociologiquement hétérogènes comme les classes ouvrières syndiquées et les milieux du militantisme urbain, on mesure plus lucidement les barrières à franchir pour nouer le contact avec d’une part les populations des quartiers, et d’autre part celles de ce que vous appelez la « France périphérique » — je n’ai même pas besoin d’insister sur tout ce qui d’ailleurs oppose ces deux populations… », il traduit une évidence, mais il fait aussi un aveu. L’évidence, c’est le manque de liens concrets entre une partie du mouvement « Nuit Debout » et ces classes populaires et défavorisées[4]. C’est en particulier le cas à Paris, mais aussi dans les grandes villes, comme Marseille ou Lyon. Les difficultés rencontrées par le mouvement « Nuit Debout » marseillais quand il a tenté de « faire la jonction » avec les quartiers nord de la ville sont emblématiques de ces difficultés. La situation est un peu différente dans les villes moyennes où s’est développé le mouvement, et c’est d’ailleurs l’un de ses principaux intérêts.
Mais, Lordon montre aussi, dans cette même interview, qu’il n’a que peu idée du ressenti de ces classes sociales que ce soit celle de la « France périphérique »[5], ou que ce soit celle qui sont aujourd’hui en proie à l’insécurité culturelle[6]. S’il en avait la moindre idée il ne dirait pas les consternantes banalités qu’il aligne dans les lignes qui suivent. Ces classes demandent des réponses de fond, des réponses politiques. Et il ne faut pas s’étonner qu’elles se tournent vers le Front National si personne ne peut ou ne veut les donner.
La question de la grève générale
L’une des questions qui est donc posée dans ce texte est celle de la grève générale. Je l’ai moi aussi abordée dans un commentaire sur « Nuit Debout »[7]. Il écrit : « Il n’y aura pas de transformation politique d’ampleur sans un mouvement populaire de masse. Or un tel mouvement prend nécessairement, pour partie, la forme de la grève générale. Et il n’y a pas de grève générale sans le concours des organisations de salariés. C’est aussi simple que ça ». C’est entièrement vrai, sauf qu’il ne produit pas ce que l’on attend alors, c’est à dire une analyse politique de l’état de ces organisations syndicales, et il reste alors dans l’une des postures qu’il affectionne : l’imprécation. Non que cette posture soit inutile. Il m’arrive d’ailleurs de l’adopter. Encore faut-il qu’elle ne devienne systématique. Donc, poser la question de la grève générale n’a de sens que si on peut fournir au moins des éléments de réponse. Et, ces éléments exigent que l’on fasse de la politique, c’est à dire que l’on accepte, voir que l’on recherche le débat politique.
Or, c’est tout le contraire que fait Frédéric Lordon. Je sais qu’il peut y avoir un plaisir morbide à regarder un désastre en disant « je l’avais bien prévu » et en ajoutant « ah, si l’on m’avait écouté ». Mais cela, c’est de l’onanisme politique. Il faut donc, au risque de se tromper, et nul d’entre nous n’est omniscient, proposer des formules politiques qui soient susceptibles de nous conduire vers là où nous voulons aller.
La question qui est donc posée est celle des formes organisées qui pourraient permettre de faire pression sur les centrales syndicales, qui associeraient le cas échéant des militants syndicaux de ces dites centrales, et qui se nourriraient d’objectifs intermédiaires. J’ai fait des propositions en ce sens et n’y reviens pas[8].
La question de l’organisation
Ce qui conduit, bien naturellement, à la question de l’organisation du mouvement. Il fut un temps, dans les mois qui suivirent mai 1968, où l’on pouvait lancer le mot d’ordre « aux armes, à l’organisation ». Car, et c’est indubitable, l’organisation EST une arme. Mais, la mode est au discours sur la transversalité du mouvement. Fort bien ; encore faudrait-il tirer le bilan de ces mobilisations plus ou moins spontanée, lancée depuis les « réseaux sociaux », que ce soit celles du « printemps arabe » (et on pense à l’Egypte) ou que ce soit celles d’Ukraine. La très faible organisation, justement cette « transversalité » dont certains aiment bien se rincer la bouche, a aboutit à des mobilisations facilement récupérables. L’instrumentalisation y fut quasiment immédiate. Non que la « verticalité » soit le parangon de toutes les vertus, soit la réponse à toutes les situations. Mais, ce discours sur la « transversalité » ne peut être tenu que sur la base d’un bilan critique des mobilisations précédentes et de leur devenir.
Ceci soulève un autre problème. Si la « verticalité » totale d’une forme d’organisation est à proscrire, le degré de transversalité, ou pour user d’un autre mot d’auto-organisation spontanée, d’une mobilisation est directement proportionnel à l’homogénéité des représentations des personnes que l’on veut mobiliser. Lordon le reconnaît implicitement : « Au demeurant l’AG de la Nuit debout n’est même pas conforme au modèle d’horizontalité pure qu’elle revendique d’accomplir. Par exemple, il n’y a pas d’AG sans règles — règle du tour de parole, règle du temps de parole, respect de la personne modératrice, règles gestuelles de manifestation des opinions, etc. — et ces règles ont par définition un caractère institutionnel et verticalisé puisqu’elles s’imposent à tous, qu’elles font autorité, que tous les reconnaissent — conceptuellement, la verticalité c’est cela. Nous avons donc d’emblée affaire, et dès cette échelle, à de l’institutionnel-verticalisé, ce qui prouve bien l’inanité d’un mot d’ordre maximaliste d’horizontalité pure, en fait intenable »[9].
Mais il n’en tire pas toutes les conséquences. Il faut soit construire les institutions assurant une forte homogénéisation des représentations, soit trouver des mots d’ordre simples, unificateurs, qui assurent pour un temps une forme d’homogénéisation des représentations. Ce dont il est question, c’est un mot d’ordre général comme « la paix, le pain, la terre »[10]. Le discours sur l’écriture d’une nouvelle Constitution ou sur la création d’une alternative globale et cohérente n’est pas adapté à cela (même s’il contient des éléments qui sont « justes »). Ce mot d’ordre doit aussi permettre à la mobilisation de dépasser son objectif immédiat, et lui permettre de se projeter dans un futur, certes relativement proche, mais au-delà de la « Loi El Khomri ». Il peut concerner les élections présidentielles à venir, ou associer la question de la souveraineté et la question sociale.
Fondamentalement, un mouvement comme « Nuit Debout » est politique, et il exige que l’on fasse de la politique. Mais faire de la politique veut dire aussi quitter la posture où l’on prétend se garder les mains blanches. Cette posture, elle est celle du dirigeant politique qui se réfugie derrière les règles et les normes pour ne pas assumer les responsabilités de sa politique[11], comme elle peut être celle de l’intellectuel qui reste dans un discours volontairement complexe, qui se refuse à affronter les problèmes politiques d’alliance et de dynamique politique. Si Fréderic Lordon veut jouer un rôle dans ce mouvement, il est urgent qu’il assume ses responsabilités. Ou alors, il disparaîtra.

[3] Ajoutons qu’il faut aussi attaqué par l’Opinion, cette gazette des maisons de retraites pour Juppéistes au bord de la crise de nerfs et de la maladie d’Alzheimer : http://www.lopinion.fr/edition/economie/nuit-debout-frederic-lordon-penseur-a-dormir-debout-100934
[4] Ce que j’écris dans ma note « Nuits debout », postée le 12 avril 2016, sur RussEuropehttps://russeurope.hypotheses.org/4857
[5] Guilluy C., La France périphérique. Comment on sacrifie les classes populaires, Paris, Flammarion, 2014.
[6] Bouvet L., L’insécurité culturelle. Sortir du malaise identitaire français, Paris, Fayard, 2015.
[8] Idem.
[10] Mot d’ordre sur lequel les bolchéviques vont construire leur succès au printemps et à l’été 1917….
[11] Bellamy R., « Dirty Hands and Clean Gloves: Liberal Ideals and Real Politics », European Journal of Political Thought, Vol. 9, No. 4, pp. 412–430, 2010

27 réponses à Nuit debout, convergences, horizontalité, par Frédéric Lordon

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KiwixarLe 30 avril 2016 à 02h34
Il n’y a aucune autre explication que l’aveuglement idéologique le plus absolu” : ça commence mal. Lordon devrait ôter ses oeillères et être moins péremptoire dans ses affirmations (l’humilité ne fait de mal à personne, de manière génerale). Il pourrait y avoir une autre explication toute simple au projet de loi “Hollande-Valls-El Khomri” (biffer la bouc émissaire) : l’application des directives de Bruxelles-Berlin-Washington.
“Il faut avoir complètement perdu contact avec l’état réel de la société” : non, il savent TRES bien et exactement dans quel état sont la France et les Francais. Toutes les reformes anti-sociales, dans le pays (et au sein des entreprises) se font de la même manière : ils essaient une “réforme”, si ca passe, tant mieux, si ça râle un peu, ils négocient et lâchent quelques points secondaires, et si ça râle vraiment, ils laissent tomber temporairement… avant de refourguer la même chose sous un autre nom.

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