L'actualité du mardi 08/10/2013
La UNE
La mort de
Patrice Chéreau nous touche et nous peine comme la disparition
d’un compagnon de route qui suivait l’histoire de Libération comme ce journal accompagna
la sienne. De ces premières mises en scène de théâtre puissantes dans les
années 70 jusqu’à son passage à l’opéra (la «Tétralogie» de Wagner à
Bayreuth, avec Boulez) et au cinéma (l’Homme
blessé, la Reine Margot). Mais
sa signature reste majoritairement associée au théâtre où, le plus souvent, en
compagnie du fidèle décorateur Richard Peduzzi, il crée un style dont
les trouvailles bousculent et exhaussent aussi bien les classiques (Marivaux,
Shakespeare) que les modernes (Heiner Müller). Le théâtre par Patrice Chéreau :«Un contenant
qui crée du vide.» Ce travail
de relecture de l’espace scénique augmente en intensité après sa rencontre
avec le jeune Bernard-Marie Koltès, au début des années 80. Il signe
avec lui un pacte artistique et amical décisif. Combat de nègre et de chiens, Dans la solitude des champs de coton,
sont, comme on dit, des dates.
On y expérimente que le montreur d’ombres, le faiseur
d’images, est aussi un formidable montreur d’idées.
Et puis il y avait l’homme. Extrêmement cultivé, européen
interlope, parlant l’allemand comme une deuxième langue maternelle,
chaleureux, séducteur, fidèle en amitié comme en inimitié, changeant, beau,
vivant. Et fondamentalement mélancolique. Invité du musée du Louvre
en octobre 2010 pour une exposition-intervention mémorable,
il nous confiait : «Le mot fantôme est parfait. Il me
convient bien.»
Gérard LEFORT
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