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samedi 27 février 2016

Au Salon de l’agriculture, Hollande cible de la colère des agriculteurs



Au Salon de l’agriculture, Hollande cible de la 

colère des agriculteurs


Le Monde.fr  • Mis à jour le  | Par 


Avec l'effondrement généralisé des cours agricoles qui frappe en particulier les éleveurs, plus de 40 000 exploitations sont en situation d'extrême urgence, selon le ministre de l'agriculture, Stéphane Le Foll.

Avec l'effondrement généralisé des cours agricoles qui frappe en particulier les éleveurs, plus de 40 000 exploitations sont en situation d'extrême urgence, selon le ministre de l'agriculture, Stéphane Le Foll.
JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR LE MONDE
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Adieu, veaux, vaches, cochons… Qu’il est loin le temps de la campagne présidentielle de 2012 durant laquelle le candidat François Hollande avait pu passer près de douze heures d’affilée au Salon de l’agriculture, sans incident et bien au contraire avec des encouragements. Ce matin, le président de la République a inauguré le 53e Salon de Paris, dans une ambiance totalement différente.
Arrivé à 7 heures, il est reparti peu après 12 h 30, soit à peine cinq heures passées sur place, entouré d’un service d’ordre pléthorique et tenu constamment à distance du public. Certes, le chef de l’Etat s’est prêté à la tradition de la photo avec la vache de l’année – cette année, Cerise, 8 ans, de race bazadaise –, mais le folklore s’est arrêté là. Tout au long du reste de sa visite, il a surtout eu droit à un exposé des difficultés du monde agricole, confronté depuis plusieurs mois à une crise économique et sociale profonde, et à des sifflets d’une partie des agriculteurs présents.
Remontant l’une des allées de l’élevage bovin, M. Hollande a subi, entre la prim’holstein et la vosgienne, une bordée d’insultes et des huées de paysans en colère. « Fossoyeur ! »« Pourri ! »« Bon à rien ! », le trajet est court, mais les mots sont durs pour M. Hollande, le tout sous l’œil des caméras de télévision.
A ses côtés, Stéphane Le Foll, le ministre de l’agriculture, a la mine des mauvais jours, mâchoires serrées et regard noir. Ici ou là, la colère agricole se teinte au passage du cortège présidentiel de messages directement politiques, à quatorze mois de l’élection présidentielle. « Vive Marine Le Pen ! », crie un éleveur. « C’est quand qu’on fait un putsch ? Rappelons Massu et Salan, on va la dégager, la gauche caviar », lance un autre un peu plus loin, pourtant trop jeune pour avoir connu la guerre d’Algérie.

Des manifestants interpellés puis relâchés

Pendant que le président de la République s’attarde sur la mezzanine du pavillon de la pêche, à quelques centaines de mètres de lui, plusieurs dizaines d’agriculteurs, membres pour la plupart de la FDSEA d’Ile-de-France, tentent d’occuper le stand du ministère de l’agriculture. « On a voulu l’enrubanner », expliquera ensuite Damien Greffin, leur président. Les CRS interviennent pour les déloger, des coups s’échangent, et une poignée de manifestants sont interpellés avant d’être relâchés une heure plus tard.
Entre-temps, M. Hollande a modifié son trajet dans le Salon pour éviter le stand du ministère. Encerclé par un service de sécurité particulièrement tendu – près de cent hommes ont été mobilisés dans le double contexte de la contestation agricole mais aussi de l’état d’urgence – il remonte au pas de charge une allée latérale déserte, pour s’engouffrer dans une salle au premier étage d’un des hangars de la porte de Versailles.
Il va y rester deux heures pour participer à une réunion avec l’ensemble des professionnels du secteur agricole avant de remonter dans sa voiture et de quitter définitivement les lieux.
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François Hollande, président de la République, visite le Salon international de l'agriculture avec Xavier Belin, président de la FNSEA, à la porte de Versailles à Paris, vendredi 5 février 2016.
François Hollande, président de la République, visite le Salon international de l'agriculture avec Xavier Belin, président de la FNSEA, à la porte de Versailles à Paris, vendredi 5 février 2016. JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR "LE MONDE"
Pas de « déambulation » entre les stands, comme M. Hollande aime tant le faire habituellement, avec toujours un mot pour chaque exposant, sous le regard gourmand des caméras. Pas de « selfies » ou d’autographes échangés avec les badauds. Cette année, les exposants visités ont été limités, souvent confinés dans des pièces fermées, à l’abri des regards et des sifflets du public.
Les médias, eux, sont tenus à longue distance, sauf les rares tolérés dans « la bulle » opérée par le service de communication de l’Elysée autour du chef de l’Etat. Un verre de lait avalé, un autre de vin, un mot sur une moissonneuse-batteuse flambant neuve ou sur une tour Eiffel réalisée avec des légumes, le président de la République a fait le minimum. Question de contexte. « On savait que ce serait difficile, mais Hollande, lui, est venu, alors qu’en 2010 Sarkozy n’avait même pas inauguré le Salon », glisse un conseiller de l’Elysée au détour d’une allée.

Aucune nouvelle annonce pour les agriculteurs

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Les éleveurs manifestent lors de la visite de François Hollande, président de la République, au Salon international de l'agriculture à la porte de Versailles à Paris, vendredi 5 février 2016.
Les éleveurs manifestent lors de la visite de François Hollande, président de la République, au Salon international de l'agriculture à la porte de Versailles à Paris, vendredi 5 février 2016. JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR "LE MONDE"
« J’entends les huées, je suis venu pour écouter les difficultés et parfois la colère des agriculteurs », déclare M. Hollande. Le chef de l’Etat n’est arrivé au Salon sans aucune annonce nouvelle, mais il rappelle les récentes aides financières débloquées par le gouvernement pour aider les éleveurs ou les producteurs de lait, comme la baisse 
des cotisations sociales ou l’année blanche fiscale. Deux jours avant la fin des négociations entre producteurs et distributeurs, il veut « faire pression » sur ces derniers pour qu’il « puisse y avoir une vraie reconnaissance du travail de l’agriculteur » dans la fixation des prix : « Je veux dire aux distributeurs : attention à ce que vous allez faire dans les quarante-huit prochaines heures. »
Il promet également de porter la crise agricole à la table du prochain conseil européen du 7 mars. « Nous devons faire monter les prix au niveau européen pour casser la 
spirale déflationniste qui s’est installée »
, explique-t-il.
Mais M. Hollande n’hésite pas non plus à politiser le dossier agricole, renvoyant sur la droite et sur l’action du gouvernement sous le quinquennat Sarkozy les principales responsabilités de la crise actuelle. Il rappelle que c’est la loi de modernisation de l’économie, « votée sous le précédent quinquennat », en 2008, qui « permet au distributeur d’imposer ses prix »« La transposition ou la surtransposition des directives (européennes), c’était avant 2012. Moi, je n’ai pas ajouté de normes européennes », ajoute-t-il.
Aux agriculteurs, il répond : « La colère, je la comprends quand il y a des crises aussi nombreuses et répétitives. Mais celles-ci ont une cause, c’est d’avoir libéralisé, d’avoir considéré que c’était l’offre et la demande qui devaient fixer les prix. Prenons l’exemple des quotas laitiers, qui les a cassés, qui a pris cette décision avant 2012 avec les conséquences que l’on sait ? », lance-t-il en conclusion, à l’attention de son prédécesseur à l’Elysée Nicolas Sarkozy. Lequel doit venir visiter le Salon de l’agriculture mercredi 2 mars.

En savoir plus sur :  http://www.lemonde.fr/politique/article/2016/02/27/au-salon-de-l-agriculture-francois-hollande-cible-de-la-colere-des-agriculteurs

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